Gavin Ford, animateur-vedette de Radio One, assassiné en novembre 2018. Photo Michel Sayegh
Fondée en 1983, Radio One, l’une des radios de variétés les plus suivies au Liban, a mis la clé sous la porte le 1er février, après 37 ans d’antenne, créant une onde de choc parmi des générations d’auditeurs. En cause, la situation économique du pays qui a causé une baisse drastique des revenus publicitaires, des dissensions internes au sein de la chaîne, sans oublier l’assassinat, fin 2018, dans son appartement de Beit Méry, de son animateur-vedette Gavin Ford.
Contactée par L’OLJ, une employée a indiqué que la mort de Gavin Ford, associée aux problèmes financiers de la chaîne, a précipité la fin de Radio One. « Gavin était la valeur ajoutée de la station. Il animait le programme le plus en vue de Radio One et était celui qui lui faisait gagner de l’argent. Son émission matinale était la seule du genre dans le pays à avoir autant de publicités. Gavin était l’âme de la radio. Il avait des auditeurs particulièrement fidèles », explique cette jeune femme qui souhaite garder l’anonymat.
Elle révèle par ailleurs que Radio One opérait ces derniers mois à partir des locaux de la radio Virgin, qui planifiait de la racheter, et ne comptait plus que quelques employés. « Personne ne sait où se trouve le propriétaire de la station. Les employés ont passé une année sans toucher leurs salaires, avant que la radio ne déménage de Beit Méry vers les locaux de Virgin », assure l’ancienne employée.
« À l’exception des radios qui diffusent des programmes politiques, je vois mal les autres survivre longtemps. La crise est en train de précipiter notre fin, explique à L’Orient-Le Jour, sous couvert d’anonymat, l’un des responsables d’une radio libanaise. Nous n’avons plus de nouveaux contrats de publicité depuis le 16 octobre dernier (date du début des manifestations), alors que nous avons d’énormes coûts à couvrir. Il faut s’attendre à ce que plusieurs stations ferment prochainement », estime le responsable qui révèle néanmoins que Radio One était déjà « dans une situation difficile depuis plusieurs mois ».
« Aujourd’hui, j’ai perdu ma station préférée au volant »
« Le propriétaire de la radio avait des ennuis financiers et des dettes à payer depuis un moment, enchaîne ce responsable. Il a essayé, sans succès, de vendre sa radio. D’anciens employés de Radio One sont partis sans être indemnisés. Plusieurs anciens employés lui ont intenté des procès. »
« Les factures à payer dans une radio ne concernent pas seulement les salaires ou le financement des émissions diffusées. Nous payons de grosses sommes pour le mazout qui fait tourner nos émetteurs, pour internet et pour l’électricité. Chaque station de radio a au moins cinq émetteurs pour pouvoir couvrir tout le Liban, et l’entretien de chacune de ces installations est d’environ 5 000 $ par mois », indique-t-il encore.
À l’annonce de la fermeture de la chaîne, de nombreux internautes et journalistes ont exprimé leur tristesse. « Aujourd’hui, j’ai perdu ma station préférée au volant », a écrit le présentateur de télévision vedette Zaven Kouyoumjian sur Twitter. « Même dans les moments les plus difficiles, les radios sont restées solides. Nous sommes officiellement dans la pire des phases », a pour sa part tweeté la journaliste radio Rima Noujeim.
De nombreux médias ont cessé de paraître ces dernières années au Liban. Magazine Le Mensuel, le titre francophone phare du groupe Abou Adal (Les Éditions orientales), vient de tirer sa révérence sans le moindre communiqué explicatif, et après avoir fait paraître son dernier numéro daté décembre 2019-janvier 2020. Quelques mois auparavant, la radio Jaras Scoop avait mis fin à ses activités, en raison de ses difficultés financières.
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