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Culture - Littérature

Traduit pour la première fois en langue arabe, Guillaume Musso parle de « l’enrichissement par nos différences »...

Aujourd’hui, avec la traduction en arabe de « La jeune fille et la nuit » (« al-Sabiyat wa leil »), Hachette-Antoine, 365 pages, traduction Nathalie el-Khoury, le romancier français Guillaume Musso entre en Orient, Proche, Moyen et au-delà, à la rencontre des lecteurs arabophones. L’occasion de parler, justement, de traduction.

Guillaume Musso.

À 45 ans, Guillaume Musso est l’un des romanciers français dont les livres sont les plus vendus. Chiffre mirifique battant les records, car en moins de deux décennies et avec plus de dix-sept romans, la vente totale de ses œuvres se fixe au-delà de la barre de trente-deux millions d’exemplaires et d’innombrables traductions. Les ingrédients de son cocktail à succès : de l’amour, du suspens, de l’inattendu et cette magie des mots et des atmosphères...

Votre avant-dernier roman « La jeune fille et la nuit » vient d’être traduit en arabe. Quel effet cela vous fait d’avoir les lecteurs du monde arabe ?

Je suis à la fois très heureux et curieux de connaître la façon dont le roman sera accueilli par les lecteurs. J’en ai souvent fait l’expérience : le même roman peut être lu de façon assez différente selon les pays. Chaque lecteur lit la même histoire, mais chacun la réinterprète à l’aune de ses valeurs, de ses spécificités et de son fond culturel. J’ai donc hâte de connaître la réaction des lecteurs du Liban.


Auriez-vous souhaité la traduction d’un autre ouvrage ?

Non, car La jeune fille et la nuit est un roman que j’aime particulièrement. En effet, pour la première fois, ce roman se déroule sur la Côte d’Azur, la région de mon enfance. Et en particulier autour de la ville d’Antibes dont je suis originaire et dans laquelle j’ai tant de souvenirs. Quand cette histoire a commencé à prendre forme dans mes carnets, je me suis rendu compte qu’elle avait besoin de soleil, de la musique des cigales, de terrasses de café ombragées, du bruit du vent dans les pins, d’un sentier littoral au-dessus des falaises, et de tout l’imaginaire associé à la Méditerranée.


On a traduit vos romans en plus de 40 langues. Comment considérerez-vous ce succès ? Et dans quel pays et en quelle langue avez-vous eu le plus d’audience ?

J’en éprouve énormément de fierté parce que, même si l’écriture n’est évidemment pas une compétition, le succès valide d’une certaine façon votre travail. Il matérialise le lien fort et durable tissé au fil des années avec les lecteurs du monde entier sur des territoires aussi différents que l’Allemagne, l’Italie, la Russie ou la Corée du Sud. « L’écriture est un jeu qui se joue à deux », rappelait Perec, et j’ai toujours considéré que la première qualité d’un romancier est de savoir captiver son lecteur. Cet engouement autour de mes romans me laisse au demeurant toute ma liberté. Elle ne m’oblige à aucune concession, à aucune obligation. Comme il y a quinze ans, je continue à me mettre tous les matins devant mon clavier avec un seul objectif : me raconter l’histoire que j’aimerais lire en tant que lecteur.


Quelles sont pour vous les meilleures œuvres traduites ?

C’est une question difficile. Je peux vous parler des meilleures parmi mes lectures. Je pense tout de suite à la traduction d’Edgar Allan Poe par Baudelaire, même si elle a, paraît-il, gommé par la sélection des œuvres le sens de l’humour et du grotesque du nouvelliste. Étant un très grand lecteur depuis mon adolescence, mais pas un grand polyglotte, la plupart des romans que j’ai adorés étaient des œuvres traduites. J’aime autant Le cercle de la croix, le roman fleuve de Ian Pears, traduit par Georges-Michel Sarotte que les romans de Philip Roth par Josée Kamoun.


Connaissez-vous des œuvres en langue arabe d’auteurs libanais traduites en français et vous ont-elles plu ?

Le poète Khalil Gibran a fait partie des lectures de ma jeunesse, je l’ai découvert comme beaucoup de lecteurs dans le monde à travers Le Prophète, un livre qu’il avait écrit directement en anglais, et comme je l’ai aimé, j’ai ensuite lu des aphorismes traduits de la langue arabe. Beaucoup d’auteurs libanais sont connus et appréciés en France. Pour ma part, je me souviens notamment d’avoir lu Le rocher de Tanios d’Amin Maalouf, écrit en français, mais je ne demande pas mieux que d’en découvrir d’autres !

Quel est le secret pour vous d’une bonne traduction ? D’un bon traducteur ?

Umberto Éco, qui était un traducteur ébloui de Gérard de Nerval, en a longuement parlé dans son essai Dire presque la même chose. Tout le mystère de la traduction réside dans ce « presque ». Il faut restituer à la fois le sens, la couleur et la vibration d’un texte. Éco parle de la nécessaire « négociation » entre la fidélité au texte original et la qualité du texte traduit. L’objectif du traducteur étant que le texte traduit puisse « produire des effets analogues chez le lecteur ». C’est un travail de recréation.


Le roman gagne-t-il à être traduit ou perd-il de sa valeur ou sa beauté littéraire initiale ?

« Comment voulez-vous traduire? » s’interrogeait Nabokov dans une interview célèbre en constatant que les gens pensent généralement « en images » et que, in fine, « le mot se dissout en image ». Il prenait l’exemple du mot framboise qui en anglais (raspberry) est plutôt terne, alors qu’en russe (malinoé), « c’est un éclat de lumière ». Même si la traduction est réussie, le roman ne sera jamais un double parfait de l’original. La traduction sera une sorte de variation, une œuvre parallèle à l’originale. Un peu à la manière des interprétations musicales. Le même morceau de Bach sonnera différemment joué par Glenn Gould ou Murray Perahia.


L’Orient et particulièrement le Liban peuvent-ils un jour inspirer votre plume ?

Je ne me suis rendu qu’une seule fois au Liban, il y a une dizaine d’années et j’en garde un excellent souvenir. Le fait d’être traduit dans un pays que je connais peu éveille ma curiosité, me donne l’occasion de m’intéresser à lui. Et parfois cela resurgit dans mes romans.


Qu’attendez-vous de cette première traduction, qui sera suivie bientôt d’un autre opus (en préparation déjà « La vie secrète des écrivains ») de votre œuvre ?

De la curiosité, l’occasion de parler avec de nouveaux lecteurs et de « s’enrichir de nos différences » pour reprendre la belle formule de Paul Valéry.


« La jeune fille et la nuit » (« al-Sabiyat wa leil ») de Guillaume Musso (Hachette-Antoine, traduction en arabe Nathalie el-Khoury, 365 pages) disponible en librairie.


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À 45 ans, Guillaume Musso est l’un des romanciers français dont les livres sont les plus vendus. Chiffre mirifique battant les records, car en moins de deux décennies et avec plus de dix-sept romans, la vente totale de ses œuvres se fixe au-delà de la barre de trente-deux millions d’exemplaires et d’innombrables traductions. Les ingrédients de son cocktail à succès : de...

commentaires (1)

Traduttore, traditore ;)

Tina Chamoun

11 h 02, le 31 juillet 2019

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Commentaires (1)

  • Traduttore, traditore ;)

    Tina Chamoun

    11 h 02, le 31 juillet 2019

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