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Société - Reconfinement

Les commerçants craignent de faire les frais du nouveau bouclage

« Nous nous conformons à chaque fois aux mesures, mais l’État ne nous donne rien en retour pour que l’on puisse continuer à aller de l’avant », affirme un restaurateur à « L’OLJ ».

Les commerçants craignent de faire les frais du nouveau bouclage

« Interdiction d’entrée si vous vous sentez malade », précise dans une affiche cet établissement beyrouthin.

Alors que le Liban entame aujourd’hui un nouveau confinement généralisé de deux semaines, nombreux sont ceux qui dénoncent une mesure qui sonne le glas d’une économie déjà au point mort. À l’instar des commerçants qui, dans leur majorité, se disent prêts à respecter le bouclage pour des raisons sanitaires, mais s’exécutent de mauvaise grâce dans un contexte de crise économiques aiguë et de baisse drastique de leur activité. « Nous sommes pour le reconfinement, car il y a eu beaucoup de cas d’infection au coronavirus dernièrement. Mais nous ne voulons pas en payer le prix, d’autant plus que certains continuent leurs activités commerciales en secret », affirme à L’Orient-Le Jour André Malak, entrepreneur et gérant de plusieurs restaurants à Beyrouth. Il appelle les autorités à soutenir le secteur de la restauration, l’un des plus touchés par la crise économique ainsi que par les confinements successifs. « Nous nous conformons à chaque fois, mais l’État ne nous donne rien en retour pour que l’on puisse continuer à aller de l’avant. Les autorités devraient nous venir en aide en baissant les taxes par exemple ou en imposant une baisse des loyers. Nos pertes sont énormes. Nos employés ont déjà accepté des réductions de salaire pour que l’on ne mette personne à la porte », soupire-t-il.

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Pour le secteur des transports, la même désolation est palpable car qui dit reconfinement dit baisse des déplacements en voiture. Dany Habchy, propriétaire de la compagnie Mister Taxi à Hazmieh, tire la sonnette d’alarme. « Nous allons respecter le reconfinement, mais de toute façon nous travaillons à peine depuis que la pandémie s’est déclarée », déplore-t-il. « Cela fait un an que je cumule les pertes. J’ai perdu 90 % de mon chiffre d’affaires. Le problème n’est pas uniquement le Covid-19, mais la crise du dollar. Avant, chacun de mes chauffeurs gagnait 100 $ par jour, maintenant ils en gagnent à peine 10 chacun », lance M. Habchy. « On porte le masque et on respecte la distanciation sociale. Mais qu’on nous laisse travailler ! » s’insurge un fleuriste beyrouthin, excédé, soulignant qu’il ne sait pas comment payer ses quelque 20 employés pendant les 15 jours de fermeture forcée. Jeudi, deux jours avant le reconfinement généralisé, le Liban a franchi la barre symbolique des 100 000 contaminations officiellement recensées depuis l’apparition de la pandémie dans le pays le 21 février dernier. La barre des dix décès par jour est en outre régulièrement franchie ces dernières semaines, alors que les hôpitaux sont de plus en plus sous pression.

Le secteur de la restauration se plaint de l’absence de soutien de la part des autorités alors que le reconfinement commence aujourd’hui samedi. Photos João Sousa

Ruée sur les commerces dans le Sud et la Békaa

À Saïda, les habitants ont formé de longues files hier devant les magasins qui devront fermer durant le confinement, selon notre correspondant Mountasser Abdallah. À noter que les boulangeries, supermarchés et pharmacies seront exemptés de ces mesures, partout dans le pays. « Je vais me conformer au reconfinement, car la situation économique a déjà affecté mon commerce. Ouvrir ou fermer ne changera donc pas grand-chose. Puisque la situation est telle qu’elle est, je préfère fermer ma boutique pour préserver ma santé », confie Ahmad, propriétaire d’un magasin de chaussures dans la ville.

Mouhyeddine, mécanicien de 30 ans, met les bouchées doubles avant le reconfinement. « Normalement je chôme les vendredis, mais j’ai décidé de travailler aujourd’hui. Je reproche au ministre de l’Intérieur de nous imposer, à nous mécaniciens, le confinement. Nous travaillons seuls dans nos échoppes, il n’y a pas de foules qui se pressent chez nous. De toute manière, on travaillait à peine ces derniers temps, avec ou sans confinement », ironise-t-il.

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Jeudi, le président de l’Association des commerçants de Saïda, Ali Charif, avait fait part, lors d’une réunion avec le mohafez du Sud Mansour Daou, de la volonté des boutiques de la ville de respecter les mesures mises en place par les autorités, « bien qu’elles soient injustes à notre égard », appelant les autorités à « imposer des sanctions aux contrevenants ».

Dans la Békaa, les avis semblent partagés concernant ce bouclage imposé jusqu’à la fin du mois. Certains se disent conscients du danger posé par le Covid-19, tandis que d’autres dénoncent une politique des « deux poids, deux mesures ». « Ce confinement n’aura aucun impact car les gens ne s’y conforment pas. Hier après-midi (avant-hier), les gens se ruaient partout sur les magasins, sans prendre la moindre mesure de protection », confie Rouba Taha, une habitante de Baalbeck, à notre correspondante Sarah Abdallah. « Il est vrai que les gens ont besoin de travailler pour subsister, mais il faut respecter le port du masque au moins. Quant aux forces de sécurité, elles ne semblent pas concernées par le respect de ces mesures dans la région », dénonce la jeune femme.

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Ali, commerçant à Bar Élias, est pour sa part intransigeant. « Je ne vais pas fermer ma boutique. Les autorités continuent à ouvrir les institutions qui leur rapportent de l’argent », dénonce-t-il, en référence au fait que l’aéroport et les administrations publiques continueront de fonctionner pendant le confinement. « Je ne souhaite pas me conformer et je ne pense pas que je serai le seul. J’imposerai le port du masque dans ma boutique et le respect de la distanciation sociale, explique Ali. Cette décision est assez suspecte et ne sert pas à préserver les intérêts des citoyens. Ils essaient de nous tenir en laisse pendant qu’ils poursuivent leurs négociations pour la formation du gouvernement. »

Alors que le Liban entame aujourd’hui un nouveau confinement généralisé de deux semaines, nombreux sont ceux qui dénoncent une mesure qui sonne le glas d’une économie déjà au point mort. À l’instar des commerçants qui, dans leur majorité, se disent prêts à respecter le bouclage pour des raisons sanitaires, mais s’exécutent de mauvaise grâce dans un contexte de crise...

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Cest bien ce qu'ils cherchent nos irresponsables, la mort du pays.

Christine KHALIL

09 h 09, le 14 novembre 2020

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Commentaires (1)

  • Cest bien ce qu'ils cherchent nos irresponsables, la mort du pays.

    Christine KHALIL

    09 h 09, le 14 novembre 2020

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