Le 31 mars dernier, le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah tenait un discours dans lequel il estimait qu’« il est temps » de former le nouveau gouvernement. Lors de son intervention télévisée mardi dernier, le numéro un du parti chiite a réitéré cette position, soulignant que la clé (pour surmonter la crise inédite dont souffre le Liban) réside dans la formation du nouveau cabinet. Sauf que tout au long de cette période, le Hezbollah n’a semblé exercer aucune pression concrète sur ses partenaires, notamment le tandem Baabda-Courant patriotique libre, pour les amener à modifier leurs positions jugées rigides de manière à faciliter la tâche au Premier ministre désigné Saad Hariri. C’est ce que plusieurs analystes et observateurs reprochent au parti chiite, estimant que cette attitude suscite des interrogations autour d’une réelle volonté du Hezbollah de voir le gouvernement se former dans les plus brefs délais.
Tentant de répondre à ces accusations, le secrétaire général du Hezbollah a pris le soin d’exprimer une position très calculée sur ce plan. « Pour résoudre toutes les crises au Liban, la clé réside dans la formation d’un nouveau gouvernement », a-t-il lancé mardi soir. Commentant le bras de fer politico-personnel opposant le Premier ministre désigné au camp du président, le dignitaire a adressé un message à Michel Aoun et à Saad Hariri : « Vous, MM. Aoun et Hariri, êtes responsables de la formation du gouvernement et du sort du pays. » Et d’appeler les deux hommes à se « mettre d’accord » pour former le cabinet, incitant le chef du courant du Futur à se rendre à Baabda et y rester « tout le temps qu’il faudra pour arriver à des résultats ». Ces propos de Hassan Nasrallah sont intervenus à l’heure où les rapports entre Baabda et la Maison du Centre sont complètement rompus depuis le 22 mars dernier, date du dernier entretien orageux entre MM. Aoun et Hariri.
Le secrétaire général du Hezbollah a par ailleurs exprimé son franc soutien aux efforts que pourrait déployer le président de la Chambre Nabih Berry, allié de longue date du parti de M. Nasrallah, dans les prochains jours pour remettre sur le tapis son initiative. Concoctée avec le leader du Parti socialiste progressiste Walid Joumblatt, cette solution prévoit la formation d’une équipe élargie de 24 ministres sans tiers de blocage.
« C’est tout ce que le Hezbollah peut faire »
Au vu du contexte politique tendu dans lequel elles sont intervenues, les déclarations de Hassan Nasrallah ont été interprétées comme traduisant sa volonté de réduire le fossé entre son parti et celui de Nabih Berry au sujet du gouvernement. Mais un proche du parti de Dieu met les points sur les i. « Nous n’avons aucun problème avec Nabih Berry sur ce plan. La vraie mésentente, c’est celle entre le président de la République et le Premier ministre désigné. Et nous sommes très impliqués dans les contacts visant à la régler », déclare ce responsable hezbollahi sous couvert d’anonymat. « Nous voulons que le gouvernement soit formé le plus rapidement possible, et nous menons des contacts allant dans ce sens tant avec M. Berry qu’avec le président de la République et (le chef du CPL) Gebran Bassil », ajoute-t-il. Et de poursuivre : « Nous sommes engagés à ce que Saad Hariri forme un gouvernement rapidement. » Un message adressé implicitement au chef de l’État qui avait estimé, dans une lettre adressée à la Chambre la semaine dernière, que le leader du Futur est « incapable » de former une équipe ministérielle.
À la missive présidentielle, le Parlement a répondu samedi dernier en appuyant les efforts du Premier ministre désigné qu’il a appelé à « coordonner » avec Michel Aoun pour mener à bien sa mission. Dans son discours, Hassan Nasrallah a pris une position similaire. « C’est tout ce que le Hezbollah peut faire à l’heure actuelle, surtout que le fossé n’en finit pas de se creuser entre MM. Aoun et Hariri », décrypte pour L’Orient-Le Jour Kassem Kassir, analyste politique connu pour sa proximité du Hezbollah. Selon lui, « au vu de l’intensité du différend entre Baabda et la Maison du Centre, le Hezbollah ne peut pas imposer ses choix à ses alliés, en dépit de ses capacités politiques et militaires ». « Le parti ne peut pas, en outre, dicter sa volonté à MM. Aoun et Bassil, dans la mesure où la future équipe ministérielle serait amenée à gérer le pays dans la prochaine phase », poursuit M. Kassir. Il laissait ainsi entendre que le cabinet devrait organiser les législatives prévues en mai 2022 et pourrait être contraint à gérer une période de vacance présidentielle après la fin du mandat Aoun en octobre 2022.
commentaires (5)
Il y a Israel qui veuille sur le Liban le moindre faux pas par le Hezbollah ca sera Gaza ???
Eleni Caridopoulou
20 h 32, le 27 mai 2021