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Société - Coronavirus

La contamination de 13 soldats du Tribunal militaire inquiète détenus, magistrats et avocats

Un sit-in a été observé hier pour réclamer la mise en liberté de contestataires emprisonnés au siège de la juridiction, dont neuf ont été relâchés en soirée.

Devant le Tribunal militaire, des proches de contestataires détenus dans le bâtiment ont réclamé hier leur libération. Photo Joao Sousa

La contamination par le coronavirus de 13 soldats servant auprès du Tribunal militaire a provoqué l’effroi parmi les proches de contestataires détenus au tribunal suite aux manifestations qui ont eu lieu fin avril à Tripoli et dans la Békaa. Un sit-in a été observé hier devant le siège du tribunal pour réclamer la remise en liberté des prisonniers au motif que ceux-ci peuvent avoir contracté la maladie en raison de présumés contacts avec les militaires contaminés.

Le danger de la propagation du virus a par ailleurs mobilisé la ministre de la Justice, Marie-Claude Najm, et le bâtonnier de Beyrouth, Melhem Khalaf, qui ont respectivement demandé de soumettre à des tests de dépistage les magistrats en poste au Tribunal militaire et les avocats qui s’y sont rendus récemment. La ministre de la Défense, Zeina Acar, a par ailleurs annoncé que le travail des différents greffes militaires, à l’exception des procédures urgentes, serait suspendu jusqu’au 24 mai. Le virus avait été véhiculé il y a quelques jours par un soldat originaire du Akkar, contaminé par son père, lui-même infecté par un ami rapatrié du Nigeria, qui ne s’était pas conformé aux règles impératives de confinement exigées après tout retour de l’étranger.

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Parmi les dizaines de protestataires qui s’étaient regroupés en matinée devant le Tribunal militaire, Hassan Chamas, membre du bureau exécutif du parti Sabaa. Interrogé par L’Orient-Le Jour, il réclamait « la libération immédiate des détenus ». « Ayant peut-être contracté le coronavirus, leur droit élémentaire est de se faire tester, et le cas échéant se faire soigner. Qui plus est, voilà 12 jours qu’ils sont emprisonnés, alors que la loi n’autorise l’arrestation préventive que pour une période de 48 heures, renouvelable une fois », affirmait-il. Un autre activiste s’est demandé « pourquoi le Tribunal militaire n’adopte pas le système de demande en ligne de mise en liberté afin de compenser la lenteur des procédures causée par les mesures de confinement ». Le comité des avocats volontaires pour la défense des manifestants a par ailleurs réclamé dans un communiqué « l’élargissement des protestataires arrêtés, dont deux mineurs », relevant qu’« aucun mandat d’arrêt n’a été délivré à leur encontre ». Ce comité de soutien a en outre observé que « le délai de 24 heures imparti pour les interrogatoires des juges d’instruction est largement dépassé ». En soirée, le juge d’instruction du Tribunal militaire Marcel Bassil a relâché neuf des détenus.


Devant le Tribunal militaire, des proches de contestataires détenus dans le bâtiment ont réclamé hier leur libération. Photo Joao Sousa

Cas graves

Joint par L’OLJ, le commissaire du gouvernement auprès du Tribunal militaire, Peter Germanos, a déclaré que jusqu’à présent le coronavirus n’a nullement empêché la juridiction de poursuivre son travail, fustigeant les allégations selon lesquelles la procédure judiciaire est ralentie. « De par la nature des actes sur lesquels elle statue (terrorisme, violences contre les forces armées, etc.), la justice militaire est très rapide, voire expéditive. On ne peut donc l’accuser de lenteur », tranche-t-il. « Il n’y a de retard ni dans les interrogatoires ni dans les jugements », martèle M. Germanos, faisant observer que « le nombre de détenus gravite autour de dix seulement ». « Les audiences se déroulent auprès des juges d’instruction qui examinent les cas graves, comme des agressions violentes contre des soldats et officiers qui ont subi de graves préjudices corporels, voire des incapacités permanentes », poursuit-il, citant en outre « des attaques contre des biens-fonds publics ou des véhicules des Forces de sécurité intérieure (FSI) ». « Nous ne voulons pas réprimer la révolution, mais nous ne permettrons pas que la rue devienne incontrôlable. Le mouvement de contestation du 17 octobre lui-même ne l’admettrait pas », martèle M. Germanos.

Le magistrat, ainsi que ses collègues du Tribunal militaire, devront subir aujourd’hui des examens de dépistage (PCR), conformément à une demande faite en ce sens par la ministre de la Justice au ministre de la Santé, Hamad Hassan, en coordination avec le président du Conseil supérieur de la magistrature, Souheil Abboud.

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Quant aux avocats qui s’étaient rendus au siège du Tribunal militaire la semaine dernière, 66 d’entre eux ont passé des tests dimanche à l’hôpital Saint-Georges, en présence du bâtonnier et de membres du conseil de l’ordre des avocats de Beyrouth. Des résultats qui se sont avérés négatifs. Me Élie Bazerli, membre du conseil, a affirmé à L’OLJ que le bâtonnier avait reçu samedi du Tribunal militaire une liste de 30 avocats qui pourraient avoir été contaminés, du fait qu’ils ont pu se trouver à proximité du soldat testé positif mercredi. Me Bazerli indique avoir su grâce au bouche-à-oreille que 36 autres pouvaient avoir été également en contact avec ce soldat ou avec certains de ses camarades infectés. « Nous avons passé la nuit de samedi à dimanche à dénombrer et joindre le maximum d’avocats qui ont récemment fréquenté le tribunal », a-t-il précisé, estimant que « l’ordre de suspendre le travail dans cette juridiction aurait dû être donné dès mercredi, d’autant que de nombreux justiciables ont peut-être été contaminés durant les deux jours suivants, faute d’avoir été avertis ».

La contamination par le coronavirus de 13 soldats servant auprès du Tribunal militaire a provoqué l’effroi parmi les proches de contestataires détenus au tribunal suite aux manifestations qui ont eu lieu fin avril à Tripoli et dans la Békaa. Un sit-in a été observé hier devant le siège du tribunal pour réclamer la remise en liberté des prisonniers au motif que ceux-ci peuvent avoir...

commentaires (1)

De toutes façons, corona ou pas, les manifestants n'ont rien à faire au tribunal militaire. Ce ne sont ni des espions, ni des terrorostes. C’est à la justice civile, de les juger si nécessaire.

Yves Prevost

06 h 50, le 12 mai 2020

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Commentaires (1)

  • De toutes façons, corona ou pas, les manifestants n'ont rien à faire au tribunal militaire. Ce ne sont ni des espions, ni des terrorostes. C’est à la justice civile, de les juger si nécessaire.

    Yves Prevost

    06 h 50, le 12 mai 2020

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