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Idées - Point de vue

Il est temps de parler de la ligne bleue

Le marquage des parties restantes de la frontière technique aidera à éviter les provocations accidentelles qui pourraient dégénérer en conflit, estime le commandant en chef de la Finul.

Il est temps de parler de la ligne bleue

Le général Stefano Del Col.Photo DR

La ligne bleue, qui s’étend sur 120 km tout le long de la frontière sud du Liban, est la clé de la paix dans la région. Ce n’est pas une frontière au vrai sens du terme, mais une « ligne de retrait ». Elle a été établie par les Nations unies en 2000 dans le but pratique de confirmer le retrait des forces israéliennes du sud du Liban. Elle ne préjuge pas des futurs accords frontaliers entre ces deux États membres de l’ONU.

La ligne bleue a toujours été temporaire et les soldats de la paix de la Finul en sont les gardiens provisoires. À chaque fois que les autorités israéliennes ou libanaises souhaitent entreprendre des activités à proximité de cette ligne, telles que des travaux d’entretien ou des activités de sécurité, la Finul leur demande qu’elles lui fournissent un préavis. Cela permet à la force internationale de tenir les autorités de toutes les parties informées, afin de minimiser les risques de malentendus qui pourraient conduire à des tensions accrues.

En fin de compte, il appartient à Israël et au Liban de déterminer le tracé exact d’une future frontière. Entre-temps, la Finul s’efforce de maintenir le calme et la stabilité le long de cette frontière fragile et d’éviter les provocations et les incidents inutiles qui peuvent conduire à une crise et, éventuellement, à un conflit. La ligne bleue doit être respectée dans son intégralité par les parties concernées. Tout franchissement de ce tracé, des deux côtés de la frontière, constitue une violation de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies et, en tant que Finul, nous traitons toutes les violations de la même manière.

La ligne bleue a été déterminée sur base de diverses cartes historiques, certaines remontant à près de 100 ans. Le tracé que l’ONU a tiré en se fondant sur ces cartes n’est pas forcément aussi clair sur le terrain. Après la guerre de 2006, la ligne bleue est devenue l’un des éléments centraux de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies et depuis 2007, la Finul a travaillé avec les parties concernées pour installer des marqueurs visuels – nos fameux

« barils bleus » – montrant le tracé précis de la ligne bleue. Chacun des 268 barils bleus qui marquent actuellement la ligne n’a été placé qu’après une vérification complexe du terrain et l’accord des deux parties. Grâce aux actions de bons offices et aux mécanismes de liaison et de coordination de la Finul, la ligne bleue est l’une des rares pistes dans lesquelles les parties ont continué à s’engager. Chacun des barils bleus représente un consensus soigneusement négocié sur lequel la stabilité actuelle dans la région a été construite. Pourtant, la moitié de la longueur de la ligne bleue reste aujourd’hui non marquée sur le terrain.

Bien qu’une grande partie du territoire soit accidentée, elle n’est pas déserte. Du côté libanais en particulier, les agriculteurs et les villageois mènent des activités dans son périmètre, et parfois de l’autre côté de la ligne bleue. En raison du manque de marques visuelles à certains endroits, les personnes et les animaux peuvent franchir d’un côté à l’autre sans nécessairement s’en rendre compte. Chaque franchissement, même involontaire, constitue toutefois une violation de la résolution 1701, que la Finul enregistre dûment et rapporte au Conseil de sécurité.

Cependant, toutes les violations de la ligne bleue ne sont pas accidentelles. Certaines, comme l’occupation continue par Israël de la moitié nord du village de Ghajar, sont bien connues et se poursuivent. D’autres sont moins prévisibles, et même hostiles. Toute action unilatérale menée par les parties devient une source de tension considérable.

Au cours des quatorze dernières années, grâce à l’attitude raisonnable des parties concernées et à leur attachement à la stabilité, de nombreux incidents ont été rapidement résolus. Plusieurs autres ont sans aucun doute été évités grâce au marquage clair de la ligne bleue.

Mais la paix est fragile. Bien que nous ayons maintenant un calme relatif, celui-ci peut se briser en un instant, comme les gens vivant le long de la ligne bleue le savent trop bien. Les raisons fondamentales du conflit n’ont pas disparu. Un jour, une simple erreur à un moment tendu pourrait provoquer l’éclatement de cette situation précaire et mettre un terme à l’actuelle stabilité fragile, pour laquelle nous avons tous travaillé dur. Les conséquences possibles d’une telle erreur nous tiennent éveillés la nuit, mes nombreux collègues du maintien de la paix et moi-même.

Les erreurs peuvent être évitées en respectant la ligne bleue dans son intégralité. Le marquage des parties restantes aidera à éviter les provocations accidentelles et inutiles qui pourraient dégénérer en conflit, ce qui pourrait à son tour causer d’immenses souffrances humaines. Il est indéniablement dans l’intérêt de tous d’avancer dans ce domaine. Les deux parties ont mis de côté leurs différences très réelles pour s’engager de manière constructive dans le marquage de certaines parties de la ligne bleue dans le passé. Nous devons maintenant terminer le travail. Nous devons nous engager de nouveau sur cette question et tirer parti du succès passé et du récent accord-cadre signé par les parties.

Pour le faire, il faudra une volonté politique. Il faudra aussi du courage. Je sais que les deux parties en ont. C’est le moment d’agir et la Finul est prête à apporter son aide.

* Stefano Del Col est général de division, chef de mission et commandant de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul).

La ligne bleue, qui s’étend sur 120 km tout le long de la frontière sud du Liban, est la clé de la paix dans la région. Ce n’est pas une frontière au vrai sens du terme, mais une « ligne de retrait ». Elle a été établie par les Nations unies en 2000 dans le but pratique de confirmer le retrait des forces israéliennes du sud du Liban. Elle ne préjuge pas des futurs accords...

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