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Économie - Décryptage

Les banques à l’aube d’un déconfinement bouillant

L’Association des banques a émis plusieurs recommandations au cours du week-end concernant le traitement de certaines opérations.

Les banques à l’aube d’un déconfinement bouillant

L’affluence dans les banques a généralement été forte après chaque période de fermeture prolongée. Photo P.H.B.

En service minimum depuis mi-janvier, point de départ du confinement strict décrété par les autorités pour lutter contre la propagation du coronavirus, les banques libanaises ont été autorisées à rouvrir à partir d’aujourd’hui dans le cadre d’un assouplissement progressif qui devrait s’étaler sur plusieurs phases. Les agences bancaires vont ainsi pouvoir accueillir des clients dans un premier temps entre 9h et 15h, mais ne pourront fonctionner qu’à 20 % de leurs capacités, au cours de ce premier mouvement qui doit s’étendre jusqu’au 22 février.

Les autorités ayant maintenu le couvre-feu, les personnes qui doivent se rendre à la banque et qui n’entrent pas dans la catégorie de celles pouvant circuler librement devront toutefois continuer de remplir des attestations de déplacement via les plates-formes en ligne dédiées. Un pare-feu qui ne suffira peut-être pas à limiter la probabilité que les banques soient prises d’assaut par des clients pressés d’effectuer des transactions reportées depuis plus de trois semaines, dans un contexte de grave crise économique et financière et de dépréciation de la livre.

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Sur internet et dans les groupes de messagerie instantanée, certaines associations représentant des déposants libanais, qui s’étaient formées en réaction aux restrictions illégales mises en place depuis fin 2019, ont appelé à la mobilisation. Cela a, notamment, été le cas de l’organisation Cri des déposants ainsi que de l’Association des déposants libanais. D’autres, comme la Ligue des déposants contactée par L’Orient-Le Jour, ont préféré éviter ce type de démarche dans l’immédiat, eu égard au risque sanitaire.

Au-delà des actions que les organisations militantes pourraient mettre en œuvre, dans un climat de défiance sociale cristallisée par les récentes manifestations à Beyrouth et Tripoli en dépit du confinement strict, il est en tout état de cause très possible que de nombreux Libanais aient besoin de se rendre à leur banque après une période de fermeture aussi longue, comme cela s’est vu à plusieurs reprises en un an et demi de crise.

Dollars frais qui ne le sont plus

Il reste que le risque d’une trop forte affluence ne semble pas vraiment préoccuper l’Association des banques (ABL), qui n’y a pas fait une seule fois référence dans son dernier communiqué publié samedi. Signé par son secrétaire général, Makram Sader, le texte est plutôt revenu sur les modalités d’exécution de certaines opérations bancaires, afin de « clarifier » certains points soulevés par les associations représentant les déposants du pays.

L’ABL a, en premier lieu, appelé les banques à faire preuve de « flexibilité » avec les clients mécontents en évitant notamment de clôturer leurs comptes trop rapidement. « Cette directive s’adresse spécifiquement aux banques qui sont tentées de se débarrasser de clients compliqués ou peu rentables à moindres frais, en leur rendant leur argent sous forme de chèque bancaire – lequel ne peut être déposé ailleurs que dans une autre banque libanaise », explique un banquier sous couvert d’anonymat. Il cite notamment le cas des enseignes qui cherchent à se débarrasser de dépôts en devises qu’elles ne peuvent honorer, faute de liquidités suffisantes en dollars, voire en livres, ou encore de frais de gestion de cartes bancaires qui leur sont facturés par les prestataires dédiés en « dollars frais ».

L’organisation a ensuite rappelé aux banques qu’elles ne devaient pas limiter l’accès des déposants à leurs comptes en dollars frais, qui peuvent donc être librement retirés en espèces ou transférés à l’étranger sans autres frais que les « commissions bancaires reconnues ». Une recommandation qui a fait bondir la Ligue des déposants qui a réagi le même jour dans un communiqué relayé par plusieurs médias. La Ligue a une nouvelle fois dénoncé le concept même d’argent frais, défini par l’ABL en novembre 2019 et reconnu par la Banque du Liban via la circulaire n°150 du 9 avril 2020, considérant que les banques ne pouvaient pas arbitrairement discriminer entre les dollars en fonction de leur capacité à honorer leurs engagements.Ce concept établit une distinction inédite entre les anciens dépôts en devises (dollars libanais ou lollars) constitués avant la crise et que les banques n’ont plus voulu ou pu honorer, faute de liquidités suffisantes, avec les nouveaux fonds déposés en espèces ou transférés depuis l’étranger, et que la banque ne fait que consigner. Les dollars ne peuvent être retirés qu’en livres à un taux fixé par la BDL à environ 3 900 livres pour un dollar, identique à celui qu’elle impose aux agents de change via l’application Sayrafa.

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Or pour la Ligue des déposants, cette distinction, tout comme la mise en place de commissions spécifiques aux fonds frais (la majorité des établissements retiennent entre 5 et 7 pour 1 000 des fonds retenus, sans compter les autres frais bancaires normaux) n’est qu’un moyen de dissimuler la captation illicite de l’argent des déposants par leurs banques. La Ligue accuse également certains établissements de flouer les déposants en décrétant arbitrairement, au bout d’un certain temps, que leurs dollars frais ne le sont plus.

Rien sur les prêts au logement

S’agissant enfin du remboursement des prêts en dollars, l’ABL effectue une distinction entre les crédits à la consommation – pour lesquels les banques doivent accepter les remboursements en livres « au taux de change auquel les banques traitent avec la BDL », soit le taux officiel, qui est toujours fixé à 1507,5 livres ; et les « autres prêts » que les emprunteurs devront rembourser soit en dollars, soit en livres à un taux permettant de « reconstituer leur valeur en achetant son équivalent à la Banque centrale ».

Une formule très floue qui peut être résumée ainsi : à part les crédits à la consommation, les remboursements de prêts en devises devront se faire de manière à ce que la valeur des remboursements se rapproche le plus possible de leur valeur réelle, soit en exigeant le remboursement en dollars, soit en livres à un taux plus proche du marché. Cette distinction avait été accordée par la BDL via la circulaire n°568 adoptée fin août. Selon ce dernier texte, la mesure s’adresse uniquement aux personnes physiques résidant au Liban et qui n’ont pas de compte en devises dans l’établissement où ils ont contracté le prêt – qui doit être personnel et inférieur à 100 000 dollars. La même circulaire exclut enfin les « crédits pour le secteur commercial » qui doivent être remboursés dans la monnaie dans laquelle ils ont été contractés. Les prêts immobiliers de moins de 800 000 dollars entrent également dans la catégorie des prêts personnels remboursables en livres, selon le même texte.

La Ligue des déposants a, elle, souligné l’illégalité de la distinction faite entre les différents types de prêts au regard du Code de la monnaie et du crédit, ainsi que l’impact désastreux de cette distinction sur la confiance déjà moribonde vis-à-vis de la monnaie nationale. Elle trouve en outre dommage que l’ABL n’explicite pas exhaustivement dans son communiqué la méthode à suivre pour le remboursement des prêts au logement. En octobre, la Ligue des déposants avait par ailleurs demandé aux banques d’arrêter de collecter des commissions sur les remboursements des prêts octroyés en dollars et payés en livres.

Ce n’est pas la première fois que l’ABL profite d’une période de fermeture prolongée des banques pour rappeler ou émettre des règles qui contreviennent à des points essentiels de la règlementation bancaire. Mi-novembre 2019, l’association avait en effet édicté les principales restrictions bancaires qui allaient être mises en place jusqu’à aujourd’hui, après avoir fermé ses portes presque un mois dans le sillage du début de la contestation du 17 octobre. En mars, les banques avaient profité du lancement du premier confinement pour suspendre totalement les retraits en dollars depuis les comptes en livres ou ceux en dollars libanais, que ce soit au guichet ou via les distributeurs automatiques de billets.

Pour rappel, la majorité des restrictions adoptées par le secteur sont illégales, tant que le Parlement ne les a pas entérinées. Leur mise en œuvre n’a pas toutefois empêché que plusieurs milliards de dollars sortent du pays. En juillet dernier, l’ancien directeur général du ministère des Finances, Alain Bifani, avait affirmé que six milliards de dollars avaient été exfiltrés du secteur bancaire malgré les restrictions.



En service minimum depuis mi-janvier, point de départ du confinement strict décrété par les autorités pour lutter contre la propagation du coronavirus, les banques libanaises ont été autorisées à rouvrir à partir d’aujourd’hui dans le cadre d’un assouplissement progressif qui devrait s’étaler sur plusieurs phases. Les agences bancaires vont ainsi pouvoir accueillir des clients...

commentaires (2)

La population mondiale déprime du fait de ne pas voir le bout du tunnel et parce qu’ils sont empêchés de faire des projets à long terme puisqu’ils subissent les ravages de ce virus malin depuis plus d’un an. Que dire alors des libanais qui vivent cette situation on ne peut plus angoissante et désastreuse depuis plus de trente ans et qui sont privés de tout espoir et vivent dans le seul but de pouvoir survivre jusqu’au lendemain sans être rançonnés, humiliés, pourchassés et tués même chez eux . En bonus ils ont le virus COVID qui vient s’ajouter au leur, local celui-ci mais encore plus vicieux et dangereux, auquel personne ne trouve de vaccin qui est la corruption et la malhonnêteté de leurs politichiens qui détiennent des force le pouvoir et tiennent en otage le pays et les détruisent aussi bien physiquement que moralement juste pour pouvoir garder leurs postes et piller le pays. Le monde pourra respirer une fois vacciné alors que les libanais continueront à avoir le souffle coupé et à subir les ravages de leur virus si d’eux mêmes ils ne trouvent pas le remède pour l’éradiquer.

Sissi zayyat

15 h 44, le 08 février 2021

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Commentaires (2)

  • La population mondiale déprime du fait de ne pas voir le bout du tunnel et parce qu’ils sont empêchés de faire des projets à long terme puisqu’ils subissent les ravages de ce virus malin depuis plus d’un an. Que dire alors des libanais qui vivent cette situation on ne peut plus angoissante et désastreuse depuis plus de trente ans et qui sont privés de tout espoir et vivent dans le seul but de pouvoir survivre jusqu’au lendemain sans être rançonnés, humiliés, pourchassés et tués même chez eux . En bonus ils ont le virus COVID qui vient s’ajouter au leur, local celui-ci mais encore plus vicieux et dangereux, auquel personne ne trouve de vaccin qui est la corruption et la malhonnêteté de leurs politichiens qui détiennent des force le pouvoir et tiennent en otage le pays et les détruisent aussi bien physiquement que moralement juste pour pouvoir garder leurs postes et piller le pays. Le monde pourra respirer une fois vacciné alors que les libanais continueront à avoir le souffle coupé et à subir les ravages de leur virus si d’eux mêmes ils ne trouvent pas le remède pour l’éradiquer.

    Sissi zayyat

    15 h 44, le 08 février 2021

  • Que faire. Les déposants sont menés comme des esclaves des institutions politiques, gouvernementales, et banquéres, qui en fait ne sont que différents noms pour les memes intérêts. Des mouvements pacifiques ont été formés, ainsi que des soulèvements. On connait les résultats. Est ce les forces armées vont agir, ou ils veulent laisser cette initiative au peuple libanais? Et ci c'est le cas quel côté ils prendront, vont ils fusillier les libanais qui n'ont plus de solution que prendre les armes pour acquérir ce qui leur revient? Une meilleur solution, celle de notre Patriarche pour aider/ proteger ce peuple qui ne peut se gérer. Mais est ce qu'il vont s'embourbé dans ce milieu complexe et étrange ?

    Joseph Bouchi

    11 h 27, le 08 février 2021

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