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Politique - Focus

Entre Aoun et Hariri, le sort du gouverneur de la BDL

L’exigence du chef de l’État d’obtenir le ministère-clé de l’Intérieur dans le prochain gouvernement semble acquise.


Entre Aoun et Hariri, le sort du gouverneur de la BDL

Le gouverneur de la BDL (à gauche) reçu par Saad Hariri, alors Premier ministre sortant, le 15 janvier dernier. Photo d’archives ANI

Dans les négociations en cours pour la formation du nouveau cabinet de Saad Hariri, certains ont été surpris par la position relativement accommodante du président de la République, Michel Aoun, bien qu’il ait accepté à contrecœur de charger le chef du courant du Futur de constituer le gouvernement.

Les deux hommes, qui se sont rencontrés quatre fois depuis samedi, refusent de communiquer sur la teneur de leurs entretiens visant à faciliter l’avènement du cabinet, même s’il est clair que la répartition des portefeuilles ministériels selon le principe de la rotation, à l’exception du ministère des Finances, semble acquise. Mais des sources qui suivent de près les tractations en coulisses indiquent que le chef de l’État a aujourd’hui une exigence de taille pour faciliter la formation du cabinet : le départ du gouverneur de la Banque centrale Riad Salamé. « Le président ne veut plus de Riad Salamé, et c’est l’une des conditions qu’il pose à Hariri pour accepter la formation du gouvernement », affirme une source au fait de ces entretiens. « Le président ne reviendra pas sur cette exigence, même si cela doit retarder la constitution du cabinet jusqu’à ce qu’il obtienne des garanties que son souhait sera exaucé », ajoute-t-elle.

Le président a fait de l’audit des comptes de la BDL son cheval de bataille. Il mise sur ce dossier, qui figure d’ailleurs en tête de liste des réformes urgentes que le Liban doit lancer pour espérer pouvoir compter sur une aide internationale, afin de pousser le gouverneur à la démission. Et cela bien que M. Aoun ait accepté la reconduction du mandat de M. Salamé par le passé en vertu d’un accord de compromis avec M. Hariri.

Sous le gouvernement sortant de Hassane Diab, Michel Aoun appelait quasi quotidiennement le ministre des Finances Ghazi Wazni pour lui demander où en était cet audit, selon des sources familières du dossier. Quant à M. Hariri, bien que Riad Salamé ait été l’un des fidèles de son père, il sait pertinemment que le gouverneur ne pourra plus demeurer à son poste et qu’il ne pourra plus longtemps encore le protéger. Il estime cependant, selon des sources proches de la Maison du Centre, qu’il faut assurer au gouverneur de la BDL « une porte de sortie honorable ».

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Lors de leurs entretiens ces derniers jours au palais de Baabda, Michel Aoun a souligné en toute franchise à Saad Hariri qu’il était nécessaire de procéder à l’audit juricomptable (forensic audit) de façon sérieuse et transparente, selon les mêmes sources au fait des discussions. Et pour le soutenir dans sa position, le bloc du Liban fort a souligné mardi qu’il était nécessaire que l’audit juricomptable des comptes de la BDL soit entrepris « comme point de départ du processus de réforme et de lutte contre la corruption ». « En cas de manquement à cet égard, il faudra exposer les personnes négligentes et engager des poursuites à l’encontre de ceux qui boycottent le processus et ne fournissent pas à la société d’audit les informations nécessaires », ont affirmé les députés aounistes à l’issue de leur réunion hebdomadaire. Hier, la BDL a indiqué, dans un bref communiqué, avoir transmis au gouvernement tous les documents et informations requis par les cabinets d’audit KPMG, chargé du volet purement comptable de l’audit de la BDL, et Oliver Wyman, spécialiste des banques centrales, puisqu’ils ne vont pas à l’encontre des lois libanaises. Le communiqué omet cependant de mentionner Alvarez & Marsal, alors que cette société est chargée du volet le plus critique de cette opération, à savoir l’audit juricomptable. Il n’est pas clair, aujourd’hui, si la BDL aurait refusé de transmettre l’ensemble des documents demandés par Alvarez & Marsal en se réfugiant derrière la loi libanaise sur le secret bancaire ou juste une partie d’entre eux.

Ce qui conforte le chef de l’État dans sa position est un certain appui international, puisque le président français Emmanuel Macron a souligné la nécessité d’une réforme du secteur bancaire et d’un audit transparent. Le secrétaire d’État adjoint américain pour le Moyen-Orient, David Schenker, au cours de son récent passage à Beyrouth, ainsi que d’autres responsables américains ont également évoqué la nécessité d’un assainissement du secteur financier, ce qui pourrait signifier que M. Salamé ne jouit plus de l’appui des États-Unis qui avaient cependant fait le forcing pour le maintenir à son poste lorsque que le gouvernement Diab avait voulu le limoger.

Le ministère de l’Intérieur en priorité

Ceux qui connaissent le chef de l’État, relèvent des observateurs, savent que cette demande s’inscrit dans le cadre de son projet, depuis son accession à la présidence il y a quatre ans, de contrôler les principaux rouages de l’État pour consolider son mandat : la politique étrangère, la sécurité et l’armée, la justice et les institutions financières. Au cours des quatre dernières années, il a réussi peu à peu à consolider son contrôle sur plusieurs de ces leviers, à commencer par la politique étrangère qui a été tenue par le chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, son gendre. Lequel a continué à en contrôler les principaux dossiers, même après son départ du ministère. Il a également pu asseoir son influence sur la justice en contrôlant le ministère de la Justice, en nommant des juges qui lui sont proches et en entravant les nominations judiciaires.

Pour ce qui est de la sécurité et de l’armée, le chef de l’État a repris sous son giron le poste du chef des services de sécurité de l’aéroport ainsi que la Sécurité de l’État. Il entretient également une bonne relation avec la Sûreté générale et son chef, le général Abbas Ibrahim. Tout comme il a une excellente relation avec l’armée, même s’il a eu certaines divergences avec son chef, le général Joseph Aoun, et le chef des renseignements, Tony Mansour, en raison d’interférences de Gebran Bassil, selon des sources sécuritaires.

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Une seule institution sécuritaire échappe à son contrôle : les Forces de sécurité intérieure, tenue par un fidèle de M. Hariri, le général Imad Osman. Mais M. Aoun pourrait également étendre son influence sur cette institution puisque, selon le partage des ministères en discussion, le ministère de l’Intérieur reviendrait au camp du chef de l’État. Ce ministère-clé, qui était attribué jusqu’à présent au courant du Futur, est crucial pour contrôler non seulement les forces de sécurité, mais également les municipalités, ce qui pourrait aider le CPL, en perte de vitesse au niveau de sa popularité, à regagner du terrain. L’Intérieur est un ministère vital car celui qui le contrôle peut tenir administrativement le Liban.

Restent les institutions financières : comme le camp du chef de l’État ne peut prétendre au ministère des Finances, désormais dévolu au tandem chiite, c’est sur le gouverneur de la Banque centrale qu’il dirige par conséquent sa bataille.

Dans les négociations en cours pour la formation du nouveau cabinet de Saad Hariri, certains ont été surpris par la position relativement accommodante du président de la République, Michel Aoun, bien qu’il ait accepté à contrecœur de charger le chef du courant du Futur de constituer le gouvernement.Les deux hommes, qui se sont rencontrés quatre fois depuis samedi, refusent de...

commentaires (12)

J’espère que le président de la république va s’accrocher aussi bien à l’audit criminel du ministère des finances, du ministère de l Electricité, et celui du pétrole ..!

LeRougeEtLeNoir

12 h 44, le 30 octobre 2020

Tous les commentaires

Commentaires (12)

  • J’espère que le président de la république va s’accrocher aussi bien à l’audit criminel du ministère des finances, du ministère de l Electricité, et celui du pétrole ..!

    LeRougeEtLeNoir

    12 h 44, le 30 octobre 2020

  • Il serait intéressant de consulter le site Forbes Moyen-Orient qui révèle les demandes d’Alvarez & Marsal portant sur une centaine de questions que la Banque centrale du Liban refuse de communiquer et que le futur ex futur ex premier ministre ainsi que le président du parlement souhaiteraient enterrer l'audit de la banque centrale au motif d'un vague secret bancaire ...Alvarez &Marsal ont réussis dans les pays qui adoptent le secret bancaire, sans que ces lois soient un obstacle à leur demande ;Ce qui se produit dans le cas du Liban a été un refus de coopérer car l’audit pourrait entraîner l’exposition de toutes les pratiques, ce qui a entraîné d’importantes pertes dans le budget

    C…

    00 h 40, le 30 octobre 2020

  • Mr le Président comment vous ne dites rien de votre gendre Ali Baba ?

    Eleni Caridopoulou

    16 h 54, le 29 octobre 2020

  • "...de contrôler les principaux rouages de l'Etat pour consolider son mandat, et le préparer en vue de le remettre à son gendre dans deux ans, selon les coutûmes déshormais bien rôdées et imposées "d'en-haut"...2)...influence sur la Justice et contrôler le ministère de l Justice, ainsi que nommer les juges qui lui sont proches, et en plus entraver les nominations judiciaires qui ne lui conviennent pas...3)...chef de la sécurité de l'Aéroport et de la Sécurité d'Etat etc., et pourtant après le 4/8/2020, il clamait haut et fort ne pas avoir eu les pouvoirs de contrôler les dessous de cette catastrophe !!!...4)...politique étrangère aussi tenue actuellement dans les coulisses par son gendre... N'est-ce pas la plus flagrante corruption, exercée par celui qui sans cesse clame vouloir la combattre...??? - Irène Saïd

    Irene Said

    11 h 00, le 29 octobre 2020

  • Le sort du pays continue à être négocié en fonction de l’intérêt de chacun des membres de cette mafia qui veulent pérenniser le racket des institutions étatiques et l’extorsion des biens des citoyens. Ils essayent de paver la piste des votations prochaines pour acheter ou forcer la rue à voter pour eux quoi qu’il en coûte au pays. Ils sont dépourvus de toute conscience et de sens patriotique. Le marchandage continuera pour ruiner le pays pendant que le peuple agonise et le pays se meurt. Non mais quelle mascarade. Plus on avance et plus la constitution se trouve piétinée et ca n’est pas fini. Le tandem chiite trouverait un subterfuge pour tout bloquer à la fin des négociations pour obtenir la totalité de ce que les autres partis croyaient acquis pour remettre les compteurs à zéro. Tant qu’ils seront à leurs postes tous, rien ne se fera et le Liban finira par rendre l’âme. Il faut les empêcher de rester au pouvoir par tous les moyens. C’est la seule solution pour sortir de ce cercle vicieux. Kellon doivent déguerpir de force.

    Sissi zayyat

    09 h 58, le 29 octobre 2020

  • POURQUOI EN FAIRE LE SEUL BAUDET DE LA REPUBLIQUE HEIN ? SEUL A ECOPER ALORS QUE LES AUTRES KELLOUN S'EN SORTENT INDEMNES ? DU DIABLE SI QUELQU'UN OSE APPELER CA "JUSTICE" .

    Gaby SIOUFI

    09 h 35, le 29 octobre 2020

  • Ryad Salame fidèle a Hariri père ? Évidemment. C’est lui qui l’a nommé, apres que Michel el Khoury ait refusé de dollariser la dette, source de no maux...

    Citoyen lambda

    09 h 05, le 29 octobre 2020

  • Avec cet excellent papier, l’OLJ confirme sa tendance rècente à changer de cap journalistique pour enfin appeler un chat un chat au lieu de tourner des phrases parfois alambiquées dans le seul but de ne pas mettre les pieds dans le plat. je vote pour.

    Marionet

    08 h 19, le 29 octobre 2020

  • IL A LARGEMENT COOPERER A LA CATASTROPHE QUI FRAPPE LE PAYS. LE CHEF DES PREDATEURS BANQUIERS QUI ONT SEQUESTRE ET VOLE LES ECONOMIES D,UNE VIE DES DEPOSANTS. WAHAD MENNON. KELLON YE3NE KELLON.

    LA LIBRE EXPRESSION

    06 h 01, le 29 octobre 2020

  • Le seul remede quant Je lis un article pareil est de votre dans les prochaines elections et jeter toutes ces personnes dehors. Mr Aoun pense que son parti va connaitre un renouveau apres tous ce que les Libanais ont vu et entendu.

    hrychsted

    04 h 56, le 29 octobre 2020

  • Rien moins qu un penitencier c est la qu il faut le placer et à vie

    Robert Moumdjian

    01 h 39, le 29 octobre 2020

  • On lui donnera le poste de Directeur du Casino probablement

    Chucri Abboud

    01 h 35, le 29 octobre 2020

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