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Culture - Ces couples confinés

II – Stéphanie Sayar et Charbel Garibeh : Les personnes nous manquent, pas les objets

Inséparables, ensemble « 24h/24 » depuis leur rencontre sur les bancs de l’université il y a une douzaine d’années, ce ne sont pas deux semaines en huis clos qui risquaient de détériorer la formidable complicité de ce duo de designers, ni la belle énergie positive qu’ils dégagent... Ils confient, depuis leur cuisine, leur recette personnelle pour traverser au mieux cette période difficile.

Stéphanie Sayar, connectée à la famille et aux amis, dès le matin, grâce aux appels vidéo. Photo DR

Ils ont eu juste le temps de participer à la Collectible Design Fair de Bruxelles, où était exposée leur toute dernière création, la Willowy Chair (cadre ci-joint), avant que le monde ne bascule dans la pandémie du coronavirus. À leur retour au Liban, le 9 mars, ils se sont spontanément astreints à une quinzaine de jours de confinement, que les mesures gouvernementales sont venues prolonger. Cloîtrés chez eux, Stéphanie Sayar et Charbel Garibeh restent positifs et déterminés à profiter au mieux de cette période de répit dans leur planning surchargé ces deux dernières années, pour s’adonner à de nombreuses choses qu’ils avaient envie d’expérimenter sans jamais en avoir le temps. C’est avec le sourire et cette fraîcheur qui les caractérisent qu’ils ont raconté à L’OLJ, par appel vidéo, leur quotidien au temps du coronavirus.


Plaisirs simples…

Un quotidien placé sous le signe du retour aux plaisirs simples qu’avaient un peu délaissés ces derniers temps les « Sayar & Garibeh » (pour reprendre le sigle qui désigne leurs créations), très sollicités dans les grandes foires et expositions à l’étranger. Leur succès n’a, heureusement, pas entaché leur naturel. C’est au milieu de leur cuisine qu’ils se dévoilent à l’écran. Tablier de boulanger pour lui, simple sweat-shirt pour elle, ils sont en pleine préparation de pain au levain, l’une des principales activités de Charbel depuis le début du confinement. « Cela faisait longtemps que j’avais envie de m’essayer à la fabrication de baguettes et de viennoiseries maison. Maintenant que j’ai du temps libre, je m’y suis mis et le résultat n’est pas mal du tout », indique le jeune homme en brandissant fièrement un gros pain de campagne. Fabriquer son pain et cultiver son jardin, ou plutôt ses herbes et plants de légumes en pots sur le balcon (basilic, tomates, romarin, radis…), voilà les nouvelles activités de ce designer de 31 ans lorsqu’il n’est pas branché sur les sites d’information et de recherches scientifiques.


… et essais de design anticoronavirus

« Il lit tout ce qui se rapporte au Covid-19 et suit à la minute près l’évolution de la pandémie dans le monde. À croire que c’est lui qui est chargé d’en trouver le remède », s’esclaffe, taquine, sa femme. N’empêche, Charbel Garibeh se sent tellement concerné qu’il s’est lancé dans des essais sur son imprimante 3D pour tenter de fabriquer « un élément en plastique, une sorte de valve, nécessaire aux respirateurs et demandée par les hôpitaux », révèle-t-il.

Bien que s’avouant plus « inquiète et plus précautionneuse en matière de mesures sanitaires », Stéphanie, elle, n’est pas collée aux informations. « Je préfère m’évader par la lecture, dit-elle. Je lis en ce moment The Power of Habit, un manuel de psychologie pratique. Je danse aussi et je discute avec les amis sur Skype et WhatsApp. »

D’ailleurs, pandémie oblige, c’est par la connexion sur les réseaux sociaux que débute leur journée. « C’est devenu notre routine matinale, indique la trentenaire. Moi, je rejoins les groupes d’appels vidéo de la famille et des amis, pour m’assurer que tout le monde va bien et faire des “sobhiehs virtuelles”, tandis que Charbel se rue sur les plates-formes d’information. »

« Nous sommes, comme tout le monde, perturbés par ce bouleversement qui s’est abattu soudainement sur l’ensemble des habitants de la planète. Comme on ne peut rien faire d’autre que d’attendre que ça passe, on s’est fixé pour objectif de traverser le plus positivement possible cette période difficile », indique le couple. « Du coup, outre les séquences cuisine et gym quotidiennes pour garder la forme, on alterne entre jeux vidéo, auxquels on devient assez accros, et apprentissage d’une langue étrangère sur l’application Duolingo : italien pour Charbel, allemand pour moi, pour faire travailler nos méninges en s’amusant. Et surtout sans être en compétition. On s’est enfin décidé à attaquer la série des Stars Wars, qui traînait chez nous depuis longtemps et dont on visionne un épisode sur notre ordinateur tous les deux-trois jours, énumère ce couple de créatifs férocement antitélévision. C’est une perte de temps. D’ailleurs, nous n’avons pas de téléviseur à la maison. »


Les amis et la famille avant tout

« Alors qu’on a l’impression de ne rien faire, finalement on s’active pas mal, en ces jours d’attente. » Beaucoup d’activités, mais pas de design cependant dans l’emploi du temps « coronavirusien » de ce duo de concepteurs. « On était en pleine préparation de notre production pour la prochaine édition de House of Today. On a tout mis en veilleuse jusqu’à la sortie de cette crise. En revanche, on réfléchit et on discute beaucoup sur l’avenir de notre domaine de compétence. On se demande si le design de collection va garder le même rythme. S’il va être très impacté par le bouleversement économique que risque d’engendrer au niveau mondial cette épidémie ? S’il faudra envisager d’autres modes de production ? Tout cela nous préoccupe, même si très franchement, en ce moment, ce ne sont absolument pas les objets qui nous manquent, mais les personnes. Les membres de nos familles, nos amis avec qui on avait l’habitude de se réunir quasi quotidiennement. Et qu’on espère retrouver très vite », concluent ces irréductibles optimistes.


Second épisode d’une série d’articles où l’on vous emmène dans le nouveau quotidien d’artistes confinés chez eux ou ailleurs, pour cause de pandémie du coronavirus.


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