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Utile parallèle

C’est en février 1969 qu’est sorti en France l’un des plus grands films (politiques) de Costa-Gavras, Z (initiale d’un mot grec ancien signifiant « il est vivant »). Le synopsis est basé, ou plutôt calqué, sur une histoire vraie survenue en Grèce en 1963 : l’assassinat à Thessalonique d’un député de gauche, commandité par la haute hiérarchie de l’appareil sécuritaire grec qui avait avancé la thèse officielle d’un « regrettable accident » pour camoufler le meurtre. L’enquête est confiée à un jeune juge d’instruction qui ne soutient pas outre mesure la ligne politique du député assassiné, mais dont l’intégrité et la probité l’amènent à dévoiler la vérité et à inculper, contre vents et marées, des hauts gradés et des responsables officiels.

Le film, qui a remporté en 1970 deux Oscars et un Golden Globe ainsi que (en 1969) le prix du jury du Festival de Cannes accordé à Costa-Gavras et le prix d’interprétation masculine pour le légendaire Jean-Louis Trintignant, aborde sans détours le problème épineux des rapports entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir en place, dans ses deux volets politique et sécuritaire.

Le film avait enregistré un grand succès au Liban en 1970, au début du mandat du président Sleiman Frangié qui avait tenu à faciliter sa sortie dans les salles de Beyrouth pour bien marquer la fin d’une époque, celle de l’immixtion de certains services dans les méandres de la vie politicienne locale.

Le thème abordé par le grand réalisateur grec est, à l’évidence, quelque peu dépassé aujourd’hui au niveau des pays occidentaux, mais il est d’une actualité brûlante pour ce qui a trait à la situation présente au Liban. On l’aura compris : le parallèle est frappant avec l’affaire de l’explosion apocalyptique du 4 août et le sort réservé au juge d’instruction Fady Sawan qui a été dessaisi du dossier pour avoir eu l’audace, selon l’opposition, d’inculper « pour négligence dans l’exercice de leurs fonctions » le Premier ministre sortant et trois anciens ministres bien introduits. La grande question qui se pose aujourd’hui est de savoir si le nouveau juge d’instruction sera en mesure d’aller de l’avant sur la voie tracée par son prédécesseur et s’il fera preuve de suffisamment de détermination pour dévoiler la vérité, toute la vérité, dans cette affaire, ou si, au contraire, l’enquête sur la double explosion au port finira dans les oubliettes, à l’instar de la plupart des assassinats politiques dont le Liban a été le théâtre ces dernières décennies.

L’instruction judiciaire en cours constitue, il faut bien le reconnaître, une véritable « mission impossible », car l’enjeu est à la mesure de la gigantesque dimension du drame national survenu le 4 août : il s’agit de réclamer des comptes non seulement à « tous » les responsables, dans les plus hautes sphères du pouvoir, qui savaient mais qui n’ont rien fait, mais surtout – et c’est là que risque de se situer le blocage, le point d’orgue – à la force de facto (en l’occurrence le Hezbollah) qui contrôlait le port au niveau sécuritaire, qui « gérait » le funeste hangar numéro 12 et le considérait comme une ligne rouge, une chasse gardée qu’aucune autorité officielle ne devait violer. Sans compter la responsabilité au-delà des frontières au cas où la thèse, très probable, d’une intervention extérieure se confirmait (si tant est qu’elle le puisse)…

Dans le contexte local, régional et international actuel, demander à un seul homme de relever un tel défi peut paraître une chimère, si la démarche est solitaire et ne s’appuie pas sur un ensemble de facteurs et d’acteurs qui constitueraient autant de garanties permettant de mener l’enquête jusqu’au bout. Dans le cas bien précis de la double explosion au port, le jeu en vaut la chandelle car il ne porte pas uniquement sur une simple lutte interne pour le pouvoir, comme dans les faits rapportés dans le film de Costa-Gavras, mais il revêt un caractère sociétal et profondément existentiel, dans toute l’acception du terme.

À travers la responsabilité du Hezbollah dans la tragédie du 4 août, ce qui est au fond véritablement en jeu aujourd’hui dans cette enquête, c’est rien moins que la ligne de conduite du parti pro-iranien et son impact sur l’identité socio-culturelle du Liban, son image, sa vocation dans cette partie du monde, c’est un mode de vie, un système de société, la place de l’individu dans cette société. Le « numéro deux » et idéologue du Hezbollah, le cheikh Naïm Kassem, a été très explicite sur ce plan il y a quelques jours en déclarant que la solution au Liban réside dans « l’intégration au sein du camp de la résistance, sous l’égide de la République islamique iranienne », ce qui sape à la base toute notion d’État souverain et rassembleur.

Face au réel danger existentiel qui plane ainsi sur le pays, le manque de courage ne saurait être de mise, notamment de la part de la magistrature, appelée à jouer un rôle primordial en la matière. Et en parallèle, l’on ne peut s’empêcher de déplorer, par la même occasion, que face à une telle menace, certains au sein du camp souverainiste n’aient pas de scrupules à faire prévaloir des calculs partisans, une vision réductrice et des ego dans leur approche de la tragédie à laquelle ne cessent d’être confrontés les Libanais.

C’est en février 1969 qu’est sorti en France l’un des plus grands films (politiques) de Costa-Gavras, Z (initiale d’un mot grec ancien signifiant « il est vivant »). Le synopsis est basé, ou plutôt calqué, sur une histoire vraie survenue en Grèce en 1963 : l’assassinat à Thessalonique d’un député de gauche, commandité par la haute hiérarchie de l’appareil...

commentaires (8)

Vous écrivez :(en l’occurrence le Hezbollah) qui contrôlait le port au niveau sécuritaire, qui « gérait » le funeste hangar numéro 12 et le considérait comme une ligne rouge, une chasse gardée qu’aucune autorité officielle ne devait violer. Cette déclaration a été faite par le juge Fady Sawan ? Par le Jédid ? Par MTV ? Par OSS17 ? Ou OO7 à l’anglaise ?2013 à 2020, c'est bien la clique de l’INUTILE /l’ENDORMIE (dans ce cas) qui est au pouvoir !! M. Diab est le tout dernier dans la queue.

aliosha

12 h 51, le 27 février 2021

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Commentaires (8)

  • Vous écrivez :(en l’occurrence le Hezbollah) qui contrôlait le port au niveau sécuritaire, qui « gérait » le funeste hangar numéro 12 et le considérait comme une ligne rouge, une chasse gardée qu’aucune autorité officielle ne devait violer. Cette déclaration a été faite par le juge Fady Sawan ? Par le Jédid ? Par MTV ? Par OSS17 ? Ou OO7 à l’anglaise ?2013 à 2020, c'est bien la clique de l’INUTILE /l’ENDORMIE (dans ce cas) qui est au pouvoir !! M. Diab est le tout dernier dans la queue.

    aliosha

    12 h 51, le 27 février 2021

  • En parlant de cinéma, il faudrait aussi se souvenir du film “ I comme Icare”, avec son épilogue entièrement différent

    Georges El-Kehdy

    16 h 30, le 26 février 2021

  • Lors de son retour de France en 2005, Michel Aoun a déclaré du haut de la passerelle de l'avion ceci : "le Général de Gaulle est venu de Londres pour libérer la France. Moi je viens de Paris pour libérer le Liban". Depuis quatre ans nous voyons les résultats de la libération de notre pays du fait même que Michel Aoun est devenu chef de l'Etat.....

    Un Libanais

    18 h 18, le 23 février 2021

  • Le camp souveraie avez-vous ditM.Toula Lequel au juste ? Ah oui !! i celui qui se limite à condamner le Hezbollah..quelqu'ils soient... Corrompus , responsables de détournement de fonds publics, de fuites des capitaux et j'en passe .

    Hitti arlette

    16 h 20, le 23 février 2021

  • Il est indispensable de rendre justice, et aux victimes de la double explosion au port, et aux proches de Joe Bejjani, et de Lockman Slim, pour briser le cercle vicieux de la violence et de l’assassinat et de l’insécurité. Je suis bref, et mon commentaire de lecteur n’a aucune incidence, aucune importance. Disons, que nous ne sommes pas en démocratie, dans Etat de droit, mais nous vivons une guerre sans nom depuis la fin des années 60, une dictature en quelque sorte de la loi de la jungle, et de l’omerta. On n’est forcément d’accord entre nous, et comment l’être, une fois la vérité établie. Alors que fait alors la presse locale, la presse sérieuse pour mener son enquête, et établir la "vérité journalistique", quand la "vérité judiciaire" est tellement difficile à établir ? Mais c’est presque impossible dans un pays aux chefs de guerre convertis à la "démocratie". Tout est laissé au hasard des interprétations, et avec le temps qui passe, Dieu seul sait ce qui va nous arriver, quand "Dieu écrit droit par lignes courbes".

    L'ARCHIPEL LIBANAIS

    16 h 09, le 23 février 2021

  • J’ai été censurée parce que je suis allée trop loin dans mes accusations ou plus justement, je suis allée au plus urgent qui est de condamner en premier, le chef de la république qui n’a pas fait son devoir d’alerter les autorités internationales concernées par ce problème qui le dépassait puisqu’il a été élu et payé pour ça, veiller à la sécurité des citoyens. Au lieu d’attendre que la catastrophe ait lieu pour parler de mains liées ou pire d’accident malencontreux. Lorsqu’on est acculé on crie au secours et si on est pas entendu, on hurle pour que le monde nous entende et réponde à notre demande de sauver un peuple et un pays menacer de mort au lieu de céder et se soumettre. Mais ça c’est un président digne de ce nom qui l’aurait fait pas un intéressé par le pouvoir et l’argent et qui a ce prix permet de perpétuer de son pays et de son peuple. Allez l’OLJ censurez, je l’aurais au moins dénoncé pour libérer ma conscience.

    Sissi zayyat

    15 h 18, le 23 février 2021

  • LE JUGE GREC FUT ELU APRES PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE. LA DIFFERENCE ENTRE LE JUGE GREC ET LE JUGE SAWAN OU TOUT AUTRE JUGE LIBANAIS C,EST QUE LE GREC S,EST ATTAQUE ET A CONDAMNE LES TETES QUI ONT DONNE L,ORDRE D,ASSASSINAT ET NON SEULEMENT LES EXECUTEURS. CHEZ NOUS PERSONNE N,OSERA NOMMER LE PROPRIETAIRE DU NITRATE ET A PLUS FORTE RAISON SON UTILISATEUR. ON NE POURSUIT PAS LA OU LES TETES MAIS LA QUEUE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 43, le 23 février 2021

  • Tout est bien dit. Le juge Bitar a du pain sur la planche et il sera etroitement surveille’ par nos politiciens voleurs mais aussi assassins. Il devra faire preuve d’un courage exceptionnel , surtout que, comme vous le dites, la plus haute instance officielle de l’Etat regarde ailleurs ! Esperons qu’un miracle permettra de devoiler les dessous criminels de cette catastrophe nationale, qui a aucun moment n’a e’mu nos ‘‘responsables’’ corrompus!

    Goraieb Nada

    10 h 02, le 23 février 2021

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