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Moyen-Orient - Libertés

Les réseaux sociaux sous contrôle accru à la faveur d’une nouvelle loi en Turquie

En 2019, Ankara a bloqué l’accès à 408 000 sites, 40 000 tweets, 10 000 vidéos YouTube et 6 200 partages sur Facebook.

Les réseaux sociaux sous contrôle accru à la faveur d’une nouvelle loi en Turquie

Début juillet, le président turc Recep Tayyip Erdogan avait appelé à « mettre de l’ordre » dans les réseaux sociaux. Ozan Kose/AFP

Une loi renforçant considérablement le contrôle des autorités sur les réseaux sociaux est entrée hier en vigueur en Turquie, menaçant la présence de Twitter et de Facebook dans le pays s’ils n’obéissent pas aux demandes de retrait de contenus litigieux. La loi a été votée en juillet, moins d’un mois après que le président Recep Tayyip Erdogan a appelé à « mettre de l’ordre » dans les réseaux sociaux, l’un des derniers espaces d’expression à échapper au contrôle du gouvernement.

« La loi suscite de nombreuses inquiétudes concernant les droits humains », a commenté sur Twitter Iain Levine, responsable du département des droits humains de Facebook. Les défenseurs des droits doutent cependant que le gouvernement puisse appliquer les mesures strictes prévues par la loi. « Il est impossible dans un pays comme la Turquie de supprimer les réseaux sociaux qui font tellement partie de la vie des gens », estime Emma Sinclair-Webb, directrice de Human Rights Watch en Turquie.

Selon la nouvelle législation, les réseaux sociaux avec plus d’un million de connexions uniques par jour, comme Twitter et Facebook, devront avoir un représentant en Turquie et obéir aux tribunaux demandant le retrait de certains contenus sous 48 heures.

« Le 1er octobre est la date limite pour les réseaux sociaux pour désigner un représentant en Turquie », a expliqué Yaman Akdeniz, professeur de droit à l’Université Bilgi d’Istanbul, sur son compte Twitter. En cas de non-respect de cette obligation, les plates-formes recevront d’abord un avertissement. À partir de novembre, elles devront faire face à des amendes pouvant aller jusqu’à 30 millions de livres turques (3,3 millions d’euros), une interdiction d’avoir des revenus publicitaires et une forte réduction de leur bande passante.

Supprimer Twitter

Même si son compte Twitter

@RTErdogan compte 16,7 millions d’abonnés, le président turc ne cache pas son aversion pour les réseaux sociaux, qu’il avait menacés de supprimer en 2014. La même année, Ankara avait bloqué l’accès à Twitter et à YouTube après la diffusion d’enregistrements d’écoutes téléphoniques mettant M. Erdogan en cause dans un supposé scandale de corruption. « L’objectif de la loi est de menacer les réseaux sociaux en leur imposant l’obéissance ou la mort », estime Mme Sinclair-Webb. La Turquie figurait au premier semestre 2019 en tête des pays demandant le retrait de contenus de Twitter, avec plus de 6 000 requêtes.

En 2019, la Turquie a bloqué l’accès à 408 000 sites, 40 000 tweets, 10 000 vidéos YouTube et 6 200 partages sur Facebook, selon Sevket Uyanik, défenseur des droits en ligne. « Imaginez ce qui pourrait arriver après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi », s’alarme-t-il.

Museler la contestation

Twitter n’a pas répondu aux questions de l’AFP sur la suite qu’il entend donner à la nouvelle loi turque. Le chef de l’État turc avait déjà qualifié Twitter de « menace », estimant que le réseau social avait facilité la mobilisation pour les manifestations antigouvernementales de 2013. De nombreux Turcs, en particulier des jeunes, comptent sur les réseaux sociaux pour avoir accès à des informations indépendantes ou critiques, dans un paysage dominé par les médias progouvernementaux. « On ne voit pas beaucoup d’infos sur la violence contre les femmes à la télévision, estime Ayse Nur Akyuz, modèle et “influenceuse”, avec 47 000 abonnés sur Instagram. Mais les infos sur les féminicides se répandent en cinq minutes sur les réseaux sociaux. »

« Les restrictions récentes visent à museler la contestation et à bloquer le flux d’informations », affirme Mme Sinclair-Webb.

Twitter et Facebook sont déjà étroitement surveillés par le gouvernement et de nombreux procès pour « insulte au chef de l’État » ou « propagande terroriste » ont été intentés sur la base de simples tweets.

Début juillet, le président turc avait appelé à « mettre de l’ordre » dans les réseaux sociaux après que sa fille et son gendre ont été visés par des injures sur Twitter. « Vous voyez pourquoi nous sommes contre les réseaux sociaux comme YouTube, Twitter et Netflix ? Pour supprimer ces immoralités », avait-il affirmé.

Mais les partisans du gouvernement se servent aussi massivement des réseaux sociaux, d’autant que les rassemblements sont interdits dans le cadre des restrictions liées au Covid-19, souligne Mme Sinclair-Webb. « Fermer les réseaux sociaux ne sera pas une décision populaire, affirme-t-elle. Si le gouvernement applique vraiment cette loi, il se tire une balle dans le pied. »

Source : AFP

Une loi renforçant considérablement le contrôle des autorités sur les réseaux sociaux est entrée hier en vigueur en Turquie, menaçant la présence de Twitter et de Facebook dans le pays s’ils n’obéissent pas aux demandes de retrait de contenus litigieux. La loi a été votée en juillet, moins d’un mois après que le président Recep Tayyip Erdogan a appelé à « mettre de...

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