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Politique - Diplomatie

Une délégation du Hezbollah évoque avec Lavrov la "stabilité" au Liban

L'initiative Berry pour débloquer la crise gouvernementale serait tombée à l'eau.

Une délégation du Hezbollah évoque avec Lavrov la

Poignée de main entre le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov (d), et le député libanais Mohammad Raad, chef du groupe parlementaire du Hezbollah, le 15 mars 2021 à Moscou. Photo Russian Foreign Ministry/Handout via REUTERS

Le député libanais Mohammad Raad, chef du groupe parlementaire du Hezbollah, a été reçu lundi à Moscou par le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, avec qui il a évoqué la situation au Liban et les moyens de maintenir sa stabilité au moment où le pays est embourbé dans une grave crise socio-politico-économique et que des dérapages sécuritaires sont de plus en plus signalés à travers le territoire depuis la reprise de la contestation dans la rue.

"Réunion amicale"
"Nous avons évoqué les moyens de maintenir la stabilité au Liban et de renforcer les gains réalisés grâce à la lutte contre le terrorisme en Syrie et au Liban", a indiqué M. Raad, selon des propos rapportés par la chaîne al-Manar, affiliée au parti chiite. "La réunion était amicale et honnête et nous avons évoqué la situation au Liban et dans la région", a ajouté Mohammad Raad.
Le Hezbollah et la Russie combattent tous deux en Syrie aux côtés du régime du président syrien Bachar el-Assad. Le parti chiite libanais entretient toutefois une alliance plus étroite avec son parrain, l'Iran, qui lui aussi est militairement impliqué dans la guerre en Syrie aux côtés de Moscou et des forces et milices pro-régime. 

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Selon al-Manar, Mohammad Raad a également évoqué avec Sergueï Lavrov le dossier de la formation du gouvernement au Liban. L'élu a exprimé "l'attachement du Hezbollah à la nécessité d'accélérer la formation d'un cabinet qui reflète la volonté du peuple libanais", estimant que cette formation est la "clé de la stabilité et le début d'une solution aux crises".
Pour sa part, la diplomatie russe a souligné dans un communiqué que les discussions entre M. Lavrov et la délégation hezbollahie ont porté sur l'importance de "former le plus rapidement possible un gouvernement présidé par Saad Hariri, capable de sortir le Liban de sa crise". M. Lavrov a "réitéré le soutien constant de la Russie à la souveraineté du Liban et son unité, selon le communiqué. Il a souligné la nécessité de résoudre les dossiers conflictuels à travers un dialogue élargi interlibanais sans ingérence étrangère". Des propos qui pourraient être interprétés comme une réponse à l'appel du patriarche maronite Béchara Rai à une conférence internationale en faveur du Liban.

L'initiative Berry tombée à l'eau ?
Il y a quelques jours, le conseiller du président libanais Michel Aoun pour les affaires russes, Amal Abou Zeid, était lui aussi reçu à Moscou. Selon la presse, cette visite avait pour but d'obtenir un soutien russe au chef de l'Etat, qu'un bras de fer politique oppose au Premier ministre désigné, Saad Hariri, qui est censé former un nouveau cabinet depuis sa désignation le 22 octobre 2020, sans succès jusqu'à présent. Selon certains journaux, la Russie ne se serait toutefois pas montrée disposée à apporter son soutien au président Aoun, allié du Hezbollah, et à la formation que le chef de l'Etat a fondé, le Courant patriotique libre dirigé par le député Gebran Bassil. A contrario, lors d'un entretien mardi dernier à Abou Dhabi aux Emirats arabes unis avec Saad Hariri, Sergueï Lavrov avait exprimé une nouvelle fois le soutien de Moscou à l'initiative française pour une sortie de crise au Liban et s'est dit en faveur d'un gouvernement de "mission" composé de "technocrates".

M. Hariri dit vouloir former un gouvernement conformément à la feuille de route française, annoncée le 1er septembre à Beyrouth par le président Emmanuel Macron. Toutefois, il n'a toujours pas réussi à former son équipe, ne parvenant pas à se mettre d'accord avec le président Michel Aoun sur la forme du futur cabinet, la répartition des portefeuilles et la nomination des ministres. Les deux responsables ferraillent notamment sur la question de l'octroi du tiers de blocage au président et à la formation qu'il a créée, le Courant patriotique libre (CPL). C'est aussi autour du ministère de l’Intérieur que le bras-de-fer se poursuit entre les camps, aucune des deux parties ne souhaitant lâcher ce portefeuille stratégique à l’aune de trois consultations électorales prévues pour 2022 (municipales, législatives et présidentielle). La bataille se focalise également autour du portefeuille de la Justice, dont l’attribution dépend étroitement de celle de l’Intérieur. Pour tenter de résoudre la crise, Nabih Berry avait lancé une initiative auprès des différents protagonistes, suggérant qu'un gouvernement de 18 ministres soit formé, comme le souhaite Saad Hariri, et de proposer lui-même des ministrables pour les portefeuilles de l'Intérieur et de la Justice, afin qu'ils choisissent un nom qui leur convient à tous les deux. La proposition de M. Berry a été refusée par le chef de l'Etat qui insiste à nommer lui-même le futur ministre de l'Intérieur et à ce qu'un cabinet de 20 soit mis sur pied, rapporte notre correspondant politique Mounir Rabih. Le président du Parlement a alors tenté de convaincre M. Hariri d’élargir le cabinet à 20 ministres, surtout que Walid Joumblatt a récemment donné son accord à cette option, mais le Premier ministre a refusé et l'initiative Berry est tombée à l'eau, selon notre correspondant.

Entretien Jreissati-Boukhari
Le dossier gouvernemental a également été au menu de l'entretien qui a eu lieu vendredi entre l'ambassadeur de l'Arabie saoudite au Liban, Walid Boukhari, et Salim Jreissati, conseiller du chef de l'Etat. Selon notre correspondant politique, M. Jreissati a présenté au diplomate saoudien une proposition qui consiste à ce qu'un autre Premier ministre soit désigné pour former le cabinet, Saad Hariri étant dans l’incapacité de le faire, ajoutant que M. Aoun serait ouvert à tout candidat qui bénéficierait de l'appui de Riyad. Toujours d’après Mounir Rabih, Salim Jreissati n'a pas reçu de réponse de la part de M. Boukhari à cette "offre" qui intervient alors que les relations entre l'Arabie saoudite et Saad Hariri ne sont pas au beau fixe.

Ce dernier a reçu lundi en fin de soirée le chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, avec qui il a discuté des derniers développements politiques sur la scène locale. Plus tôt dans la journée, le leader druze avait dépêché l'ancien ministre Ghazi Aridi auprès de Nabih Berry. L'entretien entre MM. Aridi et Berry fait suite à une première rencontre entre les deux hommes, la semaine dernière, et à un entretien il y a quelques jours entre l'ancien ministre joumblattiste et Wafic Safa, haut responsable au sein du Hezbollah. Dans le cadre de ces contacts tous azimuts menés par le PSP, Walid Joumblatt a également reçu samedi soir à Clemenceau son rival druze Talal Arslane. Il y a une dizaine de jours, le leader druze s’était dit en faveur d'un cabinet de 20 ministres, dans une tentative d'aider pour un déblocage, créant la surprise surtout qu'il soutenait toujours auparavant la position de Saad Hariri. Une telle option permettrait d'incorporer à cette équipe un ministre relevant du camp de Talal Arslane, ainsi qu'un ministre grec-catholique, et octroierait le tiers de blocage aux aounistes et à leurs alliés, ce que rejette catégoriquement le Premier ministre désigné.

Dans des déclarations au site al-Modon lundi soir, M. Joumblatt a toutefois tenu à préciser que la seule option aujourd'hui sur la table est un cabinet de 18 ministres comme le propose Saad Hariri. "Nous sommes d'accord sur ce principe et nous ne pouvons pas parler d'un élargissement du cabinet". Et de souligner que le tiers de blocage ne devrait être obtenu par aucune des parties et qu'il s'agit là d'une constante. Il a rappelé, dans ce cadre, que la position de Nabih Berry et même celle du chef du Hezbollah Hassan Nasrallah vont dans le même sens. Le leader druze a écarté la possibilité d'une percée au niveau gouvernemental puisque chaque partie campe sur ses positions, ajoutant que son entretien avec Saad Hariri visait à poursuivre la coordination et à souligner l'importance de maintenir les contacts avec Nabih Berry afin de parvenir à une formule qui bénéficierait de l'appui de tous les protagonistes.

Pour mémoire

Que veut au juste Walid Joumblatt ?

Parallèlement au blocage politique, le Liban s'enfonce dans une crise financière inédite. Depuis quelques jours, notamment après que monnaie nationale a dépassé le seuil symbolique de 10.000 livres pour un dollar début mars, la rue est en ébullition et les manifestants coupent presque quotidiennement les routes à travers le pays. Plusieurs incidents sécuritaires ont dans ce cadre été signalés ces derniers jours, notamment dans la Montagne libanaise et dans la Békaa. Lundi, la livre libanaise continuait de dégringoler sur le marché parallèle, dépassant le seuil de 13.000 L.L. pour un dollar, selon plusieurs plateformes compilant les différents taux de change en vigueur.

Vaccin russe
Sur un autre plan, Mohammad Raad a indiqué, lors d'un entretien télévisé dont les propos ont été rapportés par le site el-Nashra, que les discussions avec M. Lavrov ont également porté sur le vaccin russe contre le coronavirus, Spoutnik V. Des doses de ce vaccin devraient être réceptionnées dans les prochaines semaines au Liban, alors que le pays a déjà importé d'autres doses du vaccin des laboratoires américains et allemand Pfizer-BioNTech, et doit recevoir aussi des lots des vaccins britannique AstraZeneca/Oxford et chinois Sinopharm.

Le député du Hezbollah a aussi évoqué la question des étudiants libanais présents en Russie, au moment où les jeunes Libanais qui se trouvent à l'étranger connaissent de grandes difficultés financières en raison des restrictions bancaires au Liban qui rendent difficiles tout transfert d'argent à ces étudiants.

Le député libanais Mohammad Raad, chef du groupe parlementaire du Hezbollah, a été reçu lundi à Moscou par le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, avec qui il a évoqué la situation au Liban et les moyens de maintenir sa stabilité au moment où le pays est embourbé dans une grave crise socio-politico-économique et que des dérapages sécuritaires sont de plus en plus signalés...

commentaires (6)

Le Hezbollah réclame "un cabinet qui reflète la volonté du peuple libanais" donc un cabinet dont lui, le Hezbollah serait exclu ? Car c'est bien là la :volonté du peuple libanais "!

Yves Prevost

23 h 46, le 15 mars 2021

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Commentaires (6)

  • Le Hezbollah réclame "un cabinet qui reflète la volonté du peuple libanais" donc un cabinet dont lui, le Hezbollah serait exclu ? Car c'est bien là la :volonté du peuple libanais "!

    Yves Prevost

    23 h 46, le 15 mars 2021

  • L,INSTABILITE DISCUTE DE STABILITE. QUELLE MASCARADE. ET LES RUSSES QUI S,ABAISSENT A EN DISCUTER AVEC EUX.

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 29, le 15 mars 2021

  • "... Salim Jreissati, conseiller du chef de l'Etat, a proposé au diplomate saoudien qu'un autre Premier ministre soit désigné pour former le cabinet ..." - Pardon? Le chef de l’état libanais propose un changement du premier ministre libanais à un diplomate ... saoudien? Vraiment?

    Gros Gnon

    18 h 54, le 15 mars 2021

  • Ils sont allés pour faire face à la sévérité de l'administration Biden, qui vis à vis de l'Iran et de leur parti adopte des mesures plus sévères que du temps de Trump. Tout le Liban va endurer de ces mesures déclarées depuis une semaine, qui, entre autres, arrêtent toute aide à l'armée libanaise, et considèrent  tout  dépendant de l'autorité du parti, et précisant que les terrains de la région de Chebaa, non libanaises, et devant rester sous occupation israélienne. Aucune aide ne sera à l'ordre du jour.

    Esber

    18 h 37, le 15 mars 2021

  • Stabilité du Liban, ou immobilisme mortifiere? Guerre froide enrobée politique ou bien terreur mafieuse??

    LeRougeEtLeNoir

    17 h 38, le 15 mars 2021

  • Une réunion amicale entre des mercenaires et un Etat mensonge pour maintenir la "stabilité" du Liban !... Veulent-ils stabiliser le pays dans la faillite de l'Etat, l'anéantissement du peuple et l'effondrement économique ? Qu'ils ne se fatiguent pas, c'est déjà fait. Ce que veulent les Libanais c'est un redressement de leur pays, et ce ne sont certainement pas ces deux fossoyeurs qui s'en chargeront. Toutes les actions menées par les protagonistes mentionnés dans cet article vont à l'encontre de ce qui doit être fait.

    Robert Malek

    17 h 21, le 15 mars 2021

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