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Moyen-Orient - Irak

Kazimi riposte face aux derniers attentats-suicides

Le Premier ministre irakien limoge plusieurs hauts responsables de sécurité et de l’armée.

Kazimi riposte face aux derniers attentats-suicides

La rue commerçante au cœur de Bagdad où un double attentat-suicide a eu lieu, le 21 janvier 2021. Sabah Arar/AFP

C’est une attaque à laquelle les Irakiens n’étaient plus habitués depuis maintenant trois ans. Trente-deux personnes ont été tuées jeudi et plus d’une centaine ont été blessées au cours d’un double attentat-suicide mené sur un marché du centre de Bagdad. Selon le ministre de l’Intérieur, le premier kamikaze a feint d’être malade pour attirer la foule avant de déclencher ses explosifs, tandis que le second a attendu qu’un attroupement se forme autour des victimes pour passer à l’action, provoquant le bilan le plus meurtrier que connaît la capitale irakienne depuis le dernier attentat-suicide de janvier 2018, revendiqué par le groupe État islamique. Dans la nuit de jeudi à vendredi, le groupe terroriste devait d’ailleurs revendiquer la double explosion. « Les deux explosions terroristes (...) confirment l’effort des groupes obscurs pour cibler les grands besoins nationaux et les aspirations de notre peuple à un avenir pacifique. Nous nous opposons fermement à ces tentatives malveillantes de déstabilisation de notre pays », a dénoncé sur son compte Twitter le président irakien Barham Saleh.

Alors que l’Irak a annoncé en décembre 2017 la défaite territoriale de l’EI, les attaques commises par le groupe terroriste se sont fait rares, en particulier dans les grandes villes éloignées des cellules de jihadistes qui se cacheraient dans le nord-ouest du pays. Mais ce double attentat semble être la preuve que des failles au sein de l’appareil sécuritaire irakien persistent. « La rareté des attaques de l’EI dans les villes est le reflet d’un effort actif soutenu par les États-Unis pour tuer les dirigeants du groupe terroriste et exposer leurs bases rurales (à partir desquelles ces attaques sont lancées) », observe à L’Orient-Le Jour Michael Knights, expert de l’Irak au sein du Washington Institute for Near East Policy.

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« L’effondrement de l’État islamique a fait qu’il leur est plus difficile de lancer des opérations dans les villes. Si l’EI déploie davantage d’efforts pour frapper les villes, comme il l’a fait ici, il réussira à plusieurs occasions. C’est presque inévitable », ajoute-t-il. Le manque d’efficacité des forces de sécurité irakiennes proviendrait également du contexte, peu favorable au soutien de la coalition. « Au cours des dernières années, l’Irak a travaillé en étroite collaboration avec la coalition, qui apporte au pays une aide importante en termes de surveillance technique. À cause de la pandémie du Covid-19 et de la détérioration de la relation politique avec l’Iran, on observe une réduction du soutien de la coalition. Les Irakiens n’ont pas les mêmes capacités de surveillance », commente pour sa part Jack Watling, chercheur au Royal United Services Institute de Londres. Dans un communiqué publié juste après l’attaque, le porte-parole de l’armée irakienne, Yehia Rassoul, a déclaré que les auteurs de cette opération ont fait détoner les explosifs alors qu’ils étaient poursuivis par les forces de sécurité. Or si les forces de sécurité irakiennes disposaient d’informations selon lesquelles une attaque était en cours, aucune force de sécurité en uniforme n’a été aperçue dans les images de vidéosurveillance montrant la première explosion.

Remaniements

Face à la gravité de l’attaque, le Premier ministre Moustafa Kazimi semble avoir pris le problème à bras-le-corps. Il a immédiatement convoqué une réunion du Conseil ministériel pour la sécurité nationale au cours de laquelle le remplacement de plusieurs responsables au sein du commandement militaire et de sécurité sur le terrain a été décidé, sans aller dans les détails. Le Premier ministre a cependant surpris ses adversaires en annonçant une série de remaniements visant cinq hauts responsables de la sécurité et de l’armée, parmi lesquels le vice-ministre de l’Intérieur pour les affaires de renseignements, le commandant de la police fédérale et le directeur général du renseignement et de la lutte contre le terrorisme au ministère de l’Intérieur, trois personnalités proches des factions politiques et armées chiites irakiennes. Ces dernières ont vu dans ce remaniement une tentative de les désavouer et de renforcer le contrôle de Moustafa Kazimi sur les forces de sécurité du pays, en particulier la direction du renseignement. « Le Premier ministre s’est saisi de l’attaque pour tenter de mettre les forces de sécurité sous le contrôle de son bureau », note à L’Orient-Le Jour Jack Watling. « L’une des faiblesses du système de sécurité irakien est que ses différents organes disposent d’assez bonnes informations sur les domaines dans lesquels ils travaillent, mais qu’ils ne partagent pas ces informations de manière très fiable avec les autres parties du gouvernement. Le Premier ministre a souhaité remédier à cela », ajoute t-il. « Moustafa Kazimi a dirigé la plus grande organisation de renseignement irakienne pendant des années et il comprend les problèmes de coordination entre les cinq grandes agences de renseignement irakiennes », commente de son côté Michael Knights. « Ce manque de coordination peut créer des ouvertures pour les kamikazes. Un événement comme cette attaque-suicide est un moment naturel pour remanier les dirigeants afin de créer une équipe plus soudée », conclut-il.

C’est une attaque à laquelle les Irakiens n’étaient plus habitués depuis maintenant trois ans. Trente-deux personnes ont été tuées jeudi et plus d’une centaine ont été blessées au cours d’un double attentat-suicide mené sur un marché du centre de Bagdad. Selon le ministre de l’Intérieur, le premier kamikaze a feint d’être malade pour attirer la foule avant de déclencher...

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