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Société - Santé publique

Chronique d’une catastrophe sanitaire annoncée

Faute de matériel médical subventionné, les dialyses rénales sont menacées d’arrêt dès la semaine prochaine.

Chronique d’une catastrophe sanitaire annoncée

Dans un hôpital de Beyrouth, le 31 mai 2021. Mohammad Azakir/Reuters

Annoncée partout et sur tous les tons, la catastrophe sanitaire est aux portes, conséquence inévitable de l’effondrement monétaire et des limites de la politique de subvention de la Banque du Liban. Mais contrairement à d’autres secteurs, celui de la santé finit dramatiquement par être une question de vie ou de mort. Les autorités publiques vont-elles donc accepter que les hôpitaux privés suspendent les dialyses rénales dès la semaine prochaine, comme elles l’ont annoncé dans un communiqué, faute de recevoir de leurs fournisseurs le matériel médical adéquat ? On pourrait ignorer cet avertissement en y décelant une exagération habituelle. Pourtant, la mise en garde est cette fois d’autant plus crédible qu’elle est lancée alors que beaucoup d’hôpitaux ont déjà suspendu les tests de laboratoire en externe, ou des opérations chirurgicales, en raison de pénuries de réactifs, de produits anesthésiques ou de matériel assurés jusqu’à présent à des prix subventionnés, mais devenus introuvables, sauf à des prix prohibitifs.

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« Ce matériel existe, insiste le président du syndicat des hôpitaux privés, Sleiman Haroun. Il nous a été livré cette semaine encore au prix subventionné, mais les fournisseurs – ils sont trois ou quatre qui contrôlent ce marché – nous ont annoncé qu’à partir de la semaine prochaine, son prix sera fixé en fonction du taux du dollar au marché libre, si la BDL choisi de ne pas le subventionner. Le tarif subventionné de la séance de dialyse est de 250 000 LL en ce moment. Une augmentation des prix le fera passer à 650 000 LL, soit 400 000 livres de plus. À raison de deux séances par semaines (normalement, il en faut trois), cela veut dire 800 000 LL par semaine et quatre fois plus par mois, soit 3 200 000 LL, alors même que les banques ont fixé à 5 millions le plafond des retraits des déposants ! »

« La plupart des personnes suivant des traitements de dialyse ne pourront assumer une telle augmentation », poursuit M. Haroun, qui relève que « seules les personnes très aisées peuvent se permettre une dialyse à domicile ». « Pour certains, précise-t-il, ce sera à terme une condamnation à mort par empoisonnement. Voilà où nous en sommes ! » Et le président du syndicat des hôpitaux privés d’ajouter : « Ce chantage à la santé publique est inadmissible ! Que les filtres nous soient livrés et que les fournisseurs se débrouillent ensuite avec la banque centrale et le ministère de la Santé ! Nous n’avons pas le droit de jouer avec la vie des Libanais ! »

Telle est également la réaction du professeur d’université Antoine Courban, qui s’insurge contre l’indifférence des pouvoirs publics dans cette affaire et demande « que le parquet s’en mêle et perquisitionne les dépôts des fournisseurs ». « Selon le droit pénal, ce sera de la non-assistance à personne en danger, un crime qui est puni par la loi », tonne M. Courban.

Au sujet du nombre de personnes traitées pour insuffisance rénale qui risquent ainsi leur santé et peut-être leur vie, le président du syndicat des hôpitaux précise qu’ils étaient environ 4 500 avant la pandémie, et déplore que nombre d’entre eux aient succombé à l’épidémie de Covid-19. « Ce nombre doit être d’environ 4 000 aujourd’hui », avance-t-il.

Pénurie de réactifs

Plus tôt dans la journée, un communiqué du syndicat avait annoncé que les hôpitaux privés dans leur ensemble souffrent d’une grave pénurie de filtres pour dialyse, ainsi que de réactifs et d’équipements nécessaires pour effectuer des tests en laboratoire et diagnostiquer les maladies. « Beaucoup d’entre eux ont dû arrêter de réaliser des examens et ont été contraints de réduire le nombre de patients admis », avait déploré le texte.

La pénurie, rappelle-t-on, est due au différend opposant les importateurs d’équipements médicaux à la Banque du Liban au sujet de la subvention à 85 % de leurs achats au taux de change officiel, soit 1 507 livres libanaises pour un dollar. La BDL subventionne depuis le début de la crise économique et financière (octobre 2019) les importations de médicaments et de matériel médical. Mais avec des réserves qui ont atteint un seuil critique, elle scrute plus méthodiquement les factures qui lui sont présentées et agite le spectre d’un arrêt de la politique de subvention, faisant craindre le pire.

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« Nous sommes tous responsables de ce qui se passe, objecte le président de l’ordre des médecins », le Dr Charaf Abou Charaf, qui relève que « la banque centrale n’a aucune prise sur la destination finale des médicaments et équipements subventionnés, ou sur les prix auxquels ils sont vendus ; une partie de ces produits, médicaux ou autres, est détournée de sa destination finale et ne sert qu’à enrichir toute une faune de profiteurs ». « La corruption est générale, juge sévèrement le Dr Abou Charaf, mais vers qui se tourner ? Qui blâmer ? L’effondrement est total. Même nos amis ont perdu confiance en nous ! »

Appel à l’ONU

Pour le cardiologue Georges Ghanem, directeur de l’hôpital LAU-Rizk et fondateur de l’ONG « Les blouses blanches », le Liban souffre aujourd’hui « d’un manque total de transparence et de confiance ». « Nous ne savons pas combien de filtres de dialyse il reste au Liban, fulmine-t-il. Sans doute un petit stock qui sera fourni aux privilégiés, mais dont seront privés des petits hôpitaux ou les hôpitaux moins bon payeurs. Dans la plupart des établissements de santé, il en reste de quoi suffire pour une semaine à dix jours. »

Pourtant, ce n’est pas vraiment contre les fournisseurs que le Dr Ghanem s’élève. Ces derniers, dit-il en substance, dépendent des compagnies mères, qui sont sur le point de limiter ou suspendre leurs lignes de crédit, en attendant d’être payées, ce qui dépend du bon plaisir de la Banque du Liban qui fait traîner les remboursements.

« Un flou entoure toutes les opérations et explications, souligne aussi le cardiologue. Ni les hôpitaux ni les fournisseurs ne savent plus s’ils doivent prendre le risque de la continuité des produits ou des prix. » Et de conclure, découragé :

« C’est fini. Il n’y a plus de solution. 80 % des malades soufrant d’insuffisance rénale seront affectés par cette pénurie et les cercles vicieux qu’elle a produits, et dont le responsable, en dernier lieu, est l’autorité politique qui n’a pas établi un système de surveillance des médicaments subventionnés, qui sont au nombre d’environ 350, et dont la traçabilité est facile à déterminer. » Et de proposer en désespoir de cause que le Liban soit déclaré « État failli », afin que l’ONU et l’Organisation mondiale de la santé prennent la relève des autorités libanaises et suppléent aux carences de l’État.

Le directeur de l’hôpital gouvernemental Rafic Hariri, le Dr Firas Abiad, a déploré de son côté, dans une série de tweets, une aggravation rapide de la crise des soins et mis en garde contre un possible « effet domino » qui en résulterait. En effet, selon lui, une hausse des prix décidée dans un service risque d’affecter l’ensemble du système sanitaire.

« La forte augmentation des prix des examens de laboratoire est un autre signe de l’aggravation rapide de la crise des soins de santé », a écrit le Dr Abiad sur Twitter. « On demande désormais aux patients de payer les services de santé au taux du marché du dollar », a-t-il déploré après l’annonce plus tôt cette semaine, par le syndicat des laborantins du Liban, d’une hausse des tarifs.

Cette augmentation des prix fait suite à une pénurie de réactifs, de kits et de matériel de laboratoire, en raison du manque de fonds octroyés pour les importations en dollar, ce qui avait obligé certains établissements à refuser des tests jugés « non essentiels ».

Annoncée partout et sur tous les tons, la catastrophe sanitaire est aux portes, conséquence inévitable de l’effondrement monétaire et des limites de la politique de subvention de la Banque du Liban. Mais contrairement à d’autres secteurs, celui de la santé finit dramatiquement par être une question de vie ou de mort. Les autorités publiques vont-elles donc accepter que les hôpitaux...

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ILS CONDAMNENT TOUT CE MONDE A LA MORT CERTAINE. ET LES DEUX BELIERS BICORNUS DE LA BERGERIE MARONITE BLOQUENT LA FORMATION DU GOUVERNEMENT PAR ORDRE DE LEUR SEIDE IRANIEN. LE TORT QU,ILS FONT AUX CHRETIENS QUI EMIGRENT PAR MILLIERS EST ENORME. QUE LE DIABLE LES EMPORTE.

LA LIBRE EXPRESSION

15 h 55, le 11 juin 2021

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  • ILS CONDAMNENT TOUT CE MONDE A LA MORT CERTAINE. ET LES DEUX BELIERS BICORNUS DE LA BERGERIE MARONITE BLOQUENT LA FORMATION DU GOUVERNEMENT PAR ORDRE DE LEUR SEIDE IRANIEN. LE TORT QU,ILS FONT AUX CHRETIENS QUI EMIGRENT PAR MILLIERS EST ENORME. QUE LE DIABLE LES EMPORTE.

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