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Politique - Rencontre

La priorité de Ghada Chreim : transformer le ministère des Déplacés en celui du Développement rural

La priorité de Ghada Chreim : transformer le ministère des Déplacés en celui du Développement rural

La ministre des Déplacés Ghada Chreim Ata. Photo d’archives AFP

Venue du monde académique (professeur de lettres françaises à l’UL puis directrice de la faculté des lettres et des sciences humaines de l’UL dans la Békaa) et médiatique (elle a supervisé le magazine Faïruz du groupe Dar es-Sayad), la ministre des Déplacés Ghada Chreim (proche du CPL) s’est rapidement familiarisée avec ses dossiers. Discrète avec les médias parce qu’elle ne veut pas faire de déclarations avant d’avoir quelque chose de concret et de palpable à soumettre aux Libanais, elle n’en est pas moins très présente au sein du gouvernement. Elle précise d’ailleurs que ce gouvernement fonctionne réellement comme une équipe. Tout ce qui se dit sur des conflits et des tensions entre les ministres au sein du cabinet est, selon elle, contraire à la réalité. « Nous discutons longuement de chaque sujet évoqué, mais toujours dans un esprit de sérieux, d’ouverture et de respect. Il n’y a aucune tension personnelle entre nous, chacun expose son point de vue et ses arguments et écoute les autres. » « C’est pourquoi, explique-t-elle, les décisions prennent du temps et on nous reproche une certaine lenteur. » Elle ajoute que contrairement à ce qui apparaissait dans les précédents gouvernements où les discussions s’étiraient en longueur seulement quand il n’y avait pas d’accord préalable entre les parties politiques, dans ce cabinet, tout est mis sur la table, rien ne se joue dans les coulisses politiques et c’est pourquoi les débats peuvent paraître longs.

En tant que professeure d’université et journaliste, Ghada Chreim a le contact facile et elle est à l’écoute des autres, surtout des jeunes. Elle suit donc attentivement les développements sur le terrain et sur les réseaux sociaux, tout en ayant mis un bémol, par discrétion, à ses propres activités sur ces réseaux. Elle affirme aujourd’hui comprendre l’impatience des jeunes qui veulent que le gouvernement prenne des décisions concrètes, mais elle précise que, depuis son entrée en fonction, celui-ci n’a reçu que des dossiers épineux à régler, chacun plus urgent que l’autre. « Les ministres travaillent beaucoup, mais ce n’est pas encore assez pour les gens, reconnaît-elle, avant d’ajouter qu’elle est convaincue qu’à partir de maintenant, le rythme de travail du gouvernement va changer. D’abord parce que le président du Conseil et les ministres ont entendu la voix des gens, ensuite parce que la crise du coronavirus est moins aiguë et enfin parce que la situation et les priorités sont plus claires. »

Au sujet du gouvernement, Ghada Chreim confie aussi qu’il y a une harmonie certaine entre les ministres et en particulier entre les femmes ministres, qui travaillent, chacune dans son domaine, avec beaucoup de dévouement.

Dans son ministère, Ghada Chreim espère pouvoir réaliser un pas vers la fermeture totale du dossier des déplacés. Elle pense que ce n’est pas impossible, car l’objectif est clair et il se résume ainsi : il ne devrait plus y avoir de déplacés tant d’années après la fin de la guerre interne. Mais il s’agit de faire un recensement précis et d’informatiser toutes les données pour qu’elles ne puissent plus être modifiées. En général, les cas sont classés en trois catégories : il y a les plus urgents, les cas des familles dont les maisons n’ont pas été restaurées ; les cas des propriétaires qui n’ont pas reçu la totalité du montant ; et les cas où des conflits d’héritage ont suivi le décès des propriétaires initiaux. Comme d’habitude, et comme dans la plupart des domaines, au Liban, les chiffres diffèrent d’une étude à l’autre et pour la ministre, il est impératif de les unifier et de sauvegarder les données une fois pour toutes. Selon elle, pour restaurer les maisons encore détruites et les lieux de culte, il faudrait encore environ 240 milliards de livres libanaises. Toutefois, Ghada Chreim estime qu’avant de solliciter cette somme ou de recourir aux donateurs, il faut avoir un dossier complet et clair.

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Dans ce contexte, elle pense ainsi que le chiffre global pourrait être revu à la baisse. Par exemple, ceux qui ont vendu leur bien-fonds ne peuvent plus réclamer leur part dans les versements du ministère. De même, ceux qui ont encaissé le premier versement (en général l’aide du ministère est de 30 millions de livres libanaises payées en deux versements) et n’ont pas procédé à la restauration ne peuvent pas réclamer le second versement. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles chaque versement devrait, selon elle, être accompagné d’un délai pour la réalisation des travaux. Chreim est toutefois consciente du fait que les sommes versées aujourd’hui ne constituent plus que des miettes face aux besoins réels dans ce climat de crise monétaire et financière. Mais voilà, c’est l’une des raisons pour lesquelles elle estime que ce dossier ne doit plus rester ouvert. Son idée est de transformer le ministère des Déplacés en ministère du Développement rural, d’abord pour fermer la page de la guerre et ensuite parce que la plupart des déplacés appartiennent au monde rural. Il ne doit plus s’agir aujourd’hui de réparer les maisons détruites par la guerre mais d’aider les déplacés à rester dans leurs villages en leur assurant les moyens d’y vivre. Dans ces conditions, l’aide financière qui était accordée aux propriétaires pour restaurer leurs maisons deviendra une contribution pour les aider à rester chez eux. Un peu dans le genre des aides actuellement distribuées aux familles les plus dans le besoin ou comme le nouveau projet pour aider les secteurs agricole et industriel. Qu’importe la forme, pour Mme Chreim, ce qui compte, c’est d’aider les gens, notamment dans les régions rurales. Elle affirme à ce sujet que ce souci figure en bonne place dans l’agenda gouvernemental.

Son objectif est donc de lancer une action concrète qui laissera une trace dans ce ministère. Une fois que son plan sera mis au point avec des chiffres précis, elle fera le tour des responsables et des leaders politiques pour obtenir leur aval. Mais pas avant. Car même si le dossier est au départ politique, puisqu’il est une des séquelles de la guerre, il reste avant tout humain à ses yeux.

Aura-t-elle le temps de réaliser quelque chose, alors que beaucoup de rumeurs circulent sur une démission prochaine du gouvernement ? Ghada Chreim sourit et répond : « Je n’ai pas le sentiment que le président du Conseil pourrait décider facilement de démissionner. En tout cas, nous travaillons comme si nous allions rester en fonctions... »

Venue du monde académique (professeur de lettres françaises à l’UL puis directrice de la faculté des lettres et des sciences humaines de l’UL dans la Békaa) et médiatique (elle a supervisé le magazine Faïruz du groupe Dar es-Sayad), la ministre des Déplacés Ghada Chreim (proche du CPL) s’est rapidement familiarisée avec ses dossiers. Discrète avec les médias parce...

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