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Moyen-Orient - Focus

Par sa médiation, l’Égypte veut renouer avec son rôle historique

Le Caire est au cœur du jeu diplomatique, alors que les pays du Golfe qui ont normalisé leurs relations avec Israël sont dans l’embarras.

Par sa médiation, l’Égypte veut renouer avec son rôle historique

Des ambulances évacuant des blessés traversent le point de passage de Rafah vers l’Égypte pour y être traités, le 17 mai 2021. Saïd Khatib/AFP

L’Égypte cherche à renouer avec son rôle régional historique en offrant sa médiation dans le conflit en cours entre Israël et le Hamas, pendant que Washington fait profil bas dans les tractations internationales.

En 2014, Le Caire avait été à l’origine d’un cessez-le-feu après la guerre sanglante de plusieurs semaines entre l’État hébreu et le Hamas, mouvement islamiste au pouvoir dans la bande de Gaza, voisine de l’Égypte.

Dans cette nouvelle grande confrontation, entrée lundi dans sa seconde semaine, les bombardements israéliens sur l’enclave palestinienne et les tirs de roquettes de Gaza vers Israël ont tué au moins 230 personnes, en très grande majorité des Palestiniens.

Ce nouvel embrasement a ramené Le Caire au cœur du jeu diplomatique, alors qu’il a créé l’embarras parmi les pays arabes, notamment du Golfe, ayant récemment normalisé leurs relations avec l’État hébreu.

Hier, Le Caire a promis « 500 millions de dollars pour la reconstruction » à Gaza après les bombardements et des « entreprises égyptiennes pour mener les travaux ».

Les États-Unis, qui font jusque-là profil bas dans les tractations diplomatiques, ont demandé au Caire et à d’autres alliés arabes, dont Tunis et Doha, de s’investir pour obtenir un cessez-le-feu. « Dans une région où les “États de la normalisation” étendent leurs relations avec Israël, l’Égypte (...) a intérêt à utiliser sa proximité géographique avec Gaza comme levier diplomatique », affirme Tareq Baconi, expert du cercle de réflexion Crisis Group.

Le seul moyen

Lundi, le président Abdel Fattah al-Sissi a fait le point sur ces efforts de médiation avec son homologue français Emmanuel Macron lors d’une rencontre à l’Élysée.

Concrètement, une délégation égyptienne se trouve sur le terrain en Israël et dans les territoires palestiniens pour encourager un cessez-le-feu. « Composée de responsables du renseignement », elle s’y trouve « depuis plusieurs jours », dit Khaled Okasha, membre du Conseil supérieur égyptien pour l’antiterrorisme. M. Okasha, également directeur du Centre égyptien d’études stratégiques, un cercle de réflexion lié à l’État, se dit confiant sur l’issue de l’initiative.

Pour Michael Hanna, expert au cercle de réflexion new-yorkais Century Foundation, « l’Égypte doit être impliquée. Il n’y a pas d’autre moyen ».

Israël maintient un blocus maritime et terrestre sur Gaza depuis que le Hamas a pris le contrôle en 2007 de cette bande côtière où s’entassent quelque deux millions de personnes. Le point de passage frontalier de Rafah, à la frontière égyptienne, est sa seule ouverture sur le monde qui ne soit pas contrôlée par Israël.

Alors que les médias égyptiens avaient coutume de désigner l’enclave de « foyer terroriste », le président Sissi a ordonné la semaine dernière l’ouverture du terminal pour permettre à des blessés de Gaza d’être traités dans des hôpitaux égyptiens et pour faire passer de l’aide médicale.

« C’est une occasion de dire, pas seulement aux États-Unis, mais aussi aux autres pays de la région, que l’Égypte reste importante », avance M. Hanna, avant d’ajouter : « Un cessez-le-feu passera par Le Caire. » Selon lui, le soutien populaire aux Palestiniens en Égypte a encouragé Le Caire à adopter une ligne plus « ferme, plus franche », contre Israël, malgré le traité de paix de 1979. Dans un discours au Conseil de sécurité de l’ONU, le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Choukri a estimé, à l’adresse d’Israël, que des « concessions » devaient « être faites ».

Une dynamique étrange

Mais « c’est une dynamique étrange(...), les responsables militaires ont un manque de confiance profond envers Israël, mais, en même temps, ils collaborent avec eux », tempère M. Hanna.

M. Baconi se montre lui aussi nuancé, estimant que Le Caire n’a « pas suffisamment de poids sur Israël ». « La relation est une alliance dans laquelle Israël définit les contours stratégiques », dit-il.

Auteur d’un livre sur le Hamas, il juge aussi que l’Égypte cherche encore un juste équilibre entre une coordination en matière de renseignement avec le Hamas et son aversion pour les Frères musulmans, liés au mouvement palestinien maître de Gaza.

M. Sissi a été l’artisan, en tant que chef de l’armée, de la destitution en 2013 du président Mohammad Morsi, issu de la confrérie islamiste, avant de mener une répression impitoyable contre ses partisans. Reste qu’en 2021, selon M. Baconi, M. Sissi ne « voit pas nécessairement le Hamas sous le même jour ». « La stratégie (...) est similaire à celle d’Israël », résume-t-il : « S’assurer que Gaza ne prospère pas et que le Hamas reste contenu à l’intérieur. »

Farid FARID/AFP

L’Égypte cherche à renouer avec son rôle régional historique en offrant sa médiation dans le conflit en cours entre Israël et le Hamas, pendant que Washington fait profil bas dans les tractations internationales.En 2014, Le Caire avait été à l’origine d’un cessez-le-feu après la guerre sanglante de plusieurs semaines entre l’État hébreu et le Hamas, mouvement...

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