
Vue sur les décombres du port de Beyrouth, le 11 août 2020. Photo AFP / -
La présence dans le port de Beyrouth des 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium qui ont provoqué, selon les explications officielles, les explosions qui ont dévasté Beyrouth la semaine dernière, avait fait l'objet, il y a quatre ans, d'une mise en garde d'un consultant américain travaillant pour l'armée américaine, selon un câble diplomatique des Etats-Unis. Ce câble, dont le New York Times a pris connaissance, fait état d'une mise en garde lancé par un expert en sécurité portuaire américain lors d'une inspection dans le port de Beyrouth.
L'information a été diffusée alors que l'agence Reuters rapportait mardi que les autorités libanaises avaient été tenues au courant fin juillet de la présence du nitrate d'ammonium dans le port via un rapport envoyé par la Sécurité de l'Etat.
Le câble diplomatique, marqué "déclassifié mais sensible", a été rédigé vendredi dernier par l'ambassade des Etats-Unis au Liban, trois jours après la déflagration qui a fait 171 morts, selon un dernier bilan provisoire et blessé plus de 6.000 personnes. Ce document établit la liste de tous les responsables libanais qui étaient au courant de la présence de nitrate d'ammonium dans le port. Il établit ensuite qu'un consultant américain engagé par l'armée des Etats-Unis avait repéré ces produits chimiques lors d'une inspection non officielle et avait fait part de ces craintes concernant le stockage dangereux de ces matières aux autorités portuaires. Il n'est ensuite pas précisé, dans le document, si l'expert a fait part de ses conclusions à la hiérarchie américaine. Mais selon des responsables, anciens et actuels ayant travaillé au Moyen-Orient, l'entrepreneur a en principe dû établir un rapport, adressé aux personnes pour lesquelles il travaillait sous contrat, à savoir l'ambassade américaine ou le Pentagone.
"Très choquant"
La révélation que Washington ait pu être au courant de l'existence de ces produits chimiques et n'en ait pas averti la communauté internationale a provoqué, selon le NYT, la colère des diplomates occidentaux, affectés par la perte de collègues dans la déflagration du 4 août. L'épouse de l'ambassadeur néerlandais à Beyrouth a succombé à ses blessures après les explosions, une diplomate allemande a également perdu la vie, a confirmé Berlin, et de nombreux diplomates ont été blessés lorsque leurs domiciles beyrouthins ont été soufflés.
"Si cette information était confirmée, ce serait très choquant", a déclaré au NYT un diplomate occidental qui n'a pas souhaité être nommé et dont l'appartement a été endommagé par l'explosion.
Les diplomates estiment toutefois que Washington n'aurait pas pu faire grand chose pour assurer le déplacement des produits, rappelant que les autorités libanaises étaient au courant de la présence du nitrate d'ammonium mais que rien n'avait été concrètement fait pour s'en débarrasser.
Un haut-responsable du département d'Etat américain a toutefois nié que les autorités US aient été informées de ces découvertes de l'expert. S'exprimant sous couvert de l'anonymat, ce haut-fonctionnaire a estimé que l'entrepreneur a "effectué une visite non-officielle dans le port de Beyrouth il y a quatre ans, quand il n'était pas encore employé par le gouvernement ou le département d'Etat". De ce fait, la diplomatie américaine n'avait aucune trace d'un rapport éventuel de l'expert sur la présence du nitrate d'ammonium.
Il convient de souligner que l'ambassade des Etats-Unis est située à Aoukar, en dehors de Beyrouth, depuis l'attentat en 1983 contre le siège de la représentation diplomatique, alors situé dans la capitale, qui avait tué une soixantaine de personnes.
Munitions
Le document envoyé par l'ambassade américaine au Liban exprime par ailleurs des doutes concernant l'explication des autorités libanaises sur la cause de l'incendie qui a fait exploser le nitrate d'ammonium. L'explication officielle fait état de la présence de feux d'artifice qui auraient pris feu, mais le câble soulève la possibilité de l'existence d'un stock de munitions, qui aurait créé un incendie assez puissant pour faire exploser les produits chimiques à proximité.
Au cours du week-end, le secrétaire américain à la Défense a évoqué la possibilité d'une "cargaison d'armes du Hezbollah qui aurait explosé". Cela avait été démenti par le secrétaire général du parti chiite, Hassan Nasrallah, qui a affirmé vendredi n'avoir "aucune cache d'armes, aucune munition dans le port". Des diplomates occidentaux ont d'ailleurs estimé que le Hezbollah, qui utilise généralement des routes terrestres pour le déplacement de ses armes et non le port, n'aurait pas conservé de manière aussi imprudente du nitrate d'ammonium qu'il aurait stocké pour ses propres intérêts.
*Cet article a été modifié à 13h16
La présence dans le port de Beyrouth des 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium qui ont provoqué, selon les explications officielles, les explosions qui ont dévasté Beyrouth la semaine dernière, avait fait l'objet, il y a quatre ans, d'une mise en garde d'un consultant américain travaillant pour l'armée américaine, selon un câble diplomatique des Etats-Unis. Ce câble, dont le New York...
commentaires (6)
Sur ce, on déduit que le Liban ne sera sauvé que par les libanais. Assez rejeter la faute sur x et y ils le sont tous et en premier lieu nous citoyens de leur avoir allongé la laisse pour qu’ils viennent mordre dans notre chair. 30 ans de descente en enfer, 30 ans de perdus de notre vie et 100 ans de rétrogradation de celle de nos enfants n’ont pas suffit à mobiliser les quelques 5 millions de libanais de descendre dans la rue pour sauver le pays de nos ancêtres et celui de nos enfants et les juger et les enfermer dans les prisons les plus délabrées pour avoir osé profiter de notre traumatisme de guerre pour nous achever.
Sissi zayyat
14 h 19, le 12 août 2020