Le patriarche maronite Béchara Raï a proposé la neutralité pour le Liban. Une mise en application immédiate serait la neutralité au niveau du bras de fer opposant l’Arabie saoudite et le Golfe, d’un côté, et l’Iran, de l’autre.
Cela est une attitude conciliatrice et une grande concession accordée à l’autre partie, le Hezbollah et les aounistes, qui n’ont pas l’air de l’avoir appréciée à sa juste valeur.
En effet, nous avons plus de 500 000 Libanais qui vivent et travaillent en Arabie saoudite et dans le Golfe, et qui font vivre entre 1,5 et 2 millions de Libanais au Liban. Par ailleurs, le gros des 7 milliards de USD qui, en temps normal, nous parviennent de nos émigrés vient aussi de l’Arabie et du Golfe. De plus, le déficit de notre balance commerciale était compensé aussi par le tourisme. Le gros des dépenses touristiques était le fait des villégiateurs d’Arabie et du Golfe qui, non seulement dépensent bien plus qu’un touriste occidental, mais investissent aussi dans des villas et immeubles, et parfois dans des entreprises.
En contrepartie, quel intérêt avons-nous avec l’Iran ?
Non seulement rien de ce qui précède, mais nous subissons par contre des effets négatifs :
- Depuis qu’un de nos ministres des Affaires étrangères, M. Bassil, a soutenu le couple Syrie/Iran au sein de la Ligue arabe et dans les instances internationales, nous sommes boycottés par le Golfe avec comme résultat le déficit de notre balance des paiements depuis cinq ans.
- Auparavant, nous avions un excédent de la balance des paiements qui finissait dans les banques qui, elles, le prêtaient à l’État, compensant ainsi son déficit budgétaire. Ce n’était pas une situation idéale, mais cela maintenait un certain équilibre.- Nous subissons depuis cinq ans un double déficit, balance des paiements et budget, dont les résultats ont été pendant 3-4 ans cachés par l’utilisation des réserves de la Banque centrale. Maintenant que les réserves approchent de l’épuisement, c’est la monnaie nationale qui dégringole.
- Plus de 2 000 jeunes Libanais ont été tués en Syrie – chiffre avoué, mais sans doute plus élevé. Pour quelle cause ont-ils été tués ? Combien de jeunes Iraniens ont été se battre en Syrie ? Près de 2 000 victimes, sur une population chiite estimée à 1,6 million de personnes, cela donnerait par exemple en France, proportionnellement, plus de 80 000 morts. Quel gouvernement résisterait à un tel résultat ?
La neutralité est donc bel et bien une importante concession qui n’a pas été appréciée à sa juste valeur.
La conférence internationale
La partie qui nous fait face ne veut pas de cette conférence. Les décisions d’une telle conférence ne seront donc pas appliquées.
L’utilité pratique d’une telle conférence est plus que douteuse.
- Le Hezbollah prend ses ordres de l’Iran.
- Nous n’avons aucune chance d’imposer quoi que ce soit à l’Iran, quelles que soient les décisions de cette conférence.
- La négociation attendue va se dérouler entre les États-Unis et l’Iran. Le Liban n’est qu’une carte secondaire dans cette négociation.
Par contre, ce qui est faisable, c’est une action au Liban : essayer de faire pression sur les soutiens chrétiens du Hezbollah.
Les soutiens chrétiens du Hezbollah
Les soutiens chrétiens du Hezbollah, essentiellement les aounistes et, de façon marginale, les partisans de Sleiman Frangié, sont utilisés à l’étranger pour présenter le Hezbollah comme le défenseur des chrétiens, lesquels, sans ce soutien, seraient soumis à des persécutions ou à la marginalisation par la majorité musulmane. Le résultat est qu’une partie de l’opinion publique occidentale n’est pas hostile au Hezbollah, quand elle ne lui est pas favorable.
Ce qui précède tendrait à montrer qu’avant une conférence internationale, il serait utile de convoquer deux conférences locales :
- une conférence chrétienne ayant pour but d’officialiser le soutien chrétien aux positions du patriarche et de marginaliser les alliés chrétiens du Hezbollah ;
- une conférence regroupant les souverainistes de toutes les confessions pour officialiser la dimension multiconfessionnelle des positions du patriarche.
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