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Politique - Hydrocarbures

Début du forage aujourd’hui : Aoun y voit « un jour historique »

En dépit du ton triomphaliste du chef de l’État, le Liban ne serait pas un pays producteur de pétrole avant 2029.


Le président Michel Aoun s’adressant aux Libanais dans son discours hier soir. Photo Dalati et Nohra

Le chef de l’État a sonné du clairon, hier soir, en affirmant que la journée d’aujourd’hui « est historique (…), une journée qui sera longtemps commémorée par le présent et l’avenir du Liban comme le jour où notre pays a fait son entrée officielle dans le cercle des pays pétroliers ».

Dans un message télévisé, M. Aoun n’a mentionné à aucun moment le mouvement de contestation qui secoue le pays, se contentant de reconnaître que le pays traverse la crise économique et financière la plus grave de l’histoire contemporaine du Liban. Arrivé d’Égypte avec quelque retard, le navire Tungsten Explorer, qui appartient à la société américaine Vantage Drilling, doit entamer aujourd’hui le processus de forage d’un puits situé à environ 30 kilomètres de Beyrouth, à la recherche d’hydrocarbures, gaz ou pétrole. Le bateau va effectuer pour le compte du consortium Total-ENI-Novatek, mené par le géant français, les travaux de recherche dans le bloc maritime n° 4 situé au centre de la Zone économique exclusive (ZEE). Selon les normes internationales, celle-ci équivaut au double de la superficie du Liban, soit 22 500 kilomètres carrés.

Les chercheurs vont tout d’abord creuser un premier puits à une profondeur de 1 500 mètres en dessous du niveau de la mer. En un second temps, s’ils ont la main heureuse, ils exploreront des zones de plus de 2 500 mètres de profondeur. Ces opérations vont durer 60 jours avec l’appui de trois autres navires et deux hélicoptères de soutien logistique déjà présents à Beyrouth.

Le discours du chef de l’État a été accueilli avec sobriété par l’ingénieur pétrolier Rabih Yaghi, qui a été conseiller de la commission parlementaire de l’Énergie de 2010 à 2018. Avec réalisme, M. Yaghi a expliqué qu’« il faudra encore neuf ans, c’est-à-dire à l’horizon 2029, pour que le Liban soit vraiment considéré comme pays producteur de pétrole ». Et M. Yaghi de dénoncer la politique de distribution des parts qui a retardé un processus lancé en 2013 et fait en sorte que le Liban commence à peine le forage de son premier puits, alors qu’Israël, qui a lancé son processus vers la même époque, est déjà un pays producteur.


Conflits d’intérêts clientélistes

En effet, le contrat de forage avait été attribué début 2017, après quatre ans de blocage dû à des conflits d’intérêts clientélistes entre les forces politiques en présence. Le dossier était bloqué depuis la démission du gouvernement Mikati en 2013 et l’absence de consensus politique sur la nature de l’institution de pilotage du secteur pétrolier. Finalement adoptés par le gouvernement de Saad Hariri fraîchement formé dans le sillage du compromis présidentiel (2016), les décrets portaient respectivement sur la délimitation des blocs de concession (au nombre de dix) pour l’exploration du gaz offshore du pays et les modalités du contrat devant lier l’État aux concessionnaires. Contre tout bon sens, c’est une Commission nationale pour la gestion des hydrocarbures de six membres qui avait été retenue. Elle comprend, dans le respect de la parité islamo-chrétienne, des représentants des six grandes communautés et est dotée d’une présidence tournante.

« Une aberration, tonne Rabih Yaghi, qui estime qu’une société nationale pour l’exploration des hydrocarbures aurait dû être créée avec des experts compétents et expérimentés aux commandes, ce dont le Liban ne manque pas, plutôt que de répondre aux impératifs de l’équilibre confessionnel ». Et de préciser que la formule retenue « est celle qui prévaut dans les pays arriérés ». « C’est une société comprenant des experts qui aurait dû négocier avec Total », estime-t-il, critiquant dans son élan l’amateurisme et l’incompétence qui ont présidé à la délimitation de la ZEE avec Chypre, en 2007. Ce sont deux fonctionnaires du ministère des Travaux publics qui se sont rendus à Nicosie, faisant fi notamment de l’avis du ministre de la Défense et du commandant de l’armée. Ils ont finalement accepté une délimitation qui s’est avérée préjudiciable pour le Liban, puisqu’elle le prive d’une superficie en triangle de 865 kilomètres carrés, à sa frontière avec l’État hébreu. Le Liban a cherché en vain, depuis, à corriger cette erreur, sachant que l’ONU, en bon bureaucrate, a adopté le plan de délimitation que lui a adressé le gouvernement chypriote, sans revenir là-dessus avec le Liban. Pour cette même raison, le gouvernement n’a toujours pas signé d’accord de délimitation de ses frontières maritimes, ni avec l’État hébreu, ça va de soi, ni avec la Syrie, ni avec Chypre. Pour en revenir au processus d’exploitation, déclenché en 2018 avec la signature du contrat entre l’État et le consortium Total-ENI-Novatek, il doit permettre de confirmer ou non le potentiel du pays en termes de découvertes commercialisables d’hydrocarbures. Mais cette confirmation ne se fera pas avant six mois suivant le début des opérations : 60 jours pour le forage, comme précisé plus haut, et trois ou quatre fois pour l’analyse des résultats. Il faudra en revanche attendre neuf ans avant que le Liban puisse bénéficier de cette éventuelle manne.

Selon M. Yaghi, indépendamment de la certitude qu’il existe en Méditerranée orientale une réserve de gaz estimée à 122 trillions de pieds/cubes, la chance de réussir à trouver des hydrocarbures dès le premier forage est de 1 sur 5. « Le contrat prévoit le forage de deux puits par le consortium, sans obligation d’en creuser un troisième en cas d’insuccès », précise-t-il.

Le chef de l’État a sonné du clairon, hier soir, en affirmant que la journée d’aujourd’hui « est historique (…), une journée qui sera longtemps commémorée par le présent et l’avenir du Liban comme le jour où notre pays a fait son entrée officielle dans le cercle des pays pétroliers ». Dans un message télévisé, M. Aoun n’a mentionné à aucun moment le...

commentaires (19)

Allez vite une stèle à Nahr el Kelb pour ce jour historique sous le règne fort de notre bon père à tous.

Christine KHALIL

23 h 31, le 27 février 2020

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Commentaires (19)

  • Allez vite une stèle à Nahr el Kelb pour ce jour historique sous le règne fort de notre bon père à tous.

    Christine KHALIL

    23 h 31, le 27 février 2020

  • Dans 10 ans le Liban n'existera plus ça sera la continuation de l'Iran Heureusement que je ne serai plus pour voir le désastre

    Eleni Caridopoulou

    17 h 43, le 27 février 2020

  • Le dossier était bloqué depuis la démission du gouvernement Mikati en 2013 et l’absence de consensus politique sur la nature de l’institution de pilotage du secteur pétrolier. NON MADAME LE DOSSIER ETAIT BLOQUE AUSSI PARCEQUE LA CHAMBRE A ETE BLOQUEE DURANT 2 ANS ET DEMI JUSQU'A CE QUE AOUN SOIT ELU PRESIDENT C’est une société comprenant des experts qui aurait dû négocier avec Total », estime-t-il, critiquant dans son élan l’amateurisme et l’incompétence qui ont présidé à la délimitation de la ZEE avec Chypre, en 2007. ENCORE UNE VERITE RARE C'EST BIEN LES DIRIGEANTS QUI ONT RETARDE LE PROJET ET MIS DES INCOMPETENTS AU PILOTAGE DU PROJET POUR SE GARANTIR DES REVENUS MADAME HADDAD VOUS AURIEZ DU SIGNALER LA RENCONTRE ENTRE BERRY ET BASSIL OU LES DEUX SONT SORTI SOURIANT ET ANNONCE QUE L'ACCORD A ETE CONCLU SUR LE SUJET DU PETROLE LIBANAIS PLUS CLAIR QUE CELA COMME CORRUPTION , IL N' Y PAS

    LA VERITE

    14 h 02, le 27 février 2020

  • Encore des mots toujours des mots Les mêmes mots Je n'sais plus comment te dire, Rien que des mots Merci, pas pour moi Mais tu peux bien les offrir à une autre Qui aime le vent et le parfum des roses Moi, les mots tendres enrobés de douceur Se posent sur ma bouche mais jamais sur mon cœur Une parole encore. Parole, parole, parole...

    Jack Gardner

    11 h 57, le 27 février 2020

  • Gaz et petrole + corruption =malediction....il n y a qu a voir le Venezuela.... Ce dont a besoin le Liban,pays peuple de gens talentueux ,c est d un changement de regime ,plus que de petrole ou de gaz.

    HABIBI FRANCAIS

    11 h 49, le 27 février 2020

  • Un grand visionnaire ce PHARE AOUN. Ça désole certains , mais il fait prendre au liban le chemin de la liberté d'agir comme bon lui semble. Respect Général pour nous avoir redonné notre dignité retrouvée.

    FRIK-A-FRAK

    11 h 20, le 27 février 2020

  • Ce président transforme les défaites du pays en en une victoire personnelle l’air satisfait du devoir accompli, ne citant que la perte de 865 km de territoires maritimes la destruction de notre pays sur commande étrangère, le pillage de l’état et l’effondrement de toutes les infrastructures, il espère qu’avec ça son nom serait évoqué dans les livres d’histoire comme un président qui a œuvré pour le salut et la prospérité du pays alors qu’il n’a fait que le tirer vers le bas et le ruiner avec sa bande de truands incompétents. C’est à se demander si le fait sciemment ou si c’est un jeu pour tromper son monde. Dans les deux cas il témoigne d’une naïveté et d’une auto-suffisance qui sont pour le moins inquiétantes quand au destin de notre pays.

    Sissi zayyat

    10 h 35, le 27 février 2020

  • Mr le President juste pour vous informer que nos voisins du sud ont commence le forage il y a plus de 10 ans ...eux sont devenus une vraie puissance energetique...ils vendent leur gaz a l'Egypte a la jordanie depuis plus de 2 ans et bientot a l'europe par un gazoduc de 2000 km...ils vont concurencer le gaz Russe...et tout ca avec une societe nationale israelienne...non il n'y a pas de quoi pavoiser....cachez vous honteusement vous et tous nos polticiens vereux qui n'ont aucun sens de l'interet de notre pauvre nation...Me.....

    Houri Ziad

    10 h 30, le 27 février 2020

  • Avec tous ces drapeaux deriere lui on dirait que la Liban se porte tres bien. heureusement on n'aura pas du gaz qu'en 2029 autrement dit ca aurait ete vendu sur les marches a terme depuis.

    EL KHALIL ABDALLAH

    10 h 01, le 27 février 2020

  • Pour la perte de temps : 10 ans demandez M. Joumblat et Cie.

    aliosha

    09 h 49, le 27 février 2020

  • VENDRE LA PEAU DE L,OURS AVANT DE L,AVOIR ABATTU EST UNE HABITUDE LIBANAISE. ET SI LES FORAGES NE RESULTERAIENT EN RIEN ? LA POSSIBILITE EXISTE. QUE N,AURAIT-IL ATTENDU LE FIN DES FORAGES POUR NOUS PRESENTER LA PEAU DE L,OURS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 24, le 27 février 2020

  • En bref Aoun a chercher a vendre l'ours avant de l'avoir, non pas tué, mais même vu! Quand a la délimitation des frontières maritimes, c'est sous la coupe des dirigeants au pouvoir qu'il a été fait et sous leurs instructions. Ils sont donc tous responsables d'avoir brade les 865 km de territoires maritimes nationaux a l'avantage de .... de ... Israël!!! Aujourd'hui, le même Aoun qui a géré toute cette mouise et toute cette corruption, est fière de nous annoncer que: Le Liban a signe avec "Total-ENI-Novatek", toute des boites occidentales qui collabore avec Israël aussi, et qui utilise les services de ... la société américaine Vantage Drilling! Staghfar allah! Le Liban travaille avec le grand Satan! Il est ou le Hezbo il est ou, il est ou! Bientôt il va se faire si petit que son passage dans la vie politique du Liban sera relaté comme un nuage noir de passage et personne ne voudra en parler.

    Pierre Hadjigeorgiou

    08 h 56, le 27 février 2020

  • On était éblouis par la joie, la satisfaction et l'optimisme qui brillaient sur le visage de notre président durant son discours hier soir ! Au fait, on se demande...annonçait-il une bonne...ou une triste nouvelle ? Irène Saïd

    Irene Said

    07 h 27, le 27 février 2020

  • Vraiment pas de quoi pavoiser. Du début jusqu’à maintenant (non pas "jusqu'à la fin", car rien n'est terminé}, toute l'affaire a été menée - comme tout au Liban - dans le seul esprit de partage du gâteau, sans tenir le moindre compte de l'intérêt du Liban. Dans une dizaine d'années, inch'Allah, des dollars commenceront à sortir de la mer, mais qui en profitera? Le Liban ou quelques politiciens?

    Yves Prevost

    06 h 51, le 27 février 2020

  • Il n'aurait suffit que d'un seul drapeau libanais à côté de Monsieur Aoun. Cette multitude rappelle les régimes vides,et tous ces drapeaux ne serviront nullement à changer le visage réel de ce régime.

    Esber

    06 h 23, le 27 février 2020

  • Discours poudre aux yeux et gestion d'un dossier à la façon république non pad bananniere mais plutôt balarasse... Dommage que notre patrie en soit là et tombée si bas...

    Wlek Sanferlou

    02 h 19, le 27 février 2020

  • HEIN ?? !!!! ....Je reprends "..... une journée qui sera longtemps commémorée par le présent et l’avenir du Liban.....qu'il dit l'Histoire ne parlera QUE de celui qui fut au pouvoir le jour de la première extraction du pétrole ou gaz. Ca sera dans 10 ans...D'ici là, ca sera d'autres personnes, d'autres classes politiques.. Désolé les gars mais à priori, personne ne devrait vous citer. Le pays est en faillite cependant la folie des grandeurs reste toujours de rigueur.. Tout comme la défiguration des sites historiques pour construire leur siège de parti à côté des grands noms de l'Histoire loool... non mais... C'est cela qui les les interesse au final. Qu'on parle d'eux dans les livres d'Histoire :) franchement...

    LE FRANCOPHONE

    01 h 03, le 27 février 2020

  • Avec tout le respect que je vous dois en tant que Président de la République je vous aurais conseillé de lire le chef d’œuvre de Nicolas Sarkis “ Le Pétrole à l’heure Arabe “ avant de vous lancer hasardeuse ment dans un discours triomphaliste!

    PROFIL BAS

    00 h 53, le 27 février 2020

  • 20% de probabilité de succès, 9 ans d'attente avant les premiers revenus, 7 ans de retard dû au clientélisme confessionalo-politique, et le président a qd même le toupet de se féliciter... Incroyable. Et triste.

    C'est moi

    00 h 16, le 27 février 2020

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