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La Consolidation de la paix au Liban - Mai 2019

L’histoire, pourquoi s’en soucier ?

Les gens vivent dans le présent et se préparent pour l’avenir, alors pourquoi vont-ils se donner la peine d’étudier le passé? Pourquoi voudraient-ils étudier l’histoire si l’information historique est disponible d’un simple clic ? À l’Association libanaise pour l’histoire (LAH), nous sommes souvent mis au défi de répondre à ces questions lorsque les gens découvrent notre mission visant à développer l’éducation à l’histoire. Nous croyons que l’histoire est une science puissante qui nous permet d’entrer dans le laboratoire des expériences humaines, pour mieux comprendre le présent. L’apprentissage de l’histoire a un impact significatif sur ce que nous sommes et ce que nous deviendrons. C’est un moyen de construire la paix.

Célébration des 5 ans de la fondation de la LAH LH invitation card (002)

L’importance de l’histoire a évolué au cours des cinquante dernières années. Traditionnellement, l’histoire était considérée comme une discipline qui rendait les individus plus « cultivés ». Cela leur a permis de citer des personnalités du passé, de se souvenir de certains événements et de donner l’impression de connaître tout ce qui s’était déroulé aux époques précédentes. Cette vision nécessitait la mémorisation des noms, des dates et des événements. Cependant, avec l’Internet qui nous fournit une mine d’informations historiques à portée de main, l’objectif de l’enseignement de l’histoire a changé. Les tendances actuelles considèrent l’histoire comme une discipline avec ses propres concepts et outils qui contribuent à une réflexion de haut niveau. L’histoire de l’éducation a un impact significatif sur nos identités individuelles, civiques, politiques et morales.

La raison principale pour laquelle les pays ont choisi d’inclure l’histoire dans leurs récits nationaux reste la citoyenneté. Bien que les gouvernements l’exploitent souvent à des fins politiques, l’histoire peut contribuer à la formation de citoyens responsables. Elle permet aux individus d’aborder les événements sous de nombreuses perspectives, recherchant leurs causes et effets, comprenant leur changement, évaluant leur importance et analysant leurs interprétations contradictoires.

L’histoire nous aide à mieux comprendre le présent. Si nous voulons que nos jeunes apprenants saisissent pourquoi les politiciens se comportent comme ils le font, comment fonctionne la société et comment notre monde a été façonné, ils doivent étudier le passé. C’est le passé qui met en lumière la complexité des sociétés d’aujourd’hui. Au cours du processus, ils examinent les récits divergents et la manière avec laquelle nous pouvons concilier ces divergences.

La capacité des élèves à examiner les preuves, à les interpréter, à tirer leurs propres conclusions et à engager sereinement des discussions ciblées sur tous les sujets est essentielle pour une citoyenneté responsable, ainsi que pour la préparation des futurs dirigeants politiques, hommes d’affaires et professionnels.

L’histoire engage également les élèves dans la contemplation morale. Ces derniers réfléchissent à ce qu’ils sont en examinant le comportement des autres dans le passé, d’où l’importance d’enseigner l’histoire des gens ordinaires, des familles et des quartiers, et non pas seulement l’histoire des dirigeants et des hommes et femmes extraordinaires. L’histoire développe également des capacités de réflexion et de communication essentielles pour que les individus puissent interagir de manière positive au sein de la société et dans leur environnement.

Comment enseigner l’histoire

Au sein du LAH, nous travaillons depuis cinq ans à développer un modèle pédagogique pour les élèves au Liban. Nous nous concentrons sur la construction de la pensée historique. Qu’est-ce que cela signifie en réalité ? Les élèves apprennent à penser comme des historiens. Pour comprendre le passé, ils commencent par poser de grandes questions telles que : « Pourquoi la guerre a-t-elle commencé au Liban en 1975 ? ». Ils utilisent de nombreuses sources offrant des perspectives différentes, ils les analysent, les comparent, tirent leurs conclusions et développent leurs propres interprétations. Ainsi, les élèves sont formés à la pensée critique, aux perspectives, aux décisions et à une discussion plus large sur le passé.

Ce modèle pédagogique comprend également des stratégies d’enseignement qui développent les compétences et les dispositions nécessaires dans nos sociétés actuelles et futures. Dans les classes d’histoire, les élèves doivent apprendre à trouver et à utiliser les preuves : comment parler et écrire clairement et à dessein ; comment communiquer les idées en personne ou par voie électronique. Ils apprennent aussi à dialoguer : comment interagir dans une société démocratique ; comment prendre des responsabilités individuelles et collectives ; et comment nous pouvons nous réconcilier avec le passé, et donc avec le présent. En effet, l’enseignement de l’histoire devient un vecteur essentiel du développement de l’individu et de la sauvegarde des sociétés, un élément essentiel de l’éducation.

Face à l’impasse dans laquelle se trouve le programme scolaire au Liban, il est temps de revoir notre conception de l’histoire, de ses objectifs et de ses stratégies. Nous ne pouvons pas continuer à marginaliser l’enseignement de l’histoire, ce qui mène à des générations de jeunes, ignorant tout de leur passé et de la manière dont le passé a conduit au présent. Et bien que nous reconnaissions le rôle de la politique dans l’élaboration des programmes, il semble qu’il est temps de laisser le soin de concevoir le programme d’histoire aux universitaires et spécialistes, loin des conflits politiques.


* Présidente de l’Association libanaise pour l’histoire (LAH)


Les articles, enquêtes, entrevues et autres, rapportés dans ce supplément n’expriment pas nécessairement l’avis du Programme des Nations Unies pour le développement, ni celui de L'Orient-Le Jour, et ne reflètent pas le point de vue du Pnud ou de L'Orient-Le Jour. Les auteurs des articles assument seuls la responsabilité de la teneur de leur contribution.




Why Bother with History?


People live in the present and prepare for the future, so why will they bother to study the past? Why would they care to study history if historical information is available at a click of a thumb? We, at the Lebanese Association for History, are often challenged by these questions thrown at us when people learn about our mission to develop History Education. We believe that history is a powerful science that allows us to enter into the laboratory of human experiences to better understand the present. Learning history has significant impact on who we are and who we will become. It is a vehicle to peace building.

The importance of History Education has shifted in the last half century. Traditionally, history was seen as a discipline making individuals more ‘cultured’. It allowed them to quote important figures from the past, recall events, and sound as if they know everything that took place in the past. This vision required retention of names, dates, and events. However, with the internet providing us with a wealth of historical information at our fingertips, the purpose of teaching history has shifted. The current trends consider history a discipline with its own concepts and tools that contributes to higher order thinking. History Education has significant impact on our individual, civic, political, and moral identities.

The main reason why nations choose to include history in their national curricula remains building citizenship. Although governments frequently exploit it for political aims, history can contribute to building responsible citizens. It empowers individuals to approach events from many perspectives, looking into causes and effects, understanding change, evaluating significance and analyzing conflicting interpretations.

History helps us understand better the present. If we want our young learners to understand why politicians behave as they do, how society functions and how our world came to be, they need to study the past. It is the past that sheds light on the complexity of today’s societies. In the process, they consider divergent narratives and how we can reconcile with their divergence.

Students’ ability to examine evidence, consider interpretations, draw their own conclusions and engage calmly in focused conversations about any topic are essential for responsible citizenship, as well as for preparing future political leaders, business people, and professionals.

History also engages pupils in moral contemplation. Students reflect on who they are by examining how others behaved in the past. Hence the importance of teaching about ordinary people, families, neighborhoods not only about leaders and extraordinary men and women. History also develops thinking and communication skills essential for individuals to interact positively within society and environment.

How to teach history

For the past five years, we at LAH have been working on developing a classroom model for students in Lebanon. We focus on building historical thinking. What does this mean in reality? Students learn to think like historians. To understand the past, they start by asking big questions such as «why did a war start in Lebanon in 1975?», they use many sources that provide different perspectives, they analyze them, compare them, draw their conclusions and develop their own interpretations. Thus, students are trained to think critically, consider perspectives, make decisions, and contribute to a wider conversation about the past.

This classroom model also entails teaching strategies that develop skills and dispositions needed in our current, and future, societies. In history classrooms, students ought to learn how to find and use evidence; how to talk and write clearly and purposefully; how to communicate ideas in person or electronically; they learn how to engage in dialogue; how to interact in a democratic society; how to take individual and collective responsibility; and how we can reconcile with the past, and thus with the present. Indeed, history education becomes a critical vehicle to the development of the individual and the safeguarding of societies, a vital component of Education.

With the protraction of the curricular deadlock in Lebanon, it is time that we reconsider how we think about history, its aims, and strategies. We cannot continue to marginalize the teaching of history leading to generations of young people ignorant of their own past and how the past has led to the present. And, while we acknowledge the role of politics in issuing curricula, it seems that it is time to rest the task of designing the history curriculum in the hands of academics and specialists away from political wrestling.

* President of the Lebanese Association for History (LAH)

The articles, interviews and other information mentioned in this supplement do not necessarily reflect the views of the United Nations Development Programme nor of L'Orient-Le Jour. The content of the articles is the sole responsibility of the authors.

L’importance de l’histoire a évolué au cours des cinquante dernières années. Traditionnellement, l’histoire était considérée comme une discipline qui rendait les individus plus « cultivés ». Cela leur a permis de citer des personnalités du passé, de se souvenir de certains événements et de donner l’impression de connaître tout ce qui s’était déroulé aux époques...

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