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Campus - CORONAVIRUS

Étudiants à l’étranger : comment vivent-ils leur retour (forcé) au Liban ?

Pandémie oblige, de nombreux étudiants libanais inscrits dans des universités à l’étranger suivent leurs cours du Liban.

Étudiants à l’étranger : comment vivent-ils leur retour (forcé) au Liban ?

Ahmad el-Makkawi. Crédit photo : Mohamad Mourad


Jennifer Khayat. Crédit photo : Cindy Hallak


En raison de la pandémie, de nombreux étudiants libanais inscrits dans des universités à l’étranger sont contraints de suivre leurs cours depuis le Liban. Une situation qui n’est pas toujours idéale. Jennifer Khayat, étudiante en droit à l’Université de Montréal, a dû quitter le Canada, un an après son arrivée, à la suite de la décision prise par son établissement d’opter pour des cours à distance. Outre la faiblesse de la connexion internet au Liban, la jeune étudiante se heurte à l’absence de manuels — dont la plupart ne sont disponibles qu’à la bibliothèque de son université — dans les librairies libanaises. « Il n’est pas toujours possible d’acheter les livres en version électronique, donc j’ai dû parfois demander à des amis installés au Québec de prendre en photo les pages à étudier et de me les envoyer », confie Jennifer Khayat. La jeune femme se dit reconnaissante envers l’un de ses professeurs « qui a offert de (lui) envoyer le manuel dont (elle) a besoin en payant lui-même les frais d’expédition. » Elle confie également avoir été soulagée que la majorité de ses cours soient enregistrés. Ce qui lui permet d’y accéder au moment qui lui convient.


Stephanie Ashkar. Crédit photo : Lara Ashkar


Cela n’est malheureusement pas le cas de Stéphanie Ashkar, qui étudie l’économie à l’Université de Harvard aux États-Unis, et qui est obligée de rester éveillée tard la nuit, pour suivre ses leçons en temps réel et pouvoir interagir avec le professeur. « Mon mode de vie a été totalement bouleversé. J’essaie sans cesse de m’adapter à cette nouvelle manière de travailler, mais ce n’est pas évident du tout », confie-t-elle ajoutant qu’elle est, par ailleurs, incapable de bénéficier des heures de bureau de son professeur à cause du décalage horaire entre le Liban et les États-Unis. Joya Faddoul, qui poursuit une licence en sciences des organisations à l’Université Paris-Dauphine, évoque un autre obstacle rencontré par les étudiants : les prix exorbitants des cahiers et des fournitures. « Heureusement que la plupart de nos profs nous envoient les manuels à acheter en format PDF », ajoute-t-elle, en référence au coût des livres. De son côté, Karim Karame, étudiant en business à l’Université américaine de Malte, confie souffrir des mêmes problèmes qui préoccupent le reste des étudiants libanais, à savoir les coupures d’électricité.


Lea Halawi. Crédit photo : Aya Hariri


Être auprès des siens en cette période difficile

Selon Stéphanie Ashkar, l’enseignement en ligne prive les étudiants de l’expérience de la vie universitaire et de l’occasion de développer leur autonomie. « Nous sommes en train de rater une chance inédite pour la découverte de soi », estime-t-elle. Toutefois la jeune étudiante ne regrette pas son retour au Liban confiant qu’elle aurait ressenti de « la culpabilité » si elle était restée aux États-Unis en cette période difficile. Un sentiment partagé par de nombreux jeunes. Malgré l’existence d’une possibilité de rester au Canada chez son oncle, Léa Halawi, étudiante en relations internationales à l’Université de Colombie-Britannique (UBC), a, elle aussi, préféré retourner au Liban, afin de passer ces moments incertains auprès de sa famille. « J’ai une obligation, un devoir moral envers mon pays de m’engager dans les débats actuels et cela, en y étant présente physiquement », avance-t-elle.

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Joya Faddoul a décidé de quitter la France en juillet. Elle estime que son séjour au Liban, auprès de ses proches, lui permet de « retrouver le calme au sein de cette tempête de circonstances exceptionnelles ». Quant à Ahmad el-Makkawi, qui étudie les maths et l’ingénierie informatique à l’Université de Carleton au Canada, il confie préférer « se battre en ces moments, avec (son) peuple sur le terrain, et participer aux manifestations, dans (son) pays, plutôt que d’être un simple spectateur qui contemple la dégradation des conditions de vie au Liban depuis l’étranger. »

Voulant se rendre utile et aider son pays, Jennifer Khayat, a, pour sa part, profité de son séjour au Liban pour faire du bénévolat surtout après la double explosion du 4 août.

Malgré leur enthousiasme patriotique, ces étudiants sont affectés par la triste réalité de la situation au Liban. Le marasme ambiant attriste Joya Faddoul, qui nuance toutefois : « Certes la situation est désastreuse, mais la présence de ma famille à mes côtés compense le stress généré ; je ne regrette pas ma décision de revenir. »


Karim Karame. Crédit photo : Ramy Karame


Karim Karame, de son côté, avoue sa frustration de ne pas pouvoir actuellement retourner à Malte. « Cela peut paraître égoïste, mais pour une personne qui a eu un avant-goût de la vie à l’extérieur du Liban, et qui a dû, à la suite d’un cas de force majeure, revenir subitement au pays, et faire face au drame actuel… le moins qu’elle puisse faire est de dire que la situation est déplorable », estime-t-il. Ahmad el-Makkawi acquiesce. Ce futur ingénieur confie galérer parallèlement à ses études pour trouver « des moyens de survie ».

Joya Faddoul. Crédit photo : Chloé el-Bittar


Certaines facultés ont fait preuve de compréhension

Dans cette situation exceptionnelle, les étudiants ont-ils été soutenus par leurs universités ? Les réponses des étudiants interviewés varient. Certaines facultés ont fait preuve de compréhension. « Nos professeurs sont à l’écoute de nos préoccupations », indique Ahmad el-Makkawi. « Tous mes cours sont enregistrés, et les enseignants soutiennent les étudiants qui souffrent de dépression, ou qui ont été atteints par le Covid-19, en leur offrant des leçons particulières », ajoute-t-il.

Joya Faddoul, elle, dépeint un scénario bien différent. « Mon université n’a pas vraiment traité les étudiants au cas par cas. On doit tous s’y rendre coûte que coûte prochainement pour passer les examens et cela, même si on vient du Liban et même si la pandémie s’aggrave en France. »



Jennifer Khayat. Crédit photo : Cindy HallakEn raison de la pandémie, de nombreux étudiants libanais inscrits dans des universités à l’étranger sont contraints de suivre leurs cours depuis le Liban. Une situation qui n’est pas toujours idéale. Jennifer Khayat, étudiante en droit à l’Université de Montréal, a dû quitter le Canada, un an après son arrivée, à la suite de la...

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