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À La Une - crise

En Irak, les menaces de sanctions de Trump réveillent le triste spectre de l'embargo

Les conséquences de sanctions économiques seraient aujourd'hui bien plus graves que celles de l'embargo imposé à l'Irak sous Saddam Hussein après l'invasion du Koweït, assurent les observateurs.

Un faux drapeau américain installé sur une route de Bagdad, le 3 janvier 2020, afin d'être piétiné par les passants. Photo AFP / AHMAD AL-RUBAYE

Aussitôt que Donald Trump a promis aux Irakiens des "sanctions comme ils n'en ont jamais vu", l'embargo international imposé à l'Irak de Saddam Hussein est revenu hanter les esprits, et avec lui les douloureux souvenirs de privations et de disette.

"Si les Etats-Unis imposent des sanctions à l'Irak, le dinar plongera et on retournera dans le passé, à l'époque de l'embargo", s'inquiète déjà Hicham Abbas, dans une rue commerçante du centre de Bagdad.

Dimanche, le Parlement réclamait l'expulsion au plus vite des troupes américaines d'Irak pour dénoncer l'assassinat sur son sol du général iranien Kassem Soleimani et de l'homme de Téhéran en Irak, Abou Mehdi al-Mouhandis. Aussitôt, le président américain menaçait Bagdad : les représailles qu'il envisage "feront apparaître les sanctions (imposées actuellement) contre l'Iran comme presque faibles". "Nous respectons votre décision", a répondu lundi soir l'armée américaine, dans une lettre officielle, annonçant "repositionner" les forces de la coalition antijihadistes dans le but d'"un retrait de l'Irak de manière sécurisée et efficace".

Déjà quand Saddam Hussein a envoyé à l'été 1990 son armée s'emparer du Koweït voisin, la réponse de son ancien allié américain a été cinglante. Après avoir chassé les troupes irakiennes du Koweït, les Etats-Unis et leurs alliés ont imposé un strict embargo à l'Irak.


(Lire aussi : Exacerbation des tensions entre Téhéran et Washington, appels au calme)


Larguer la "Bombe H" 
A cause de l'embargo, le PIB a été divisé par deux et des dizaines d'usines ont fermé. Aujourd'hui, dans un pays rongé par la corruption et où les infrastructures déliquescentes ne sont pas entretenues du fait des conflits à répétition, elles n'ont toujours pas rouvert. Et l'Irak compte désormais 40 millions d'habitants, un parc automobile multiplié par dix, des téléphones portables et des ordinateurs dans toutes les maisons, ce qui a fait exploser la consommation. Les conséquences de sanctions économiques seraient donc aujourd'hui bien plus graves, assurent les observateurs.

Il y a quelques mois déjà, un diplomate américain à Bagdad affirmait à l'AFP que Washington réfléchissait à toucher l'Irak au portefeuille. "Des sanctions sont possibles, de même que limiter les entrées de devises en liquide en Irak. Mais ce serait larguer la bombe H", assurait-il alors.

Aujourd'hui, ce choix est sur la table et le président américain ne semble plus reculer devant rien, lui qui menace de bombarder des sites culturels en Iran voisin.

Si "la bombe H" était lancée, "ce serait comme à l'époque de Saddam Hussein et même sûrement pire", s'alarme de son côté Samer, petite barbe noire et pull assorti. "Il n'y aura plus de devises dans le pays", redoute ce jeune Irakien, alors que durant l'embargo de 1990 à 2003, la valeur du dinar irakien a été divisée par 10.000. Or, le dollar est vital pour le pays, deuxième producteur de l'Opep, car le budget de l'Etat est composé à 90% des recettes de l'or noir, payé en dollars. C'est avec cet argent qu'il paie les salaires et les pensions de plusieurs millions d'Irakiens.


(Lire aussi : Trump menace l'Iran de représailles et l'Irak de sanctions)


"Humiliés" 
Il y a aussi la question de l'électricité - en pénurie chronique en Irak. Jusqu'ici Washington autorisait Bagdad à se fournir en Iran pour faire tourner ses centrales et assurer plusieurs heures d'électricité par jour à tous ses habitants. Mais cela aussi pourrait changer.

Déjà, alors même que le Parlement était réuni pour réclamer au gouvernement de retirer son invitation à la coalition antijihadistes emmenée par les Etats-Unis, son président Mohammed al-Halboussi mettait en garde les élus. S'exposer à des sanctions économiques, a-t-il plaidé, ne ferait qu'aggraver les problèmes de l'Irak, où un habitant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté et un jeune sur quatre est au chômage.

Au-delà de la détresse économique qui pourrait découler des annonces du président américain sur le plus ou moins long terme, les dégâts sur l'image des Etats-Unis en Irak où l'Iran ne cesse d'étendre son influence sont déjà visibles.

"Les Irakiens se sentent humiliés, et à juste titre, par les dernières déclarations de Donald Trump sur les demandes de remboursement", affirme à l'AFP Karim Bitar, chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). Car alors que les Irakiens, sous occupation américaine pendant huit ans, veulent désormais voir partir les troupes stationnées chez eux, le président américain a commencé à chiffrer les réparations. "Nous avons une base aérienne extraordinairement chère là-bas. Elle a coûté des milliards de dollars à construire. Nous ne partirons pas s'ils ne nous remboursent pas", a-t-il lancé. "C'est assez hallucinant, ça rappelle le fait que Trump voulait faire payer aux Mexicains la construction du mur", poursuit M. Bitar.



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commentaires (2)

GARE AUX SANCTIONS DRACONIENNES S,ILS OSENT CHASSER CEUX QUI LES ONT SAUVE !

LA LIBRE EXPRESSION

10 h 02, le 07 janvier 2020

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Commentaires (2)

  • GARE AUX SANCTIONS DRACONIENNES S,ILS OSENT CHASSER CEUX QUI LES ONT SAUVE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 02, le 07 janvier 2020

  • L embargo sous Saddam Hussein a ete vite par l ONU,rien a voir avec la menace actuelle de Donald Trump qui n empecherait pas l Irak de commercer avec le monde entier.

    HABIBI FRANCAIS

    03 h 49, le 07 janvier 2020

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