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Économie - Télécoms

Choucair : Les opérateurs mobiles finiront « comme EDL » s’ils sont gérés par l’État

Le ministre a dressé le bilan de son mandat, sans revenir sur l’acquisition de l’immeuble de Touch.

Le ministre sortant des Télécoms, Mohammad Choucair, hier lors de sa conférence de presse. Photo ANI

Alors que la formation d’un nouvel exécutif semble enfin imminente, trois mois après le début des manifestations contre le pouvoir qui se poursuivent jusqu’à aujourd’hui et qui ont provoqué la démission du gouvernement Hariri III, le ministre sortant des Télécoms Mohammad Choucair a une nouvelle fois tenté de répondre aux critiques visant son mandat démarré il y a environ un an.

Le haut responsable, qui a de façon assez inédite conservé ses fonctions à la tête de plusieurs organisations issues du secteur privé et qui a été auditionné à plusieurs reprises en 2019 par la commission parlementaire des Télécoms, a notamment défendu sa position concernant le sort des opérateurs mobiles. Ces derniers sont gérés par des opérateurs privés – l’Égyptien Orascom depuis 2009 pour Alfa et le Koweïtien Zain depuis 2004 – dont les contrats ont expiré le 31 janvier. La commission des Télécoms, qui a recommandé le 30 décembre que les réseaux mobiles du pays soit restitués à l’État et que ce dernier en assume directement la gestion, a prévu de se réunir lundi pour décider de la suite des événements.

Mais le ministre considère pour sa part que le secteur finira obligé de vivre de subventions « comme Électricité du Liban » si sa gestion revient dans le giron de l’État. « Ce serait un crime de le faire (…) Ils veulent hériter de ce secteur alors qu’il est encore vivant, pour lui manger les os et la chair », a-t-il martelé, assurant avoir été sollicité pendant son mandat pour « placer telle ou telle personne » à un poste précis pour satisfaire un clientélisme politique.



(Pour mémoire : Opérateurs mobiles : Choucair dénonce une « campagne de dénigrement »)



Point de vue
Mohammad Choucair a en outre expliqué pourquoi, de son point de vue, laisser l’État gérer les réseaux était une mauvaise opération. « Il y a 2 000 à 2 100 personnes employés chez Alfa et Touch, payées en dollars par Orascom et Zain (…) », a-t-il relevé, estimant irréaliste le fait que l’État puisse les prendre en charge à un moment où sa situation financière est plus que précaire. Il a également insisté sur la nécessité de ne plus laisser le ministère assumer les dépenses d’exploitation des opérateurs mobile, une décision prise par l’ancien ministre des Télécoms de 2009 à 2011, Charbel Nahas, avant que son successeur, Nicolas Sehnaoui, ne fasse le chemin inverse.

Le ministre a de plus rappelé que le ministère des Télécoms était l’une des principales sources de revenus de l’État, ce qui expliquait qu’il soit régulièrement l’objet des rivalités politiques. « En 2019, le ministère des Finances prévoyait que la collecte de la TVA totalise 23 % des revenus de l’État, contre 13 % pour l’imposition sur les intérêts bancaires et 10 % pour les Télécoms (mobile et fixe inclus, NDLR) », a-t-il listé. Il prévoit en outre que la proportion de ces derniers par rapport au total des revenus de l’État devrait augmenter en 2020, suite à la baisse des recettes issues de la TVA consécutive à l’aggravation de la crise économique que traverse le pays et celle du produit de l’impôt sur les intérêts bancaires suite au plafonnement de ceux sur les dépôts ordonné par la Banque du Liban en décembre (circulaire n° 536).

Le sort des opérateurs du mobile libanais est incertain depuis fin 2015 et l’annulation par la direction des adjudications de l’appel d’offres remettant ces contrats en jeu, celle-ci ayant jugé que la procédure ne garantissait pas le jeu de la concurrence. Les contrats ont ensuite été prolongés au coup par coup par les ministres des Télécoms en attendant que le Conseil des ministres tranche la question, ce qui n’était toujours pas le cas au moment de la formation du gouvernement Hariri III fin janvier 2019.

Mohammad Choucair a assuré qu’il avait présenté un cahier des charges au Conseil des ministres deux semaines après avoir été investi, brandissant une copie de ce dernier à l’attention des journalistes pendant sa conférence de presse. Selon lui, l’exécutif a étudié le document pendant trois mois, avant qu’il n’en présente une version amendée le 19 juillet. « Le principal point de discorde était que l’un des partis (qu’il n’a pas nommé) voulait empêcher des sociétés libanaises de participer à l’appel d’offres aux côté d’opérateurs étrangers (par exemple une entreprise libanaise ne peut pas avoir des parts dans cette société) tandis que les autres n’y voyaient pas d’inconvénient », a-t-il précisé.



(Pour mémoire : Contrats des opérateurs mobiles : les suites possibles)



Taxe WhatsApp
Soulignant que les avancées sur le dossier ont été suspendues après la démission du cabinet dans les jours qui ont suivi le début des manifestations, le ministre a en outre assuré avoir notifié le gouvernement sortant le 3 décembre des options restant sur la table après le 31 décembre – renouvellement des contrats des opérateurs mobiles, changement des termes du contrat ou restitution des actifs à l’État dans les deux mois. « Cette lettre est restée sans réponse », a-t-il regretté, faisant état d’un courrier de relance envoyé le 24 décembre. En somme, comme aucune décision n’a été prise, les contrats des opérateurs mobiles sont en plein dans la zone grise : le délai de 60 jours qu’ils prévoient pour la restitution des actifs à l’État ne peut pas courir tant que l’exécutif n’a pas pris de décision et le ministre ne peut pas lui seul modifier les contrats ou les prolonger au-delà du strict nécessaire pour assurer la continuité du service public en attendant une solution définitive.

Le ministre a profité de cet exposé pour se lancer dans un plaidoyer en sa faveur. « Je refuse de porter la responsabilité de la mauvaise gestion des Télécoms pendant 20 ans (…) Je mets au défi n’importe quel ministre de faire économiser à l’État en 11 mois 135,6 millions de dollars », a-t-il notamment tonné, mettant en avant plusieurs chantiers dont la suppression de 5 000 lignes gratuites mises en service depuis des années, le budget de sponsoring qui est passé de 12 millions à 1,5 million de dollars ; la suppression des « soirées, événements et cadeaux de fin d’année » ; ou encore la baisse de 20 % des frais de location de la moitié des près de 3 700 tours-relais louées par l’État. « Tous ces chiffres sont disponibles au ministère », a-t-il dit.

Le ministre n’a en revanche pas abordé l’acquisition de l’ensemble immobilier accueillant le siège social de Touch au centre-ville, des locaux que l’opérateur louait depuis 2017. La transaction, estimée à 75 millions de dollars par Choucair et présentée comme une mesure d’économie sur le long terme, est en revanche critiquée par plusieurs voix, dont celle du député de Baalbeck-Hermel et membre de la commission des Télécoms Jamil Sayyed, qui évoque un coût réel de 105 millions de dollars. Le dossier a fait l’objet d’une enquête parlementaire qui a englobé plusieurs affaires liées aux Télécoms.

Mohammad Choucair est enfin revenu sur l’épisode de la décision du Conseil des ministres de faire payer les utilisateurs qui passent des appels – audio et vidéo – via des applications de messagerie sur base du principe du VoIP (Voice over Internet Protocol), désigné par le raccourci de taxe WhatsApp. L’annonce de cette mesure, retirée le soir-même, avait été le catalyseur des manifestations qui ont éclaté le 17 octobre, propulsant le ministre au premier rang des personnalités les plus critiquées par les contestataires. « La taxe WhatsApp n’est pas la cause principale de la révolution du 17 octobre », a-t-il insisté, ajoutant qu’une écrasante majorité de ministres avaient donné leur feu vert à cette « taxe » le jour même, et que certains voulaient même en majorer le montant.



Pour mémoire

Le ministère libanais des Télécoms à nouveau interpellé pour sa gestion


Alors que la formation d’un nouvel exécutif semble enfin imminente, trois mois après le début des manifestations contre le pouvoir qui se poursuivent jusqu’à aujourd’hui et qui ont provoqué la démission du gouvernement Hariri III, le ministre sortant des Télécoms Mohammad Choucair a une nouvelle fois tenté de répondre aux critiques visant son mandat démarré il y a environ un...

commentaires (4)

M. Choucair oublie de mentionner qu'apres M. Nahas les couts d'operations des reseaux ont ete multiplies par 3....Merci M. Choucair

Mounir Doumani

12 h 30, le 17 janvier 2020

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Commentaires (4)

  • M. Choucair oublie de mentionner qu'apres M. Nahas les couts d'operations des reseaux ont ete multiplies par 3....Merci M. Choucair

    Mounir Doumani

    12 h 30, le 17 janvier 2020

  • C'est moi ou le naufrage.

    Citoyen

    11 h 00, le 17 janvier 2020

  • qu'attend la justice pour le jeter en prison celui la ? PS. OGERO gere tres tres bien le departement qu'on lui a donne a diriger . alors gerer des operations/stes de cellulaire serait certainement faisable et probablement mieux que les 2 operateurs actuels. alors que choucair se taise une bonne fois pour tout

    Gaby SIOUFI

    10 h 29, le 17 janvier 2020

  • TOUT CE QUI EST GERE PAR L,ETAT FINIT EN BORDEL !

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 39, le 17 janvier 2020

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