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Politique - Parution

Le mandat Amine Gemayel, une « aventure de sauvetage » loin des concessions

L’ancien chef de l’État a publié ses Mémoires intitulés « La présidence résistante ».

Le mandat Amine Gemayel, une « aventure de sauvetage » loin des concessions

De gauche à droite : Georges Ghanem, Amine Gemayel, lie Salem et Marwan Hamadé. Photo Michel Sayegh

« Que veut dire souveraineté ? Le Liban doit la soumettre à la Syrie. Nous voulons tisser une alliance stratégique à long terme et avoir notre mot à dire concernant les dirigeants du Liban. Quant à l’armée syrienne, vous devez comprendre que sa présence est permanente. Vous êtes conscients que la patrie libanaise n’a jamais vraiment existé. Elle est l’une des conséquences de la colonisation et il est temps d’en finir. » C’est en ces termes que Farouk Chareh, ministre syrien des Affaires étrangères sous Hafez el-Assad, définissait (en 1987) devant son homologue libanais, Élie Salem, les « convoitises » de la Syrie au Liban, pour reprendre les termes de notre collègue Georges Ghanem qui a animé hier une table ronde portant sur les Mémoires du président Amine Gemayel intitulés La présidence résistante. Le débat s’est déroulé à la Maison du Futur, à Bickfaya.

À l’ouverture du débat, le président Gemayel a indiqué que son mandat, qu’il a considéré comme une « aventure de sauvetage », a été placé sous le signe de trois négations. « J’ai dit “non” à la soumission à la Syrie, j’ai affronté Assad à Damas et j’ai fait échec à l’accord tripartite (conclu le 28 décembre 1985 entre Walid Joumblatt, représentant le Parti socialiste progressiste, Nabih Berry, représentant le mouvement Amal, et Élie Hobeika, délégué par les Forces libanaises), le 13 janvier 1986, parce que je considérais qu’il allait à l’encontre de la souveraineté du Liban », a déclaré M. Gemayel. « Jai dit “non” aussi à l’implantation des réfugiés palestiniens, précise-t-il. J’ai plaidé pour l’annulation de l’accord du Caire (de 1969, autorisant l’OLP à affronter Israël à partir du territoire libanais). C’est en mai 1987 que le Parlement a annulé l’accord », comme il l’a rappelé, soulignant qu’il a fait face en outre aux convoitises israéliennes. « J’ai dit “non” à l’accord du 17 mai 1983 (perçu comme un accord de paix avec Israël). J’ai fait échec à cet accord car il n’assurait pas la souveraineté au vu de la position israélienne », a lancé Amine Gemayel. Il faisait ainsi allusion au lien que l’État hébreu avait établi entre son retrait du Liban et celui des troupes syriennes, sachant que la Syrie n’était pas signataire de l’accord.

Homme de dialogue…
Amine Gemayel, c’est aussi celui qui, en dépit du contexte dans lequel est intervenue son élection, a pu former « un gouvernement indépendant à 100 % et qui a œuvré pour la réconciliation nationale ainsi qu’un cabinet d’union nationale (dirigé par Rachid Karamé) », comme il l’a souligné, rappelant qu’il a tenu des dialogues nationaux, dont personne ne s’est absenté, dans une allusion au président Michel Aoun qui a organisé jeudi dernier une séance de dialogue largement boycottée par l’opposition.

Outre son combat pour la préservation de la souveraineté, Amine Gemayel s’est surtout distingué par ses efforts de communication et de dialogue. C’est ce souvenir que Marwan Hamadé garde des années 1982-1988. « C’est Amine Gemayel qui a œuvré pour une réconciliation entre Walid Joumblatt, l’émir Majid Arslane et Mohammad Abou Chacra, alors cheikh Akl druze », a-t-il raconté. Conscient de cette aptitude au dialogue, le leader joumblattiste a vraisemblablement modifié sa prise de position à l’égard de l’ancien président. « Avant la présidentielle de 1982 et lors d’une réunion avec Philip Habib, émissaire du président américain Ronald Reagan, M. Joumblatt a demandé de remplacer Bachir (donné favori) par son frère Amine ou Camille Chamoun, également ancien président de la République, Bachir étant appelé à faire partie du gouvernement. Mais après l’assassinat de Bachir, nous avons compris que son frère lui succédera. Et il s’est avéré que la communication avec lui était facile. Preuve en est, il a rencontré Walid Joumblatt à la faveur d’efforts menés par Ghassan Tuéni, ancien PDG d’an-Nahar et proche collaborateur de M. Gemayel. Le leader joumblattiste a ensuite tenu à se réunir avec Camille Chamoun et le Amid (du Bloc national) Raymond Eddé, selon le député du Chouf.

Et comme pour mettre les points sur les i une bonne fois pour toutes, M. Hamadé a assuré que l’ancien chef de l’État n’était pas responsable de la guerre de la Montagne. Un conflit sanglant avait opposé chrétiens et druzes en 1983. « Syriens et Palestiniens alimentaient les discordes entre Libanais », a affirmé Marwan Hamadé, faisant savoir qu’Amine Gemayel avait prôné un déploiement de l’armée dans la Montagne sous le commandement d’un officier druze chamouniste, Mahmoud Abou Dargham. M. Hamadé a en outre souligné que c’est le président Amine Gemayel qui a fait échec à l’accord du 17 Mai.

L’impasse
On ne peut évoquer le sexennat Gemayel sans revenir sur l’impasse constitutionnelle à la fin de son mandat et la désignation de Michel Aoun à la tête d’un cabinet de transition. « Avant la dernière réunion avec Assad, les Américains avaient mis en garde contre l’élection de Raymond Eddé, Sleiman Frangié et Michel Aoun, soulignant que ce dernier se prenait à leurs yeux pour Bonaparte », a ajouté Marwan Hamadé avec humour. Cette impasse, c’est ce dont se souvient le mieux Amr Moussa du mandat Gemayel. « La dernière nuit d’Amine Gemayel à Baabda est une véritable leçon parce qu’il était soucieux de préserver la paix et la stabilité du pays après son mandat », a-t-il expliqué.

Quant à Élie Salem, il a indiqué que M. Gemayel lui avait indiqué dès le premier jour qu’il excluait totalement un accord de paix avec Israël et qu’il s’était fixé comme objectif d’obtenir successivement le retrait israélien puis le retrait syrien, la dissolution des milices et l’édification d’un État.

« Que veut dire souveraineté ? Le Liban doit la soumettre à la Syrie. Nous voulons tisser une alliance stratégique à long terme et avoir notre mot à dire concernant les dirigeants du Liban. Quant à l’armée syrienne, vous devez comprendre que sa présence est permanente. Vous êtes conscients que la patrie libanaise n’a jamais vraiment existé. Elle est l’une des conséquences...

commentaires (8)

L'accord du 17 mai était un bon accord, c'est évident, mais il fallait avoir de la vision et une bonne dose de courage, pour ne pas dire autre chose, pour se faire, était-ce le cas du président d'alors? Acheter des armes aux USA pour un milliard, ça c'est facile et de les payer cash encore plus! Le gouvernement américain aurait prêté les sous à l'époque à taux zéro ou même aurait offert les dites armes si on lui faisait comprendre que cela était dans son intérêt. Enfin, c'est sous le mandat d'Amine Gemayel que la grande dévaluation de la livre a eu lieu! On a la mémoire courte, 4,25 LL/$, puis 8, puis 50 et puis 1’500. ça c'est de la dévaluation! De 1’500 à 8-9'000 et bientôt plus avec la bénédiction du Hezbollah, cela reste de la gnognote!..... On a les gouvernants que l’on mérite !

TrucMuche

15 h 51, le 27 juin 2020

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Commentaires (8)

  • L'accord du 17 mai était un bon accord, c'est évident, mais il fallait avoir de la vision et une bonne dose de courage, pour ne pas dire autre chose, pour se faire, était-ce le cas du président d'alors? Acheter des armes aux USA pour un milliard, ça c'est facile et de les payer cash encore plus! Le gouvernement américain aurait prêté les sous à l'époque à taux zéro ou même aurait offert les dites armes si on lui faisait comprendre que cela était dans son intérêt. Enfin, c'est sous le mandat d'Amine Gemayel que la grande dévaluation de la livre a eu lieu! On a la mémoire courte, 4,25 LL/$, puis 8, puis 50 et puis 1’500. ça c'est de la dévaluation! De 1’500 à 8-9'000 et bientôt plus avec la bénédiction du Hezbollah, cela reste de la gnognote!..... On a les gouvernants que l’on mérite !

    TrucMuche

    15 h 51, le 27 juin 2020

  • Ce fut un erreur historique de ne pas signer l'accord du 17 mai 1983.

    Nicolas Rubeiz

    13 h 32, le 27 juin 2020

  • TOUT DEPEND COMMENT ON LIT LES CHOSES ET COMMENT ON LES COMPREND.

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 08, le 27 juin 2020

  • Lisez « le Mandat Amine Gemayel » de la collection « le Memorial du Liban » de Joseph G. CHAMI. Tous les événements du mandat y sont rapportés chronologiquement et objectivement, fait par fait.

    Claude Ghazal

    10 h 10, le 27 juin 2020

  • Le Président Amine Gemayel a été le dernier Grand Président Indépendant du Liban.

    Lecteur excédé par la censure

    09 h 51, le 27 juin 2020

  • Donc un livre est paru mais on ne sait pas chez quel éditeur, on ne sait pas dans quelle langue il est écrit et on ne voit pas sa couv. A la place, on voit une brochette de conférenciers qui causent et dont les propos sont rapportés de manière décousue.

    Marionet

    09 h 18, le 27 juin 2020

  • Le bilan du mandat Gemayel a sabs doute été, jusqu'au mandat actuel, le plus catastrophique de l'histoire du Liban. Ayant obtenu le pouvoir sous la promesse de poursuivre l'oeuvre de son frère, il a fait exactement l'inverse, et dans tous les domaines. Il faut vraiment soumettre l'histoire a une torture pire que celle dont sont victimes actuellement les manifestants anti-pouvoir pour lui faire dire le contraire.

    Yves Prevost

    07 h 14, le 27 juin 2020

  • Assad etait a terre il fallait l'achever..il a laisse tomber son atout maitre Israel et s'est completement fait ratiboiser par un Assad revanchard bien que l'essentiel ait ete sauve par l'eviction du traitre Hobeika Je persiste et signe que l'accord du 17 Mai aurait fait du Liban un eldorado et aurait ete precurseur car venant apres Camp David et suivi plus tard par la Jordanie, les pays du Golfe, le Maroc bref tous les arabes qui comptent. La cerise sur le gateau c'etait de nous laisser Iznigoud sous les bras en 1988. Amine aura ete celui qui a perdu au Poker malgre un carre d'as en mains laisse par un frere d'une toute autre trempe.

    Liban Libre

    00 h 51, le 27 juin 2020

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