Le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a dressé un sombre tableau du Liban "qui s'enfonce dans la crise", déplorant "un déni total" des autorités alors que le pays n'a toujours pas réussi à mettre en place un nouveau gouvernement depuis août, dans la foulée de l'explosion dévastatrice du 4 août au port de Beyrouth. Faisant l'inventaire d'une année 2020 "terrible", dans un entretien accordé au Figaro, M. Le Drian rappelle que "des partenaires majeurs de la France ont subi des épreuves dramatiques, comme le Liban qui s’enfonce dans la crise".
"Le Titanic sans l’orchestre"
Y a-t-il encore des crises sur lesquelles la France peut peser seule ? demande la journaliste Isabelle Lasserre au ministre français. "La France pèse quand elle est à l’initiative et souvent, seule la France est à l’initiative. Elle ne règle sans doute pas les choses seule, mais elle a la capacité de rassembler autour d’elle. C’est ce qui fait notre singularité et notre force. Si la France n’avait pas pris l’initiative au Sahel, il ne se passait rien. Idem au Liban…", répond M. Le Drian. "Même avec une initiative, il ne s’y passe pas grand-chose…", lui rétorque alors la journaliste.
"La seule solution, pour que le message soit compris, était de s’exprimer vigoureusement, en raison de notre amitié historique avec le Liban. C’est parce qu’il y a eu l’initiative de la France que toute la communauté internationale est sur la même logique que nous. Personne ne veut engager des financements tant que le Liban n’aura pas fait ses réformes. Pour moi, le Liban, c’est le Titanic sans l’orchestre. Les Libanais sombrent dans le déni total de leur situation et il n’y a même pas de musique…", constate le chef de la diplomatie française.
Par le passé, en août notamment, M. Le Drian avait déjà averti que si les réformes n'étaient pas lancées, le risque n'était rien moins que "la disparition du Liban".
La pression internationale sur les autorités libanaises se fait de plus en plus pressante, le pays continuant de s'enfoncer dans la pire crise économique et financière de son histoire moderne. Un nouveau gouvernement est donc crucial pour faire face à cette crise, plus de quatre mois après la démission de celui de Hassane Diab, suite au drame au port de Beyrouth. Le Premier ministre Moustapha Adib, qui lui avait succédé, avait finalement jeté l'éponge sans parvenir à former son équipe. Quant à Saad Hariri, le nouveau Premier ministre désigné en octobre, il n'a lui non plus pas réussi à ce stade à mettre sur pied un cabinet, en raison des tiraillements entre les partis politiques au pouvoir qui réclament leur part au sein du gouvernement.
Cela n'a pas empêché le président Macron de maintenir une visite à Beyrouth, les 22 et 23 décembre, son troisième séjour au Liban depuis l'explosion meurtrière du 4 août. Le 1er septembre, M. Macron avait annoncé à Beyrouth une feuille de route pour une sortie de crise au pays du cèdre. Ce document prévoit, entre autres, un gouvernement de mission formé d'experts. Mais l'initiative française semble plus que jamais dans l'impasse.
Retrouvez l'intégralité de l'entretien de Jean-Yves Le Drian au Figaro ici
commentaires (12)
Ou sont elles les sanctions promises? C est d une hypocrisie sans pareille. Vos paroles mR Le Drian
Robert Moumdjian
03 h 05, le 15 décembre 2020