Rechercher
Rechercher

Économie - Devises

Toujours pas d’amélioration en vue sur le marché des changes

Les autorités semblent incapables de contrôler le taux livre/dollar.

Toujours pas d’amélioration en vue sur le marché des changes

L’enseigne d’un agent de change à Jounieh. Photo P.H.B.

Jusqu’où se poursuivra la chute de la livre sur le marché des changes ? C’est sans doute la question que se posent depuis maintenant des mois la majorité des Libanais en général et des agents économiques du pays en particulier, tandis que la monnaie nationale se déprécie dans des proportions inimaginables il y a moins d’un an, sur fond de grave crise économique et financière.

Malgré l’ambition affichée des autorités et de la Banque du Liban, il y a environ deux semaines, de mettre au pas les agents de change, agréés et illégaux, le taux livre/dollar a poursuivi hier son irrésistible ascension sur le marché noir, avec des taux de 6 300 livres le dollar à l’achat et 6 500 livres à la vente, selon le site Lebanseslira.org, en hausse de 200 livres par rapport à la veille. Pour rappel, ces taux gravitaient encore autour de 5 000 livres le dollar au milieu du mois, tandis que la parité officielle de 1 507,5 livres pour un dollar, officiellement maintenue depuis 1997, ne s’applique plus que pour une palette limitée de transactions bancaires.

La situation n’est guère plus réjouissante du côté des agents agréés. Officiellement, ces derniers sont tenus de respecter le taux fixé quotidiennement par leur syndicat, conformément à une procédure lancée en coordination avec les autorités au début du mois et reconfirmée le 12 juin à l’issue d’un Conseil des ministres exceptionnel consacré aux moyens de stabiliser la livre sur le marché. Si le taux à l’achat était encore de 3 850 livres le dollar, contre 3 900 à la vente hier, un niveau inchangé depuis le 18 juin, rares sont les particuliers ou les entreprises qui parviennent à trouver un bureau disposé à leur vendre des billets verts.

Déséquilibre entre offre et demande

« Il n’y a pour l’instant que les agents de catégorie A (ceux qui peuvent importer et exporter des devises) qui semblent être approvisionnés en dollars par la BDL. Une partie d’entre eux préfèrent fermer leurs portes compte tenu de l’affluence monstre qu’ils sont obligés de gérer une fois ouverts », constate une source proche de la filière. « Les autres bureaux étaient soit fermés, soit ouverts pour ne pas rater un hypothétique client qui viendrait leur vendre ses dollars », ajoute-t-elle. La semaine dernière, de nombreux bureaux avaient été littéralement assiégés par des dizaines de Libanais cherchant à acquérir des devises dans toutes les villes du pays, la BDL ayant annoncé en marge de la réunion du 12 juin qu’elle allait injecter des liquidités sur le marché.

Lire aussi

Achat de devises : des failles majeures dans les conditions imposées par les changeurs

Mais au-delà du franc déséquilibre entre la demande de dollars et les quantités effectivement disponibles sur le marché, les agents de change semblent progressivement prendre leurs distances avec les mesures d’encadrement d’achats de devises mises en place début juin, renforcées lundi dernier et modifiées une nouvelle fois hier. Si la majorité des mesures – que L’Orient-Le Jour a détaillées dans son édition de mardi – sont restées inchangées, le syndicat a néanmoins supprimé la possibilité pour les Libanais de plus de 18 ans d’acheter des devises pour rembourser les prêts contractés hors du secteur bancaire et pour lesquels ils pouvaient échanger contre leurs livres libanaises un maximum de 500 dollars par mois. Le syndicat a en outre précisé que le plafond de 1 000 dollars pouvant être fourni à un client souhaitant payer un billet d’avion s’appliquait pour une seule personne – la somme doit être directement versée par l’agent de change à la société auprès de laquelle le client a acheté son billet.

Réticences

Ces modifications restent cependant dérisoires par rapport aux importantes failles relevées dans cette palette de restrictions et qui risquent, en l’absence d’un assouplissement des restrictions bancaires en vigueur depuis des mois, de faire un peu plus exploser la demande de devises sur le marché noir. Si le texte prévoit par exemple certains plafonds pour qu’une famille puisse acquérir des dollars pour payer les frais universitaires et le loyer d’un enfant étudiant à l’étranger, il n’y a toujours rien de prévu pour permettre aux parents d’envoyer de quoi financer les frais quotidiens de leur progéniture. Le syndicat n’a de plus toujours pas envisagé d’accorder le droit pour les ressortissants étrangers travaillant au Liban d’acquérir légalement des devises.

Ces mesures ont été mises en place en amont du déploiement annoncé par la BDL de « Sayrafa », une application qui a vocation à être utilisée par les agents de change de la filière pour enregistrer toutes les transactions effectuées hors du secteur bancaire. Sa mise en service a été annoncée pour le 23 juin (circulaire n° 5) puis décalée au 26 (selon une source proche de la Banque centrale). Il reste, selon plusieurs témoignages concordants, que les agents de change semblent pour l’instant réticents à se plier aux exigences imposées par leur syndicat qui a fixé pour chaque catégorie de transactions un nombre important de documents justificatifs à fournir qu’ils devront eux-mêmes réclamer et vérifier.

Au-delà de ces considérations de forme, le fait d’avoir confié aux agents de change la mission de restreindre l’accès aux devises sur le marché pose un véritable problème de fond. « Après avoir laissé l’Association des banques du Liban restreindre de façon totalement illégale et informelle l’accès des Libanais à leurs dépôts, les autorités envoient désormais les agents de change au front pour dissimuler leurs propres lacunes en matière de politique économique et de réformes », lâche une source bancaire sous couvert d’anonymat. « L’exécutif et la BDL veulent faire revenir une partie des dollars qui sont sortis du secteur bancaire. Mais il leur sera extrêmement difficile d’y parvenir en restreignant l’accès aux devises sans prendre certaines mesures complémentaires, comme par exemple la suspension totale de l’utilisation des dollars dans les transactions sur le territoire libanais », considère-t-elle.

« État d’urgence financière »

La source pointe également du doigt la résistance de la classe politique à faire adopter une loi de contrôle des capitaux qui réponde aux exigences de la crise actuelle, comme le réclamaient certains banquiers au moment où la dégradation de la situation économique et financière du pays a commencé à s’accélérer, à l’automne dernier, ou encore la BDL, au début de l’année. « Encadrer les entrées et sorties de capitaux aurait été plus prudent et équitable compte tenu de la gravité de la crise de confiance que traverse le pays », regrette-t-elle, avant de souligner que « l’anarchie actuelle creuse un fossé entre les privilégiés qui ont pu cacher leurs devises en profitant du clientélisme ambiant et les citoyens de bonne foi qui ont joué selon les règles ».

Un économiste, souhaitant lui aussi garder l’anonymat, s’interroge pour sa part sur les raisons qui poussent encore la BDL à distribuer des dollars aux agents de change plutôt que de fournir des liquidités aux banques. « Les banques connaissent les besoins de leurs clients et possèdent des départements chargés de vérifier la conformité des transactions. Qu’on le veuille ou non, le système actuel a surtout permis à l’économie informelle et aux ressortissants syriens de siphonner une partie des dollars déposés dans les banques libanaises », relève-t-il.

La détérioration de la situation a en tout cas fait réagir le président du Parlement, Nabih Berry, qui n’est pourtant pas un partisan déclaré du contrôle des capitaux, comme en témoignent de précédentes déclarations qu’il avait faites le 14 avril sur le sujet. Hier, lors d’une réunion urgente des cadres du mouvement Amal, dont il est le chef, M. Berry a estimé que « l’effondrement de la livre face au dollar impose au gouvernement, à la Banque centrale (BDL) et à l’Association des banques du Liban (ABL) de proclamer l’état d’urgence financière ». Il a en outre souligné que les responsables devraient « reconsidérer » les mesures mises en place pour protéger la monnaie nationale, estimant qu’elles avaient permis au marché noir de « prendre les Libanais en otage ».

Jusqu’où se poursuivra la chute de la livre sur le marché des changes ? C’est sans doute la question que se posent depuis maintenant des mois la majorité des Libanais en général et des agents économiques du pays en particulier, tandis que la monnaie nationale se déprécie dans des proportions inimaginables il y a moins d’un an, sur fond de grave crise économique et...

commentaires (9)

Toujours pas d’amélioration en vue sur le marché des changes il n y aura pas tant qu il n y a pas de reformes ne chercher pas

youssef barada

21 h 07, le 26 juin 2020

Tous les commentaires

Commentaires (9)

  • Toujours pas d’amélioration en vue sur le marché des changes il n y aura pas tant qu il n y a pas de reformes ne chercher pas

    youssef barada

    21 h 07, le 26 juin 2020

  • la mafia des changeurs n'a pas peur des autorites, se substitue meme a elle sans fausse "honte", les qqs mafieux arretes vite vite liberes, les voila qui se foutent de notre gueule-pensent ils-en fixant les taux de changes d'un $ introuvable sauf a ce qu'ils ainsi que les connards du gouv appellent "marche Noir". vive les reformes a la sauce aouno-diabolo-nasrallaho-berryiste. PS. notez l'absence de bassil qu'il n'est plus important de citer vu son abnegation et son "REFUS" d'arriver a Baabda ( postuler il ne peut pas ne pas car plus de 90% du peuple le veut la -haut - )

    Gaby SIOUFI

    16 h 28, le 25 juin 2020

  • J’aime votre titre : les autorités sont incapables.... C’est une vérité qu’il est inutile de répéter car les autorités actuelles et passées ont toujours été incapables de faire quoi que ce soit, et pourquoi : parce que tout simplement ce sont des incompétents qui n’ont pensé qu’à s’enrichir grâce à l’argent public en creusant la dette avec la complicité des banquiers notamment le premier d’entre eux, à savoir le gouverneur de la BdL . Des guignols corrompus qui gouvernent une population de moutons suiveurs mais qui sont aujourd’hui affamés

    Lecteur excédé par la censure

    11 h 01, le 25 juin 2020

  • ON L,A DEJA DIT. C,EST L,OFFRE ET LA DEMANDE QUI DECIDENT DES TAUX.

    JE SUIS PARTOUT CENSURE POUR AVOIR BLAMER GEAGEA

    10 h 33, le 25 juin 2020

  • Et nos $ sur les comptes? Ceux que nous avons apporté "frais" il y a 12 ans? En venant s'installer... le syndicat des changeurs en pense quoi? Puisque la BDL et les banques n'ont plus l'air de savoir grand-chose... ils n'ont pas l'air de se rappeler que nous sommes propriétaires de la monnaie qu'ils donnent aux changeurs...

    Sybille S. Hneine

    10 h 29, le 25 juin 2020

  • "... sans prendre certaines mesures complémentaires, comme par exemple la suspension totale de l’utilisation des dollars dans les transactions sur le territoire libanais ..." | Nous y voilà. Adieu nos dépôts en dollars... Bien joué messieurs les Bandits Du Liban (BDL)...

    Gros Gnon

    08 h 58, le 25 juin 2020

  • Une nouvelle mafia de changeurs et affiliés s’installe. Tout comme la mafia des propriétaires des générateurs. Et pourquoi ? Tout simplement parce que l’Etat avec tout son PRESTIGE et toute sa FORCE n’a pas réussi à assurer ces deux services. République bananière dirigée par des guignols avec une monnaie de singe et une population au bord de la famine

    Lecteur excédé par la censure

    08 h 57, le 25 juin 2020

  • C’est le syndicat des changeurs qui règlemente le contrôle des capitaux et des changes maintenant? Mais alors à quoi sert la BDL? Et le ministère des finances?

    Gros Gnon

    03 h 54, le 25 juin 2020

  • continuer à gesticuler, et faire semblant ,pour redresser la livre libanaise il y a un moyen reformer, reformer , reformer et vous aurez de l argent frais , FMI?CEDRE? EXPATRIES, sinon adieux le Liban et la livre avec.....

    youssef barada

    00 h 54, le 25 juin 2020

Retour en haut