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Liban - Éducation

Derrière l’affaire des élèves interdits d’examens se cache le vieux dossier des écoles fantômes

Chehayeb accorde un délai supplémentaire pour sauver 82 candidats au bac.

Le ministre de l’Éducation, Akram Chehayeb, recevant les membres de la délégation éducative du Hezbollah, en présence notamment du DG du ministère, Fady Yarak. Photo ministère de l’Éducation

Sur un total de 60 000 candidats au brevet libanais, « environ 264 élèves n’ont pas été autorisés à présenter les épreuves de cet examen officiel qui ont débuté mercredi passé, leurs noms n’ayant pas été communiqués par leurs établissements scolaires au ministère de l’Éducation, ou ayant été communiqués de manière erronée ». Et pour cause, « ces institutions qui n’ont souvent d’écoles que le nom n’ont toujours pas régularisé leur situation et sont juste dotées d’une attestation provisoire signifiant qu’il n’y a pas d’inconvénient à ce qu’une école soit érigée ». Comme elles le font depuis de nombreuses années, « elles fonctionnent en toute illégalité, sans permis, parfois sans élèves, mettant l’État devant le fait accompli à la veille des examens officiels, malgré les avertissements répétés des autorités ».

C’est ce qu’explique à L’Orient-Le Jour le ministre de l’Éducation, Akram Chehayeb, en réponse à la polémique qui a fait le buzz dans la rue et sur les réseaux sociaux durant les dernières 48 heures, suite à sa décision de ne pas permettre à des élèves dont la scolarité n’est pas enregistrée auprès du ministère de passer les examens officiels. « Les candidats interdits de brevet auront l’occasion de se représenter pour une session exceptionnelle qui sera fixée ultérieurement », précise le ministre, invitant les établissements concernés à présenter leurs listes de noms.

Quant aux candidats au bac qui devaient initialement être touchés par cette même mesure, ils représentent seulement 82 élèves sur un total de 40 000 candidats. Mais ils seront, au final, autorisés à présenter leur bac libanais avec les autres élèves, dès la semaine prochaine, à la condition que leurs écoles soumettent leurs noms au ministère de l’Éducation, aujourd’hui vendredi 14 juin à 17 heures au plus tard.


(Lire aussi : Les élèves interdits de passer le brevet continuent de crier leur colère)


Vers la fermeture d’une quinzaine d’établissements

Ces chiffres officiels ne sont certes pas précis, vu la grande difficulté des autorités à recenser le nombre d’élèves concernés. Mais ils demeurent bien loin du chiffre de « 1 700 élèves privés de brevet et de bac » qui a circulé ces derniers jours, suscitant sur les réseaux sociaux la colère de nombre d’internautes souvent politiquement hostiles au bloc joumblattiste auquel appartient le ministre Chehayeb. Relayée sur le web, l’information qui dénonçait « une mesure coercitive à l’égard de la communauté chiite » n’a pas manqué de donner libre cours aux insultes, discours haineux et autres appels à la démission.

Akram Chehayeb ne se laisse pas intimider pour autant. Après avoir affirmé à L’Orient-Le Jour qu’il entend mener à bien sa « mission de réforme malgré les pressions », le ministre de l’Éducation fait part de sa volonté « de fermer la quinzaine d’établissements éducatifs privés non autorisés ayant pignon sur rue dans différentes régions du pays ». « Il s’agit, la plupart du temps, d’écoles fantômes qui ont pour seul but de soutirer de l’argent aux parents, sans assurer aux enfants le moindre enseignement, déplore-t-il. Une fois ces établissements fermés, nous placerons les élèves à l’école publique s’ils ont le niveau requis, ou à l’école technique s’ils ne peuvent poursuivre un cursus classique. »Le problème des écoles fantômes et non autorisées n’est pas récent. Selon une source proche du dossier, « il s’est posé à tous les ministres de l’Éducation successifs qui ont souvent fermé les yeux à l’approche des examens officiels, accordant les autorisations nécessaires aux élèves d’écoles sans permis, dont une bonne partie dans la banlieue sud de Beyrouth, histoire de ne pas faire payer aux élèves le prix d’un fait accompli qui se perpétue ». Sans oublier que « chaque changement de gouvernement était un répit supplémentaire accordé à ces institutions exerçant illégalement ».

Le responsable du dossier de l’éducation au sein du Courant patriotique libre, Rock Mehanna, insiste pour sa part sur la nécessité « de fermer immédiatement ces écoles-boutiques ». « Elles auraient dû être empêchées d’exercer depuis longtemps », martèle-t-il. Et de rappeler que « l’ancien ministre de l’Éducation, Élias Bou Saab, avait accordé des autorisations exceptionnelles permettant aux élèves d’établissements illégaux de présenter leurs examens ». « En revanche, ces derniers n’ont obtenu leurs résultats qu’à partir du moment où le statut de leur école a été régularisé », soutient-il.

Les parents, complices du système

À travers ce problème éducatif se profile une facette du clientélisme politique et communautaire qui sévit au pays du Cèdre. Selon une source proche du dossier, « les écoles sans permis n’ont jamais été fermées parce qu’elles sont proches de telle partie politique ou de telle communauté religieuse. Elles ne manquent pas d’exercer des pressions pour continuer de pratiquer sans être inquiétées ». Le pire, poursuit la source, c’est qu’elles « font réussir des élèves qui sont quasiment illettrés. À tel point qu’on se demande si ces élèves ont jamais fréquenté l’école ».

Quant aux parents, ils sont généralement « complices de ce système qui leur permet, pensent-ils, d’acheter l’attestation scolaire de leur enfant, parce qu’ils sont pauvres et peu instruits, mais aussi parce que leurs enfants ont accumulé les échecs et sont en situation de décrochage scolaire ». « Mais sans le cachet du ministère de l’Éducation, ces attestations sont nulles. Même l’école publique les refuse », assure la source, qualifiant de « comédie » le sit-in des parents d’élèves et directeurs d’établissement devant le ministère de l’Éducation, ces derniers jours.

L’affaire pourrait prendre un nouveau tournant avec la visite d’une délégation éducative du Hezbollah formée de Youssef Kanaan, Youssef Merhi et Oussama Nasser el-Dine au ministre de l’Éducation. Une rencontre qui a permis à Akram Chehayeb d’exposer le dossier à ses interlocuteurs, de leur présenter son plan de réformes et d’obtenir leur soutien.


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Sur un total de 60 000 candidats au brevet libanais, « environ 264 élèves n’ont pas été autorisés à présenter les épreuves de cet examen officiel qui ont débuté mercredi passé, leurs noms n’ayant pas été communiqués par leurs établissements scolaires au ministère de l’Éducation, ou ayant été communiqués de manière erronée ». Et pour cause, « ces...

commentaires (3)

Des écoles fantômes?? Vraiment ceci n 'existe qu'au Liban. Choquant et triste .

Antoine Sabbagha

20 h 38, le 14 juin 2019

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Commentaires (3)

  • Des écoles fantômes?? Vraiment ceci n 'existe qu'au Liban. Choquant et triste .

    Antoine Sabbagha

    20 h 38, le 14 juin 2019

  • DES ECOLES FANTOMES. DES ABRUTIS CORROMPUS ET INCOMPETENTS. DANS L,ATOLL LIBAN MEME LES BANANES NE POUSSENT PLUS. IL N,Y A QUE DES CRABES QUI MANGENT LE VERT ET LE PUTRIDE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 28, le 14 juin 2019

  • LE PIRE, LE PIRE ( SI JE NE ME TROMPE PAS ), BCP DE CES ECOLES FANTOMES ET /OU REELLES MAIS FANTOMATIQUES QUANT A LEUR ""CURSUS", BCP SONT SUBVENTIONNEES PAR L'ETAT , BCP SE DISENT CONTRAINTES DE "HAUSSER" LEUR SCOLARITE ! PS. je sais C un amalgame de problemes que ce qui precede MAIS MAIS MAIS REELS .

    Gaby SIOUFI

    13 h 07, le 14 juin 2019

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