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Nos Lecteurs ont la Parole - par Salim F. DAHDAH

La révolution du 17 octobre, une étoile brillante dans le firmament sombre de la république

Le 17 octobre 2019, un voile aux couleurs du drapeau libanais s’est déployé furtivement aux premières heures de la soirée sur une partie du territoire libanais. Il s’est amplifié tôt le lendemain matin, jusqu’à couvrir, du nord au sud, d’est en ouest, tout le reste des villes du pays du Cèdre.

Le peuple libanais, et plus spécialement sa jeunesse, dont principalement les femmes, s’est distingué par sa maturité, sa combativité et le choix de ses revendications. À ses côtés, des personnes du troisième âge en quête d’une meilleure qualité de vie et d’une assurance vieillesse, ainsi que des flots de citoyens mécontents, dépourvus matériellement, et sans emplois, ont laissé éclater leurs mécontentements et leurs vindictes contre un régime qu’ils ont accusé dans sa globalité de corruption, d’incapacité à apporter des solutions à leurs problèmes et d’être otage d’une composante politique, à la solde d’un État étranger, avec ce que cela entraîne comme atteinte grave à l’indépendance et à la souveraineté nationale.

Près de 70 jours d’actions unanimement décrites par la presse internationale comme exemplaires, grâce à leur attitude pacifique et leur déploiement horizontal, divers et décentralisé, permettant à tout un chacun de s’exprimer en toute liberté et sans aucune ingérence extérieure. Réunis tous les jours sur les places publiques de toutes les grandes villes du territoire, ces révolutionnaires ont exprimé leurs doléances et leurs exigences, et ont débattu sous les tentes de tous les sujets intéressant les citoyens et l’État qu’ils souhaiteraient rebâtir.

Conscients de leurs responsabilités nationales et de leur solidarité citoyenne, ils ont tenu à célébrer la fête de l’indépendance nationale il y a quelques jours à leur façon. C’est ainsi que pour la première fois dans son histoire, le Liban a vécu une exceptionnelle parade civile, où toutes les tranches de la population ont défilé au cœur de la cité sous les regards excités et fiers de tous les révolutionnaires et de leurs familles.

Cette révolution a été marquée à ce jour par trois discours du secrétaire général du Hezbollah, deux interventions du président de la République, une intervention du Premier ministre, la chute du gouvernement et l’incapacité à ce jour d’en former un nouveau. Plus grave encore, face à la demande populaire de poursuites judiciaires contre la corruption des politiques au pouvoir, une crise financière follement débridée, un gouvernail bloqué et un « capitaine » complètement débordé, suivis de nombre d’incidents et de secousses sur le terrain, sont apparus et ont menacé les avoirs, les épargnes et les professions du peuple, comme pour contrebalancer et interrompre toute velléité de procédure à engager contre les politiciens en question !

Devant cet impressionnant branle-bas d’actions et de réactions, le panorama national a beaucoup évolué, toutes les références traditionnelles et lectures politiques se sont affranchies, les citoyennes et citoyens sont subitement sortis de leurs « tanières » confessionnelles et de leurs silences, ils se sont dégagés de leurs peurs, ils ont exprimé pacifiquement, haut et fort et avec respect, leurs revendications et tout ce qu’ils avaient au fond du cœur et au fond de leurs « poches »…

Face à cette situation inédite dans les annales du Liban de 1943, le régime en place balbutie, fait du surplace, accumule les erreurs constitutionnelles et attend une inspiration du ciel qui ne semble pas vouloir lui être accordée ! Majoritaire au Parlement, et fort des armes imposées sur la scène politique interne par ses alliés, il est complètement désavoué sur les places publiques par une quasi-majorité populaire et citoyenne, et ne sait plus quelle voie adopter.

Le temps presse et chaque jour de retard mis à résoudre les dites revendications et à apporter des solutions à la crise économique désastreuse sont autant de clous dans le flanc de ce régime. Construit sur la critique et l’affirmation de la corruption de tous ses adversaires politiques, le voici lui-même confronté à des problématiques autrement plus sérieuses qui risquent de l’amener, à son tour, à s’effondrer dans les pièges qu’il avait dressés à tous ses opposants. À moins donc d’opérer un virage à 180 degrés, toute initiative qu’il prendra l’entraînera irrémédiablement vers une plus grande fuite en avant qui ne pourra entraîner que des risques de confrontation dangereuse et une faillite financière certaine !

Il serait donc sage et réaliste que le régime et ses alliés acceptent de reconnaître leur débâcle et que le président de la République décide, pour sauver son mandat, d’opérer tout seul, et en son âme et conscience, un changement de cap très significatif, en commençant par mettre sur la touche provisoirement le « mauvais génie » de la République, son néanmoins gendre favori, et adhère ensuite à la revendication populaire, malgré la pression et l’avis négatif du Hezbollah. Le Premier ministre désigné devrait choisir à son tour onze personnalités indépendantes, connues pour leurs capacités professionnelles et n’appartenant pas aux cercles traditionnels des partis politiques de ce pays, pour former un cabinet de onze ministres uniquement : Défense nationale, Affaires étrangères, Intérieur, Justice, Finances, Santé, Éducation nationale, Économie nationale, Télécommunications, Énergie, Travail & Affaires sociales. Ce « cabinet de salut public » serait transitoire, il agirait durant dix-huit mois et statuerait par décrets-lois grâce à des pouvoirs exceptionnels que lui attribuerait le Parlement pour douze mois uniquement.

Tout le monde se doit de saisir cette chance pour transformer un désastre politique, économique et financier en une victoire nationale sur la corruption grâce à la réhabilitation des droits des citoyens, de la justice et de la dignité sociale et enfin d’un véritable État de droit et des institutions.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour.

Le 17 octobre 2019, un voile aux couleurs du drapeau libanais s’est déployé furtivement aux premières heures de la soirée sur une partie du territoire libanais. Il s’est amplifié tôt le lendemain matin, jusqu’à couvrir, du nord au sud, d’est en ouest, tout le reste des villes du pays du Cèdre. Le peuple libanais, et plus spécialement sa jeunesse, dont principalement les femmes,...

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