Depuis la chute de l’Empire soviétique en décembre 1991, analystes et observateurs avertis ne cessent de relever que l’heure est à la mondialisation et que le monde est devenu un grand village, de plus en plus interconnecté de surcroît – révolution numérique oblige. Certes… Mais cela ne devrait pas empêcher pour autant de s’occuper dans ce « grand village » de son propre quartier, voire de rendre sa résidence agréable à vivre…
À parcourir la fiévreuse histoire tourmentée du Liban, il est stupéfiant de constater à quel point certaines factions libanaises non seulement prêtaient souvent le flanc aux interventions étrangères, mais elles ne percevaient surtout leur pérennité et leurs intérêts qu’à travers leur ancrage à une puissance au-delà des frontières, au détriment de la cohésion nationale, de la « Maison libanaise ». Il est vrai que l’histoire de la plupart des pays dans le monde a été jalonnée de guerres, d’occupations, d’ingérences, de révolutions, de massacres et de conflits fratricides. Mais ces bouleversements aboutissaient en définitive à un équilibre interne, à la mise en place d’un système politique stable, à une adhésion à des valeurs communes fédératrices assurant le bien-être de la population.
Le Liban fait exception sur ce plan, du moins jusqu’à présent, même si le slogan « Liban d’abord » a fait son petit bout de chemin depuis la révolution du Cèdre de 2005 en devenant un leitmotiv transcommunautaire. Pour la première fois depuis la proclamation du Grand Liban, la composante sunnite abandonnait ainsi une ligne de conduite tournée vers l’extérieur, comme cela s’était illustré par sa volonté de rester rattachée à la Syrie, en 1920, ou de suivre la vague nationaliste arabe avec Nasser, à la fin des années 50, ou encore d’accorder la priorité à la solidarité avec les organisations palestiniennes armées implantées au Liban et transformées en mini-État concurrent de l’État central.
Ces allégeances centrifuges sont aujourd’hui dépassées au niveau sunnite, comme le montre plus particulièrement le lourd contentieux avec le régime syrien ; un contentieux qui ne pourra que transformer la perception de la nature des rapports futurs avec la Syrie.
Seule ombre au tableau qui persiste encore (on l’aura deviné…) : l’ancrage aveugle et inconditionnel du Hezbollah aux gardiens de la révolution iraniens. Du fait de sa doctrine politique adoptée au milieu des années 80 du siècle dernier, le parti chiite est devenu aujourd’hui la tête de pont des pasdaran sur les bords de la Méditerranée et la pièce maîtresse du projet des mollahs dans la région. De sorte que toute sa ligne de conduite n’est définie qu’en fonction des impératifs de la stratégie moyen-orientale du pouvoir iranien. Et tant pis pour le bien-être des autres composantes libanaises et pour les intérêts de la toute petite entité que représente pour lui le Liban.
Le problème se pose aujourd’hui avec acuité à la veille de l’entrée en vigueur des sanctions américaines prévues par la loi César votée par le Congrès US à une écrasante majorité, frôlant la quasi-unanimité de la Chambre des représentants et du Sénat, ce qui reflète un aval des deux partis, républicain et démocrate. Dans la logique du Hezbollah, le Liban devrait refuser de se conformer à la législation en question, au risque de s’isoler du système financier international et des pays amis, avec toutes les conséquences que cela entraînerait.
Le parti pro-iranien, fidèle à son alignement sur son mentor, se place à l’instar de Téhéran dans une optique de confrontation totale avec les États-Unis, le monde occidental et les pays arabes alliés au camp de l’Ouest. Il cherche manifestement à entraîner le Liban dans sa folle aventure guerrière, prônant notamment à cette fin un ancrage du pays du Cèdre à la sphère d’influence iranienne et, comme probable conséquence, une remise en cause du système économique libre.
Les événements des derniers jours, plus spécifiquement les actes de vandalisme visant les commerces et les banques à Beyrouth et Tripoli, ainsi que les injustifiables gesticulations miliciennes à Aïn el-Remmané et au centre-ville aux cris de « Chiite, chiite, chiite », sont interprétés par nombre d’observateurs comme autant de « messages » s’inscrivant dans le cadre des pressions exercées sur le pouvoir pour le contraindre à ignorer la loi César. Il en est sans doute de même de la relance de la campagne contre le secteur bancaire et le gouverneur de la Banque centrale Riad Salamé, ou encore – fait inédit – des informations judicieusement fuitées aux médias sur une menace d’attaque terroriste contre l’aéroport.
En clair, la logique du Hezbollah voudrait que l’ensemble du pays sacrifie – sans que nul n’ait son mot à dire – ses relations arabes et internationales, le bien-être et le mode de vie de sa population, ainsi que les impératifs de la réorganisation de la « Maison libanaise », pour servir les desseins des gardiens de la révolution iraniens. S’il s’avère que c’est effectivement le cas, cela signifie que le parti chiite n’a pas su saisir les leçons des épisodes syrien, palestinien et nassérien. Et, surtout, qu’il n’a pas encore bien assimilé toute la dimension de la spécificité libanaise, fondée historiquement sur le ferme attachement aux libertés et l’ouverture sur le monde occidental.
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Le jour où les libanais et libanaises comprendront que seul le Liban doit primer sur toutes les autres revendications et que notre salut consisterait à être avant tout libanais et que même si les nominations des ministres, juges et députés de toutes confessions sont là pour sauver le pays et non le détruire, à ce moment là on peut prétendre à un apaisement social et une unité sacrée. Les libanais n’ont pas de haine ni de ressentiments vis à vis des uns et des autres, les vendus les ont inventé de toute pièce pour diviser et faire croire qu’une religion veut dominer l’autre. Mais non le problème c’est que les représentants de ces religions œuvrent pour des pays étrangers en agitant le chiffon de la discorde confessionnelles aux dépens des citoyens libanais qui doivent pour certains donner leur vie contre une bouchée de pain peu importe la cause défendue. Allez on se réveille et on ouvre bien les yeux pour mettre tous ces pourris dehors et ensemble on amorce la reconstruction de notre pays libre et indépendant de tous les pays qui ne nous veulent pas que du bien.
Sissi zayyat
12 h 17, le 17 juin 2020