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Moyen-Orient - Éclairage

Syrie : une levée de sanctions américaines qui interroge

Le Trésor américain retire de sa liste noire deux sociétés appartenant à l’homme d’affaires syrien Samer Foz.

Syrie : une levée de sanctions américaines qui interroge

Samer Foz au cours d’une conférence de presse en juin 2019. Capture d’écran YouTube

Le nom de Samer Foz, considéré comme l’un des hommes d’affaires syriens ayant le plus profité de la guerre, a refait surface ces derniers jours, après que deux de ses sociétés ont été retirées de la liste des sanctions imposées par le Trésor américain il y a deux ans. L’homme, qui dès 2013 a su mener sa barque dans les eaux troubles de l’industrie et du commerce syriens, a pu compter sur ses liens directs, et pour l’instant indéfectibles, avec le régime de Bachar el-Assad. Son enrichissement soudain, qui a suscité beaucoup de questions, ainsi que sa position de plus en plus forte au sein de la nomenklatura politique syrienne l’ont mis sur les radars des puissances occidentales. En juin 2019, le Trésor américain le place, ainsi que des membres de sa famille et certaines de ses compagnies, sur sa liste noire des sanctions, en l’accusant d’avoir « converti les atrocités du conflit syrien en lucratifs profits ». Quelques mois plus tôt, en janvier 2019, l’Union européenne avait également sanctionné l’oligarque, sa société Aman Holding ainsi que 14 autres personnes et entités pour avoir utilisé leurs liens avec le régime syrien à leur propre avantage financier et pour avoir aidé à le financer. La holding sert de parapluie à plus d’une douzaine d’autres sociétés, cogérées par la famille, notamment par son frère Amer Foz et sa sœur Hosn Foz. Deux de ces sociétés basées aux Émirats arabes unis ont donc été retirées de la liste la semaine dernière par les autorités américaines : l’ASM International General Trading ainsi que la société de commerce international Silverpine, qui ont permis à Samer Foz d’étendre ses tentacules hors de Syrie.

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Selon Charles Lister, expert au Middle East Institute, les deux compagnies appartenant au magnat syrien auraient été retirées de la liste parce qu’elles ont été dissoutes. Il s’agit désormais, pour les autorités américaines, de déterminer si elles ont été remplacées ou pas afin de lancer de nouvelles sanctions. « Tout comme certaines personnalités syriennes sous sanctions sont décédées et ont donc été retirées de la liste il y a quelques semaines, si ces sociétés ont été dissoutes, les sanctions sont levées », précise Ayman Abdel Nour, rédacteur en chef du site d’information All4Syria.

Pourparlers avec l’Iran

Cette décision du Trésor américain a toutefois surpris, d’autant qu’elle n’a pas été motivée, faisant craindre un revirement dans la politique de sanctions américaine à l’égard de Damas et de ses sponsors. Trois membres de la Chambre des représentants américaine ont fait part de leur inquiétude en écrivant à l’administration Biden pour demander une enquête. Ces membres du Congrès lient la décision du Trésor aux pourparlers entre l’administration Biden et l’Iran à Vienne sur un retour à l’accord nucléaire du JCPOA de 2015, en s’appuyant sur le fait que des entités iraniennes ont également été supprimées de la liste des sanctions. Trois anciens responsables iraniens et deux sociétés précédemment impliquées dans l’achat, l’acquisition, la vente, le transport ou la commercialisation de produits pétrochimiques iraniens ont en effet été rayés de la liste en même temps que les sociétés détenues par Samer Foz. « C’est cette concomitance qui rend l’affaire suspecte, laissant penser qu’il y a certains deals sous la table. D’autant que le Trésor avait indiqué que la compagnie Silverline appartenait à un certain Hussein Foz, donc un homme, alors qu’elle appartient à Hosn Foz, la sœur. Comment les autorités ont-elles pu déterminer que la société était dissoute si elles n’avaient pas le nom exact du propriétaire ? C’est ce qui a poussé les membres du Congrès à s’interroger », poursuit Ayman Abdel Nour. Face à la requête des élus républicains, le porte-parole du département d’État a réagi en insistant sur le fait que cette action n’avait « aucun lien » avec les efforts du président américain pour relancer les pourparlers avec Téhéran.

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Le timing de l’annonce du Trésor américain interroge aussi parce qu’elle est intervenue quelques jours à peine avant la rencontre entre le président Joe Biden et son homologue russe Vladimir Poutine, qui a eu lieu hier à Genève. La levée de ces sanctions pourrait être perçue comme un geste de bonne volonté vis-à-vis de Moscou, parrain du régime Assad, en échange de quoi ce dernier cesserait de s’opposer à l’acheminent d’aide dans les zones rebelles. Un responsable américain a déclaré que la question sera mise sur le tapis alors que le mandat du mécanisme de l’ONU d’acheminement de l’aide humanitaire transfrontalière vers la Syrie doit expirer le 10 juillet prochain. Moscou menaçant d’opposer son veto au Conseil de sécurité, l’aide humanitaire doit impérativement transiter par le régime de Damas.

« Cette levée de sanctions n’indique pas toutefois de changement radical des Américains vis-à-vis de la Syrie. Depuis que la nouvelle administration est arrivée en janvier dernier, il n’y a pas eu de nouvelles sanctions, et il se pourrait qu’elle n’utilise pas ce moyen de pression autant que la précédente. Cela dépendra en réalité des négociations avec l’Iran et avec la Russie », estime Joseph Daher, maître d’enseignement et de recherche à l’Université de Lausanne et professeur affilié à l’Institut universitaire européen de Florence. Fin mai, le département d’État avait affirmé que l’administration Biden continuerait d’appliquer les sanctions requises par la loi César, qui « a été adoptée à une écrasante majorité du Congrès américain » et qui vise toute personne, société, institution ou tout gouvernement faisant du commerce avec le pouvoir en place à Damas ou contribuant à la reconstruction de la Syrie.

Le nom de Samer Foz, considéré comme l’un des hommes d’affaires syriens ayant le plus profité de la guerre, a refait surface ces derniers jours, après que deux de ses sociétés ont été retirées de la liste des sanctions imposées par le Trésor américain il y a deux ans. L’homme, qui dès 2013 a su mener sa barque dans les eaux troubles de l’industrie et du commerce syriens, a pu...

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Il faut une levée de sanctions totales, pour épargner davantage aux libanais, la fuite de leurs biens vers la Syrie à travers la banqueroute aidée par le Hezb iranien.

Esber

06 h 33, le 17 juin 2021

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Commentaires (1)

  • Il faut une levée de sanctions totales, pour épargner davantage aux libanais, la fuite de leurs biens vers la Syrie à travers la banqueroute aidée par le Hezb iranien.

    Esber

    06 h 33, le 17 juin 2021

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