Le Liban lance ses premières explorations offshore

Le Liban a donné jeudi le coup d'envoi de ses premières explorations d'hydrocarbures en Méditerranée menées par Total, un jour qualifié d'"historique" par les dirigeants du pays confronté à une grave crise économique.

Le président libanais Michel Aoun et le Premier ministre Hassane Diab ont participé à une cérémonie officielle sur le navire de forage qui a jeté l'ancre à environ 30 km au large des côtes libanaises, au nord de Beyrouth. La durée du forage dans le premier puits d'exploration du bloc 4 est estimée à deux mois.

"Sans aucun doute, les efforts déployés pour les travaux d'exploration ont été très importants", a dit le chef de l'Etat, à bord du navire de forage Tungsten Explorer, accompagné du chef du gouvernement ainsi que du ministre de l'Energie, Raymond Ghajar, du président de l'Autorité libanaise de l'énergie (ALE), Walid Nasr, et d'une délégation de la compagnie Total.

_{De gauche à droite : Hassane Diab, Michel Aoun, Raymond Ghajar et Walid Nasr. Photo Dalati et Nohra.}

"Début historique"
"Mais le plus important aujourd'hui, c'est le travail des compagnies responsables du forage. Nous avons tous collaboré ensemble afin d'extraire ces ressources. C'est pour cela que c'est un jour heureux pour nous et pour tous les Libanais", s'est félicité le président Aoun. "Nous espérons que ce rêve se réalisera. Il s'agit d'une journée historique, car tout début d'un projet grandiose est un début historique", a-t-il ajouté.

Le navire Tungsten Explorer, qui appartient à la société américaine Vantage Drilling, et qui est arrivé mardi au large des côtes libanaises, va effectuer, pour le compte du consortium Total-ENI-Novatek mené par le géant français, les travaux de recherche dans le bloc maritime n° 4 situé au centre de la Zone économique exclusive (ZEE). Selon les normes internationales, celle-ci équivaut au double de la superficie du Liban, soit 22 500 kilomètres carrés. Hier, le président de l'Autorité libanaise de l'énergie (ALE), Walid Nasr avait annoncé que les résultats de ces explorations seront annoncés d'ici au moins quatre mois.

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"Ouvrent une brèche"
Pour sa part, le Premier ministre Hassane Diab a estimé que ces travaux exploratoires "ouvrent une brèche et poussent à plus d'espoir que le Liban sorte de sa crise économique aiguë qui accable les Libanais".  "C'est une journée historique durant laquelle les travaux de forage commencent afin de faire du Liban un pays pétrolier (...)", a-t-il ajouté. "Cette journée sera marquée dans l'histoire et signalera le changement du modèle économique du Liban, jetant des fondations sûres pour les générations à venir", a encore estimé le Premier ministre.

De son côté, le président de l'ALE a passé en revue toutes les étapes du processus qui ont abouti au début des travaux de forage exploratoires. "Le forage débutera dans deux jours pour atteindre une profondeur de 4 100 mètres", a-t-il expliqué, soulignant que ces travaux seront supervisés par l'armée et les forces de l'ordre et que la compagnie Total fournira des rapports quotidiens à l'ALE pour faire le point sur les travaux.

"D'un brouillon gribouillé à un navire de forage qui entame ses travaux en mer aujourd'hui, je me souviens du fil des événements du pétrole sur les dix dernières années, depuis la loi, les décrets, la commission, l'appel d'offre et les contrats, un long périple qui a fait l'objet de la risée et des doutes de certains, mais le rêve est devenu réalité", s'est félicité pour sa part le chef du Courant patriotique libre (CPL) fondé par le président Aoun, Gebran Bassil. "Je souhaite le bonheur à tous les Libanais aujourd'hui, qu'il s'agisse de ceux qui ont déployé leurs efforts pour que l'on arrive à ce stade-là, ou de ceux qui ont mis des bâtons dans les roues, car tout le Liban bénéficiera" des ressources en hydrocarbures, a ajouté l'ancien chef de la diplomatie qui a également occupé le poste de ministre de l'Energie durant plusieurs années. "Le pétrole et le gaz sont des trésors cachés dans notre mer et notre sol et ils seront sans aucun doute découverts. Ce qui compte, c'est que nous les protégions de la corruption interne et des ambitions externes", a conclu M. Bassil.

_{Photo Dalati et Nohra}

Les experts tempèrent l'optimisme
Des travaux de forage sont également prévus dans le bloc 9 mais aucune date n'a été fixée. Les résultats du forage dans le bloc 4 "seront nécessaires pour finaliser la stratégie d'exploration du bloc 9", a récemment indiqué le groupe Total à l'AFP. Une partie du bloc 9 se trouve dans une zone maritime disputée avec Israël, pays avec lequel le Liban est techniquement en état de guerre. Total a toutefois rappelé que les travaux d'exploration prévus seront "situés à l'extérieur de la zone frontalière de dispute".

Beyrouth a lancé en 2019 un deuxième appel d'offres pour l'exploration de cinq nouveaux blocs. Les consortiums internationaux sont invités à déposer leurs offres d'ici avril 2020.

Le pays est confronté à une crise économique sévère qui s'est exacerbée avec le déclenchement en octobre d'un mouvement de contestation inédit contre la classe politique, accusée de corruption et d'incompétence. Les autorités nourrissent de grands espoirs vis-à-vis d'une potentielle découverte d'hydrocarbures, y voyant une manière de relancer l'économie et de répondre aux besoins énergétiques d'un pays surendetté et habitué aux pénuries chroniques de courant. Les experts tempèrent toutefois cet optimisme, rappelant les délais encore longs qui séparent l'étape actuelle de celle de l'extraction, -qui ne sera amorcée que si les quantités découvertes sont suffisantes-, mais aussi la mauvaise gouvernance au Liban et le litige frontalier avec Israël qui concerne certains blocs offshore.

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