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Économie - Conjoncture

L’IFI prévoit une baisse de 15 % des remises des expatriés du Golfe en 2020

Près de 350 000 Libanais, employés dans les pays de la région, pourraient être impactés.


Vue générale de Dubaï. Photo d’archives AFP

Les effets des mesures de confinement décidées dans le cadre de la lutte contre le nouveau coronavirus (Covid-19), combinés à la baisse prolongée des prix du pétrole, vont provoquer « la première récession des pays de la zone du Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (MENA) depuis trois décennies », a indiqué l’Institut de la finance internationale (IFI) dans un récent rapport. L’organisation rassemble plus de 450 banques et institutions financières à travers le monde. Contacté par L’Orient-Le Jour, son économiste en chef pour la zone MENA, Garbis Iradian, craint que cette conjoncture défavorable ne soit pas sans conséquences pour les travailleurs expatriés dans les pays du Golfe, où sont notamment employés 350 000 Libanais, selon les estimations de Nadim Shehadi, un chercheur spécialisé dans la région MENA du think tank Chatham House basé à Londres.

« Selon nos calculs, le montant total des remises de l’ensemble des expatriés – libanais compris – établis dans les pays du Conseil de coopération du Golfe (Arabie saoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis, Koweït, Qatar, Oman, NDLR) va baisser d’au moins 15 % cette année (…) », affirme Garbis Iradian. « Certains Libanais pourraient même perdre leur emploi et se retrouver obligés de rentrer (au Liban). C’est une crise sans précédent », ajoute-t-il. L’économiste estime enfin que la situation pourrait également être compliquée pour les entreprises libanaises opérant dans ces pays, sans fournir de projection.

Les expatriés libanais dans le Golfe sont à l’origine d’une part conséquente des remises à destination du pays du Cèdre, dont le montant total a gravité ces dernières années autour de 7 milliards de dollars par an (3,8 milliards sur les six premiers mois de 2019 selon les derniers chiffres de la Banque du Liban).


(Pour mémoire : La clientèle du Golfe, grande absente du marché libanais, selon Ramco)

Réformes menacées

L’IFI a anticipé dans son étude que la conjoncture actuelle – coronavirus et effondrement des prix du pétrole en raison de la guerre des prix entre l’Arabie saoudite et la Russie ainsi que la baisse de la demande chinoise –

va provoquer une récession dans la plupart des pays exportateurs de pétrole, et que la croissance des pays importateurs sera la plus basse depuis les années 1990. Dans le détail, elle a chiffré les pertes pour la région à 290 milliards de dollars pour l’année 2020, contre un bénéfice de de 65 milliards de dollars un an plus tôt. Ces pertes devraient contribuer à gonfler les déficits cumulés des pays de la zone à 130 milliards de dollars en 2020, pour un ratio déficit/PIB global passant de 2,9 % à 13 %.

L’organisation a de plus tablé sur une contraction du PIB de la zone en 2020 de 0,5 % au moins (contre une prévision de 2,1 % en janvier avec un prix du baril de pétrole à 60 dollars, alors que celui de mars est calculé en supposant que le prix du baril de pétrole s’établit à 30 dollars). Cette contraction risque d’être plus prononcée pour les pays exportateurs de pétrole (-0,9 % contre 1,6 % selon les prévisions de janvier), et moindre pour les importateurs (0,4 % contre 3,2 %).

Avec le Soudan, le Liban est le seul parmi les pays importateurs de pétrole de la zone MENA (un groupe qui compte également l’Égypte, la Jordanie, le Maroc et la Tunisie) dont le PIB devrait se contracter en 2020. La dernière estimation de l’IFI table sur une baisse du PIB libanais de 12,6 %, un niveau aligné sur celle annoncée vendredi dernier par le ministère des Finances lors de la présentation du gouvernement libanais à l’égard de ses créanciers – le pays a récemment fait défaut sur sa dette publique en devises. La baisse du prix du baril de pétrole contribue directement à cette baisse en impactant les remises des expatriés.

L’IFI prévoit en outre que la richesse des pays du CCG, mesurée par le niveau de leurs réserves et de leur fonds souverain, va diminuer de 400 milliards de dollars en 2020, dont 180 milliards liés aux pertes de ces fonds qui ont investi dans des actions mondiales. Une projection qui se base sur un prix du baril de 30 dollars, un niveau supérieur à celui enregistré depuis quelques semaines (hier le prix du pétrole gravitait entre 20 et 25 dollars le baril dépendamment de son origine). L’organisation prévient enfin que si le prix du baril demeure en dessous de 30 dollars, la richesse de ces pays pourrait totalement s’épuiser d’ici à 2032, s’ils ne continuent pas de réformer leurs économies comme le prévoient les différentes stratégies lancées dans le CCG ces dernières années, à l’image de la « Vision 2030 » de l’Arabie saoudite.

Or, sans la rente pétrolière, « il sera très difficile de mettre en œuvre ne serait-ce que la moitié des objectifs du plan de réforme saoudien (qui vise à diversifier l’économie saoudienne afin de la rendre moins dépendante de l’or noir) », acquiesce Garbis Irabian. Face à la crise, les gouvernements et les banques centrales de certains pays de la zone ont pris des mesures pour tenter de limiter les effets sur la population et l’économie, comme, par exemple, fournir des liquidités aux institutions financières pour aider les entreprises et les PME. L’amplitude de ces plans d’aides varie d’un pays à l’autre, tandis que l’incertitude règne concernant tout autant la fin de mesures de confinement liée à la pandémie, que l’évolution des prix du pétrole à moyen terme.

Les effets des mesures de confinement décidées dans le cadre de la lutte contre le nouveau coronavirus (Covid-19), combinés à la baisse prolongée des prix du pétrole, vont provoquer « la première récession des pays de la zone du Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (MENA) depuis trois décennies », a indiqué l’Institut de la finance internationale (IFI) dans un récent...

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