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Politique - Formation du gouvernement

Les consultations parlementaires reportées d'une semaine

Une décision contestée par le président du Parlement, Nabih Berry, qui s'est prononcé contre tout report, "même d'un seul jour".

Les consultations parlementaires reportées d'une semaine

Entretien entre le président Michel Aoun et le leader sunnite et candidat au poste de Premier ministre, Saad Hariri, lundi 12 octobre, au palais de Baabda. Dalati Nohra/Handout via REUTERS

Alors que la désignation du leader du courant du Futur Saad Hariri comme Premier ministre chargé de former un cabinet de "mission" conformément à l'initiative du président français Emmanuel Macron semblait en bonne voie mercredi en cours de journée, la présidence de la République a finalement décidé en soirée de reporter les consultations parlementaires, prévues demain, d'une semaine. Une décision contestée par le président du Parlement, Nabih Berry, qui s'est prononcé contre tout report, "même d'un seul jour".

"Le président libanais Michel Aoun a décidé de reporter les consultations parlementaires contraignantes qui devaient avoir lieu jeudi 15 octobre au jeudi 22 octobre à la demande de certains blocs parlementaires en raison de l'émergence de difficultés qui nécessitent d'être surmontées", peut-on lire dans le communiqué de la présidence. Si Saad Hariri était assuré d'avoir le nombre de voix nécessaires pour être désigné Premier ministre, il ne bénéficiait pas d'une couverture chrétienne suffisante à sa nomination : les Forces libanaises ont refusé de lui accorder leurs voix et le Courant patriotique de Gebran Bassil, fondé par M. Aoun, a sévèrement critiqué sa candidature.

Selon des informations de notre correspondant Mounir Rabih, le président Michel Aoun penchait déjà, au cours de la journée, pour un report des consultations, mais de nombreuses interventions auprès du chef de l'Etat l'avaient conduit à patienter. Pour obtenir le maintien des consultations à leur date, les contacts ont été intenses entre la Maison du Centre et Aïn el-Tiné, soit entre Saad Hariri et Nabih Berry. En vain. Selon notre correspondante à Baabda Hoda Chedid, c'est surtout l'opposition de Gebran Bassil à la candidature de Saad Hariri qui a poussé le président à accorder une semaine supplémentaire aux négociations pour aboutir à un compromis.

M. Hariri, qui s'est déclaré candidat il y a six jours pour présider un gouvernement de spécialistes sans affiliation politique pour quelques mois, était déjà assuré du soutien des groupes parlementaires du Futur et de l'ancien PM Najib Mikati. Il aurait également bénéficié des voix de l'ex-Premier ministre Tammam Salam et de plusieurs députés indépendants ainsi que du soutien du mouvement Amal du président de la Chambre, Nabih Berry.

L'éditorial de Issa GORAIEB

(Co)vide intégral

Réunis en début d'après-midi, les députés Amal avaient annoncé qu'ils participeraient aux consultations, sans s'attarder sur l'identité de la personnalité qu'ils nommeraient. "Comme d'habitude, nous annoncerons le nom de notre candidat à la présidence du Conseil à l'issue de notre réunion avec le président Aoun", avait souligné le bloc dans le compte-rendu de la réunion lu par le député Anouar el-Khalil. Le mouvement Amal avait encore appelé à la formation "la plus rapide possible d'un gouvernement de sauvetage qui respecte les équilibres politiques et le principe de compétence et spécialisation" des ministres. Ce cabinet devra "rétablir la confiance de la communauté internationale dans le Liban, ainsi que de la diaspora, conformément à toutes les dispositions prévues par l'initiative française", selon le communiqué du mouvement.

Entretien Hariri-Hezbollah 
Durant toute la journée de mercredi, la délégation de députés de la formation de M. Hariri, formée par ce dernier pour sonder par les blocs parlementaires et tenter de rallier les chefs de file autour de l'initiative Hariri, avait poursuivi ses contacts, notamment avec les groupes parlementaires du Hezbollah, du CPL et de la "Rencontre consultative" (groupe de députés sunnites prosyriens).
L'entretien de la délégation avec le bloc du Hezbollah était le plus attendu de la journée. "La rencontre était bonne et le parti a assuré qu'il était d'accord à 90% avec l'initiative française et ce qui a été dit lors de la rencontre à la Résidence des Pins", a déclaré Bahia Hariri, qui menait la délégation, à l'issue de cet entretien. "Le plus important aujourd'hui est de s'accorder sur le programme gouvernemental, et pas la formation du gouvernement car nous ne pouvons pas le former aujourd'hui. Et sans un programme de réformes, à quoi bon ?"

Selon Mounir Rabih, le leader sunnite s'est longuement entretenu mardi soir avec Hussein Khalil, le bras droit du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Une information toutefois démentie par le bureau de presse de M. Hariri. Selon notre correspondant, la réunion a été l'occasion de discuter de l'initiative Hariri et des moyens d'aboutir à un compromis autour de la composition du gouvernement qu'il présiderait. Selon notre correspondant, Saad Hariri a demandé que le cabinet bénéficie de prérogatives exceptionnelles, ce qu'a catégoriquement refusé M. Khalil. Ce dernier a également réaffirmé l'attachement du tandem chiite au ministère des Finances et à la nomination des ministres chiites.

Le différend avec Joumblatt résolu ?
Toujours selon notre correspondant, M. Hariri a également tenté de rallier à sa cause le chef druze du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, qui avait vertement critiqué lundi la forme qu'a prise l'initiative menée par le leader du Futur, dénonçant une "violation flagrante de la Constitution", tout en laissant la porte ouverte à un compromis. C'est dans ce contexte qu'un entretien téléphonique a eu lieu mardi soir entre M. Hariri et le député joumblattiste Waël Bou Faour dans une tentative de rapprocher les deux points de vue. Une tentative qui a finalement ouvert la voie à une discussion téléphonique directe, mercredi, entre le leader du Futur et le leader du PSP. Selon le bureau de presse du parti, les deux hommes ont discuté "de la situation actuelle et ont abordé de manière franche et claire plusieurs points principaux relatifs à l'échéance gouvernementale". En soirée, M. Joumblatt a informé son bloc parlementaire de cet entretien téléphonique ainsi que de ses contacts continus avec le conseiller du président français Emmanuel Macron pour la région MENA, Patrick Durel, dans le but de faire réussir l'initiative française et mener les réformes qu'elle comprend dans le but de sortir le pays de sa crise économique. D'après des informations rapportées par notre correspondante à Baabda Hoda Chedid, le bloc joumblattiste allait finalement accorder son vote à Saad Hariri.

Le non des FL et l'obstacle Bassil
Sauf que la couverture chrétienne à cette désignation n'était assurée que par l’appui du leader des Marada Sleimane Frangié et certains députés chrétiens indépendants, Saad Hariri ne bénéficiant pas du soutien des deux principaux partis chrétiens, à savoir le CPL de Gebran Bassil et les FL de Samir Geagea. Ce dernier a annoncé que son groupe parlementaire ne nommera personne, "malgré son amitié" avec le candidat autoproclamé à la présidence du Conseil. "Saad Hariri est évidemment un ami pour des raisons historiques et objectives, et ne pas le nommer ne constitue pas un coup de poignard dans le dos, car nous gardons l'entière liberté de nommer toute personne que nous trouvons convenable", a expliqué M. Geagea à l'issue d'une réunion du bloc. Le leader des FL a insisté sur la formation d'un nouveau gouvernement "d'indépendants et de technocrates", qui ait comme "mission bien définie" de sauver le pays.

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Le groupe parlementaire Liban fort, dont le CPL est la principale composante, a pour sa part décidé de laisser la décision au président Aoun, selon Hoda Chedid. Une décision qui s'est donc traduite en un report des consultations.
A l'issue d'une réunion avec la délégation du Futur plus tôt dans la journée, le bloc aouniste avait refusé de se prononcer. "Nous n'anticipons pas les consultations parlementaires contraignantes", avait affirmé  son secrétaire général, Ibrahim Kanaan. "Quelles que soient les relations politiques entre les formations, le dialogue et la communication sont essentiels, surtout dans la période exceptionnelle que nous traversons", avait-il ajouté, soulignant que la délégation du Futur s'était concentrée lors des discussions sur "les réformes et l'importance d'une vision commune". "Ce qu'il faut, c'est que le pays soit sauvé et que des réformes cruciales soient lancées et nous espérons, en tant que bloc et parti, que toutes les parties politiques pensent comme nous".

Réagissant au report des consultations, M. Bassil a lancé dans un tweet : "A ceux qui font des spéculations et se lancent dans des paris : avec tout notre respect à la décision du président, notre position ne changera pas". La veille, le chef du CPL avait refusé que Saad Hariri dirige un cabinet de technocrates, n'en étant pas un lui-même, ajoutant que "celui qui veut mêler les politiques et les experts (comprendre former un cabinet techno-politique) doit savoir comment le faire".

Réunion entre des députés des groupes parlementaires du Futur et du Courant patriotique libre à Sin el-Fil, le 14 octobre 2020. Photo Ani


Alors que la désignation du leader du courant du Futur Saad Hariri comme Premier ministre chargé de former un cabinet de "mission" conformément à l'initiative du président français Emmanuel Macron semblait en bonne voie mercredi en cours de journée, la présidence de la République a finalement décidé en soirée de reporter les consultations parlementaires, prévues demain, d'une...

commentaires (8)

Bon, Diab accompagnera Aoun jusqu'à la fin de son mandat.

Esber

22 h 26, le 14 octobre 2020

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Commentaires (8)

  • Bon, Diab accompagnera Aoun jusqu'à la fin de son mandat.

    Esber

    22 h 26, le 14 octobre 2020

  • Dire qu'il n'était pas candidat et absolument pas intéressé par la présidence du Conseil il y a encore quelques jours...

    Sybille S. Hneine

    19 h 11, le 14 octobre 2020

  • Taratata. Ils boudent, ils se fâchent, ils se réconcilient et tout tourne autour d’eux et de leurs nombrils comme s’il n’y avait ni état ni peuple. Ni loi, ni constitution. Et encore moins de personnes capables dans ce pays pour leur dire qu’ils en ont trop fait et qu’il est l’heure à tous de dégager.

    Sissi zayyat

    19 h 05, le 14 octobre 2020

  • M Wahab vient de dire que la désignation de Saad Hariri ne sera pas à l 'ordre du jour jeudi . Wait and see .

    Antoine Sabbagha

    18 h 46, le 14 octobre 2020

  • "... Les FL annoncent qu'elles ne nommeront personne lors des consultations parlementaires ; le tandem chiite et le CPL réservent leur choix. ..." Géniaaaal! Quel suspense politique insoutenable! Des maîtres en la matière. Only in Lebanon. So proud!

    Gros Gnon

    18 h 42, le 14 octobre 2020

  • Donc Hariri a rejoint les rangs de la majorité. Fort n-bien, ceci permettra de voir ce que cette majorité est capable de faire toute seule. Je doute fort que les pays souhaitant aider le Liban, soient d'accord de proroger le système actuel et ses dérives, mais au moins les choses seront claires.

    Bachir Karim

    18 h 23, le 14 octobre 2020

  • Ne vous pressez surtout pas, vous avez encore les 3 prochaines elections presidentielles americaines devant vous ! hahahahahaha..

    LeRougeEtLeNoir

    17 h 40, le 14 octobre 2020

  • Je ne comprends ce qui a piqué Saad Hariri pour agir de la sorte et mettre la charrue avant les boeufs. C'est certainement anticonstitutionnel, c'est d'un amateurisme effrayant. De plus il a ouvert la voie par son action au marchandage, des pressions et des blocages habituels. De toute façon lui comme les autres doivent faire leur mea-culpa rendre l'argent volé et pillé, disparaître de la scène politique pendant quelques années car plus personne parmi eux n'inspire confiance il sont juste l'image de la corruption organisée par un système mafieux. Si le monde veut aider le Liban il n'a qu'à imposer des sanctions sévères contre eux ne leur laissant aucun répit, ce serait logique et normal ... mais la politique et le normal ne font pas toujours bon ménage car il faut des compromis et des compromissions pour naviguer dans les eaux troubles du pouvoir.

    Zeidan

    14 h 58, le 14 octobre 2020

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