L'ambassadrice américaine à Beyrouth, Dorothy Shea, a diffusé lundi une vidéo dans laquelle elle relève certaines "inexactitudes" dans les propos qu'a tenus dimanche le chef du Courant patriotique libre, le député libanais Gebran Bassil, lourdement sanctionné vendredi par Washington qui l'accuse de corruption, abus de pouvoir et soutien au Hezbollah. Mme Shea a ainsi révélé que M. Bassil avait "lui-même exprimé sa volonté de rompre" avec le parti chiite, "à certaines conditions".
Dimanche, M. Bassil s'était vivement défendu des accusations de corruption américaines, répétant qu'il ne coupera pas les liens avec la formation de Hassan Nasrallah, parlant de pressions exercées sur lui dans ce but par l'administration Trump mais aussi de négociations faites avec lui pour le convaincre de briser son alliance avec le Hezb.
"M. Bassil peut penser qu'il sert sa cause en divulguant de manière sélective des informations sur nos échanges et en les plaçant hors contexte, a déclaré Mme Shea. Ce n’est pas ainsi que j'agis normalement, mais je vais dire une chose : il a lui-même exprimé sa volonté de rompre avec le Hezbollah, à certaines conditions. Il a en fait exprimé sa gratitude, disant que les États-Unis lui avaient fait voir en quoi la relation (avec le Hezbollah) est désavantageuse pour son parti. Des conseillers clés m'ont même informée qu'ils avaient encouragé M. Bassil à prendre cette décision historique".
"Je ne vais pas réfuter toutes les inexactitudes du discours de M. Bassil hier, il y en avait beaucoup et elles trahissaient un manque de compréhension sur le fonctionnement des sanctions", déclare l'ambassadrice au début de sa vidéo. Elle précise ainsi que les sanctions "sont d'abord contre l'individu et non contre le parti". "Les États-Unis ne sont pas en train de sanctionner ou de détruire le Courant patriotique libre", a-t-elle souligné.
Concernant les demandes de preuves retenues qui ont poussé Washington à sanctionner le chef du CPL, Mme Shea a indiqué que les Etats-Unis s'efforcent "de rendre autant d'informations accessibles que possible lors de l'annonce des désignations, mais comme c'est souvent le cas, certaines de ces informations ne peuvent pas être diffusées". Elle a aussi précisé que M. Bassil pouvait contester cette désignation devant le tribunal des Etats-Unis, tel qu'il en avait exprimé le souhait.
Samedi, le président de la République Michel Aoun avait demandé à obtenir les "preuves et documents" qui ont poussé Washington à sanctionner son gendre. Le chef de l'État a ensuite "insisté pour que ces documents soient fournis à la justice libanaise afin qu'elle prenne les mesures légales nécessaires en la matière".
"Dans son discours, M. Bassil s'est plaint que je ne l'avais pas prévenu qu'il serait sanctionné pour corruption comme si c'était ma responsabilité de le faire avant sa désignation. Ce n'est pas le cas, a aussi précisé l'ambassadrice. Le fait que M. Bassil ait été désigné en vertu de la loi Magnitsky ne signifie pas que lui-même, ou toute autre personne, ne pourrait pas être sanctionné par une autorité différente à une date ultérieure".
Les sanctions contre M. Bassil ayant été annoncées la veille de l'annonce des résultats de la présidentielle américaine, faisant de Joe Biden le futur président américain, Mme Shea a noté que "la démarche n'avait rien à voir avec les élections américaines". "Le 'package' avait simplement atteint un point où il était prêt à être mis en œuvre", a-t-elle dit.
Pour conclure, l'ambassadrice américaine a indiqué que "les États-Unis ont entrepris cette action en solidarité avec le peuple libanais qui, depuis plus d'un an, exige de ses dirigeants politiques (...) de prendre une nouvelle direction dédiée à la réforme, la transparence et à l'élimination de la corruption endémique".
Peu de temps après la diffusion de cette vidéo, le bureau de presse de M. Bassil a répondu à Mme Shea. "En disant que les informations ne peuvent être diffusées, l'ambassadrice américaine à Beyrouth a démontré qu'il n'y avait aucune preuve des accusations de corruption portées contre le chef du CPL", peut-on lire dans un communiqué. "Si ces données sont disponibles et ne peuvent pas être publiées, le député Gebran Bassil exige au moins que la partie américaine concernée les remette aux autorités libanaises compétentes". "Si la politique américaine n'a jusqu'à présent pas réussi à rompre l'entente entre le CPL et le Hezbollah malgré toutes les pressions que Washington a exercées au fil des ans et malgré toutes les menaces, alors parler de +conditions précises+ au lieu de parler de dialogue national global, est une tentative sympathique, mais elle ne réussira pas forcément", conclut le communiqué.
Les sanctions contre M. Bassil ont été prises sur la base du Magnitsky Act, qui vise tout responsable portant atteinte aux droits humains et ayant trempé dans des affaires de corruption. Conformément à ce texte de loi, les actifs de M. Bassil seront pour l'essentiel gelés aux États-Unis. Dans un communiqué distinct, le département d’État a annoncé que Gebran Bassil fait également l’objet de sanctions dans le cadre de la loi sur les opérations étrangères du département d’État (2020), qui cible les responsables de gouvernements étrangers impliqués dans des actes de corruption. Dans ce cadre, le chef du CPL est désormais interdit d’entrée aux États-Unis. Le département d'État a encore précisé que les actions prises contre Gebran Bassil s'inscrivent dans la continuité des sanctions lancées précédemment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme contre les anciens ministres libanais Youssef Fenianos et Ali Hassan Khalil.
Gebran Bassil est l'une des figures les plus conspuées dans la rue, depuis la révolte populaire du 17 octobre 2019, qui fustige toute la classe politique accusée de corruption et d'incompétence. Cette hostilité envers sa personne s'est accrue, de même que contre toute la classe dirigeante, après la double explosion du 4 août au port de Beyrouth, qui a tué 204 personnes, blessé 6.500 autres et ravagé des quartiers entiers de la capitale. La déflagration était due, selon la version officielle, à un incendie qui avait déclenché l'explosion de près de 3.000 tonnes de nitrate d'ammonium stockés sans mesures de sécurité dans le port depuis 2014.
Ils sont drôles les aounistes-bassiliens, aucune preuve que bassil est corrompu, les américains c'est des charlots et "l'avenir" prouvera que bassil est un héros... aounisme-bassilien quand tu nous tiens...
16 h 53, le 10 novembre 2020