
Le président de la République libanaise Michel Aoun. Photo d'archives Ani
Le président libanais Michel Aoun a fixé au jeudi 15 octobre les consultations parlementaires contraignantes devant mener à la désignation d'un nouveau Premier ministre, chargé de former le nouveau gouvernement. Le processus de formation d'un cabinet succédant à celui de Hassane Diab est à l'arrêt depuis la récusation de Moustapha Adib, le 26 septembre dernier, près d'un mois après sa désignation.
Selon le programme de ces consultations, publié par le bureau de presse de la présidence, le chef de l'Etat commencera par recevoir, à partir de 9h, les anciens Premiers ministres Nagib Mikati, Saad Hariri et Tammam Salam. Il se réunira ensuite avec le vice-président de la Chambre, Elie Ferzli, avant de s'entretenir avec les blocs du Futur (de M. Hariri), du Hezbollah, le groupe parlementaire "National" (comprenant notamment le député Marada Tony Frangié), celui du Parti socialiste progressiste (du leader druze Walid Joumblatt), le bloc du "Centre indépendant" de M. Mikati, le bloc du Parti social nationaliste syrien, la Rencontre consultative (des députés sunnites prosyriens), le bloc des Forces libanaises, neuf députés indépendants, le bloc aouniste, les députés arméniens, la "Garantie de la montagne", et le bloc Amal (du président de la Chambre, Nabih Berry). Ce programme de consultations devrait se terminer vers 13h30.
Selon des informations rapportées par notre correspondante à Baabda, Hoda Chédid, le président Aoun a contacté le chef du Parlement, Nabih Berry, pour l'informer de la date des consultations. Le chef de l'Etat ne rencontrera aucun responsable ou formation politique avant ces consultations, mais se contentera éventuellement de quelques appels téléphoniques, précise notre correspondante.
Les sources citées par Mme Chédid affirment en outre que la convocation des consultations n'a pas pour but de "relancer l'initiative française", mais est "une obligation" du chef de l'Etat, qu'il a respectée "dans l'intérêt du pays et sans influence extérieure". Selon ces sources, la présidence estime que le délai accordé d'ici la semaine prochaine aux différents blocs est "suffisant" pour qu'ils parviennent à nommer la personnalité sunnite qui sera chargée de former le cabinet. La récusation de Moustapha Adib "sert de leçon aux groupes parlementaires pour faciliter la mise sur pied de l'équipe ministérielle", ajoutent ces sources. "L'initiative française, dans son axe politique, a été affectée, mais l'axe économique reste encore d'actualité", rapporte encore Mme Chédid du palais de Baabda. "Le président n'envisage pas de renflouer le gouvernement sortant", concluent ces sources.
"Personnes fortes ou normales"
Peu après l'annonce de ces consultations, le président Aoun a écrit sur son compte Twitter personnel que "l'Etat fort peut être gouverné par des personnes fortes ou normales, mais qui respectent la Constitution et respectent les lois. C'est en cela que se renforce l'Etat. Un Etat faible, gouverné par des personnes fortes mais qui n'accordent pas d'importance à la Constitution et ignorent les lois, deviendra encore plus faible". Le contexte de ce tweet n'était pas clair dans l'immédiat.
Moustapha Adib, désigné fin août pour former un gouvernement de "mission", réclamé notamment par Paris, avait jeté l'éponge le 26 septembre, faute de consensus entre les partis politiques, après des semaines de tractations avec les différentes formations, notamment en raison des revendications du tandem chiite, qui souhaite nommer ses propres ministres et conserver le portefeuille des Finances. M. Adib devait former un cabinet chargé de mettre en place des réformes indispensables au déblocage d'une aide internationale dans un délai de deux semaines, annoncé par le président français Emmanuel Macron lors de sa visite début septembre au Liban. M. Macron avait accordé un délai supplémentaire de "quatre à six semaines" pour former ce gouvernement, évoquant une "dernière chance".
Aujourd'hui, les obstacles sont toujours présents concernant la recherche d’un Premier ministre qui puisse obtenir l’aval de la majorité des groupes parlementaires, tout étant assez représentatif de sa communauté, ce qui réduit drastiquement les choix. Pour l’heure deux noms émergent du lot, à savoir les deux ex-Premiers ministres Saad Hariri et Nagib Mikati, même s’ils persistent tous deux à affirmer qu’ils ne sont pas candidats.
Le gouvernement de Hassane Diab avait démissionné le 10 août, six jours après la double explosion du port de Beyrouth, qui a fait plus de 200 morts et 6.500 blessés.
Commentant également la question de la formation du gouvernement, le secrétaire général adjoint du Hezbollah, le cheikh Naïm Kassem, a estimé que "l'heure n'est pas à un changement du rapport de force". Quant aux évêques maronites, ils se sont dit "exaspérés par les petits jeux politiques" des responsables. Le leader druze Walid Joumblatt, chef du Parti socialiste progressiste, a pour sa part rappelé que "la convocation faite par le président de la République à des consultations figure au cœur de la Constitution". "Les députés doivent sortir le pays du vide", a exhorté M. Joumblatt, lors d'une intervention sur la chaîne télévisée OTV, affiliée au Courant patriotique libre fondé par le président Aoun.
L'ancien Premier ministre Najib Mikati a de son côté estimé mercredi que "la proposition de former un gouvernement technopolitique dirigé par le Premier ministre Saad Hariri est une opportunité pour sauver le pays, et c'est une proposition constitutionnelle et logique"."Toute personne qui connaît la réalité politique sait qu'il est nécessaire de combiner politique et technocrates, a-t-il ajouté. L'initiative française était basée sur la formation d'un gouvernement de spécialistes afin de mener les réformes nécessaires, et cet objectif est maintenu dans la proposition que M. Hariri préside un gouvernement" technopolitique. Interrogé sur la possibilité qu'il y ait un nouveau gouvernement dans la situation actuelle il répondu : "le gouvernement sera formé, mais les conditions sont-elles réunies pour qu'il réussisse ? J'en doute".
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20 h 04, le 08 octobre 2020