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Les démons du fatalisme

De joyeux, prodigues, malicieux et follement inconscients, les Libanais sont désormais tristes, préoccupés et déboussolés au point de renouer avec les démons du fatalisme qui les hantent par intermittence et les plongent dans une prostration qui ne leur ressemble pas. C’est qu’il a la réputation d’avoir la peau dure, ce peuple aussi attachant par sa générosité qu’agaçant par son agitation, et dont on a toujours dit que, jeté à l’eau, il en ressort avec un poisson dans la bouche. Brûlé, haché, écrasé, dépecé, déplacé, dispersé, on lui aura tout fait sans jamais le faire fléchir… Désastreuses politiques extérieures et aventures guerrières ont laissé place à des rapports de force exprimés en détournements de fonds et abus de biens publics dont aucun chef de clan participant au pouvoir n’est innocent. Car ces rengorgés, dressés sur le fumier d’une « haute » politique tout en coups bas, ces petits joueurs dans la cour des puissants qui les manipulent n’ont jamais réussi à se doter d’une conscience nationale ni à dépasser leur dimension de chefs de tribus. Grisés par le culte que leur voue une poignée d’obligés, ils n’ont jamais plaidé que pour les « droits » de leurs communautés respectives, soit quelques lichettes d’asphalte sur des routes de villages éternellement orphelins et quelques fournées de salariés surnuméraires casés d’autorité dans l’administration publique. De quoi leur assurer à peu de frais un avenir politique, croient-ils, illimité. Au reste, et quelle que soit la longueur de son bras, tout le monde est logé à la même auberge des infrastructures défaillantes, et l’on se demande par quel mystère un aussi petit pays, sans industrie considérable ni consommation inconsidérée, met autant de mauvaise volonté à s’assurer le minimum de réseau électrique et hydraulique prouvant, à sa tête, l’existence d’un État.

Rarement population aura été traitée avec autant de mépris, voire de malveillance, de la part de ses dirigeants auxquels pourtant elle a donné mille chances, confiante qu’il s’en trouvera au moins un pour se pencher sur ses vrais problèmes et apporter une réponse concrète à ses difficultés. D’économie mafieuse en économie rentière, voici forcément la banqueroute. Et cela, tout prête à croire qu’on ne s’y habituera pas. Pour redresser un pays, il faut avant tout de la confiance et celle-ci exige, de la part de ceux qui sont supposés l’inspirer, humilité, transparence et sens de la communication. Pour réintégrer le concert des nations, il est nécessaire de valoriser l’écoute, la tolérance, la diversité, l’intégration et la liberté d’expression. Il est nécessaire de séduire, d’innover, d’investir dans la beauté, même à peu de frais, et faire en sorte que celle-ci soit durable. Simplement manifester un peu d’amour à cette terre pour la rendre aimable. Pour l’heure, toujours rien, sinon des informations qui circulent sur une vague d’arrestations ciblant les manifestants les plus actifs. Côté eurobonds, on ajoute des consultations aux consultations et le pouvoir ressemble à une boussole affolée. Le temps presse, et l’adage veut qu’une génération entière soit nécessaire pour voir apparaître une relève. Cette dernière sera forcément issue de la rébellion. Elle en aura la générosité et l’ouverture, le sens de l’équité et de la préservation des ressources, la curiosité de l’autre et le respect des différences, la jeunesse et le rejet des tentations identitaires. Un nouveau Liban se prépare sans aucun doute. En attendant, il faudra serrer les dents, vaincre la peur et surtout, à aucun moment, ne lâcher la main des plus fragiles d’entre nous. Ce combat-là, pour la première fois, nous engage tous ensemble. Ensemble est le mot de l’avenir.

De joyeux, prodigues, malicieux et follement inconscients, les Libanais sont désormais tristes, préoccupés et déboussolés au point de renouer avec les démons du fatalisme qui les hantent par intermittence et les plongent dans une prostration qui ne leur ressemble pas. C’est qu’il a la réputation d’avoir la peau dure, ce peuple aussi attachant par sa générosité qu’agaçant par...

commentaires (7)

C,EST DES DEMONS DU REALISME QU,IL FALLAIT PARLER CHERE MADAME FIFI.

LA LIBRE EXPRESSION

18 h 27, le 20 février 2020

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Commentaires (7)

  • C,EST DES DEMONS DU REALISME QU,IL FALLAIT PARLER CHERE MADAME FIFI.

    LA LIBRE EXPRESSION

    18 h 27, le 20 février 2020

  • Ça va être trop trop long , j'ai peur de l'affirmer pour ne pas choquer , mais je suis on ne peut plus pessimiste , vu l¡excécrable Deal du Siècle qui nous touche de plein fouet et qui renversera la donne démographique ! Horreur !

    Chucri Abboud

    13 h 06, le 20 février 2020

  • Le jour où le Liban cessera d'être tribal et devient une REPUBLIQUE en bonne et due forme, tous ces problèmes seraient relégués aux oubliettes. Les chefs de tribus dans notre pays empêchent toute évolution et nous tirent vers le bas par peur d'être exclus du programme d'émancipation du peuple par des élites qui feront en peu de temps ce que ces incapables n'ont pas réussi pendant un demi siècle. Le lavage de cerveaux qu'a subi un grand nombre de libanais en leur répétant toujours les mêmes rengaines exige un peu de recul et un temps de réflexion de ces derniers pour pouvoir faire la part des chose en réfléchissant aux conséquences de leur aveuglement qui jusqu'alors les a amputé de leur pouvoir de penser sans passer par les slogans de leurs gourous qui les ont noyés dans les mensonges et les chimères les plus irrecevables. Ils n'ont qu'à faire le bilan des actes accomplis par leur idoles et l'affaire sera pliée.

    Sissi zayyat

    12 h 38, le 20 février 2020

  • Désastreuses politiques extérieures et aventures guerrières ……………. à part cette phrase , si , je l'espère s'adresse à tous les politiciens libanais en commençant par le 1er jour de l'indépendance du Liban , je dirai que le reste de l'article est bien emmené . Mais connaissant la nostalgie au coin de l'œil de Fifi , j'ai des doutes là dessus .

    FRIK-A-FRAK

    11 h 33, le 20 février 2020

  • "La relève issue de la rébellion" . Le summum de l'optimisme . On les a vus, durant ces derniers mois ,ces sacrés rebelles crachant injures blasphèmes qui écorchent les oreilles . Une nouvelle vidéo ,parmi tant d'autres, aussi choquante en est la preuve décevante , celle qui continue d'ailleurs de circuler sur les réseaux sociaux montrant un tripolitain encerclé et piègé par un groupe de voyous de la ville qui l'agressaient verbalement et à un doigt de le faire physiquement . Agressé,parce qu'il ne leur ressemble ni par sa culture ni par son éducation . Les libanais resteront un mélange hétéroclite difficile à gérer tant qu'ils sont des peuples et non pas un seul .

    Hitti arlette

    10 h 05, le 20 février 2020

  • serrer les dents, oui ,mais surtout serrer les poings et mettre au service du pays toutes les jeunes intelligences brillantes ,si ,bien sur,elles conservent l'espoir; mais quand on ressort encore vivant de 15 ans de guerre, on est invincible, du moins dans la tete;J.P

    Petmezakis Jacqueline

    09 h 25, le 20 février 2020

  • Tout ça a un arrière goût d’Egypte de 1960...

    Gros Gnon

    07 h 10, le 20 février 2020

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