En 2009, le banquier Riad Obégi publiait Risque et crédit : le certificat hypothécaire, une solution pour les pays émergents, dans lequel il introduisait au grand public un nouvel instrument bancaire devant permettre de faciliter le crédit.
Dix ans plus tard, le CHO (pour certificat hypothécaire Obégi) fait désormais l’objet d’une proposition de loi déposée au Parlement le 1er octobre 2018 et signée par dix députés de plusieurs bords politiques. « Le texte est en ce moment entre les mains des commissions mixtes », indique l’intéressé, qui avait déjà présenté les grandes lignes de cet instrument dans une interview accordée au Commerce du Levant l’année de la parution de son livre. « Nous avons rencontré près de la moitié des membres du Parlement depuis les élections législatives de mai 2018 afin de communiquer sur ses avantages », ajoute le PDG de la banque BEMO.
Cinq points de croissance en plus
Selon son créateur, le CHO « fonctionne comme un dépôt de garantie immobilière auprès d’une banque » et permet à cette dernière d’avoir plus de voilure pour libérer des liquidités et accorder davantage de crédits sur le marché. « L’idée est d’utiliser l’immobilier en tant que liquidité », résume Riad Obégi. Concrètement, le CHO permet à un propriétaire immobilier qui le souscrit de « déposer » à la banque une propriété qui lui appartient, exactement comme s’il effectuait un dépôt rémunéré, pour une durée n’excédant pas un an, selon la proposition de loi. La banque disposera de son côté d’une « garantie réelle » qui lui permettra de mobiliser une plus grande part de ses liquidités et d’emprunter plus facilement sur le marché interbancaire.
« Le principal actif dans n’importe quel pays au monde est l’immobilier. Il représente entre 10 et 20 fois le PIB, selon nos études. Et cette proportion est plus grande dans les pays les moins développés, dans lesquels il y a moins d’options pour investir l’épargne. Cela se vérifie particulièrement au Liban où beaucoup d’expatriés placent une partie de leur épargne dans l’immobilier, qu’il s’agisse de terrains ou d’immeubles. On parle de plus de 1 000 milliards de dollars dont seuls 5 % sont utilisés en tant que capital, selon nos estimations », plaide Riad Obégi. « La mobilisation de ce capital pourrait générer jusqu’à 5 points de croissance supplémentaires par an », assure-t-il.
L’autre avantage lié à la mise en œuvre du CHO, selon Riad Obégi, est qu’il va encourager l’État, les banques et les professionnels de l’immobilier à affiner la cartographie du parc immobilier libanais. La création du CHO devra ainsi s’accompagner par l’institution d’une ou plusieurs entités indépendantes – agréées par la Banque du Liban – qui seront chargées d’évaluer les biens, d’enregistrer les hypothèques et les mains-levées ou encore d’informer les personnes concernées. Ces sociétés factureront le coût des procédures liées à l’établissement des CHO aux banques.
Interrogé sur les risques liés à la généralisation des CHO, Riad Obégi considère qu’ils peuvent tous être contrôlés. « Le risque de bulle existe, mais je pense que les risques sont plutôt faibles, surtout au Liban, où il n’y a pas beaucoup de transactions par an par rapport au stock total. Le deuxième risque, c’est l’inflation en général qui serait liée à la surabondance de crédits liée à la généralisation des CHO. Mais cela peut être jugulé par la politique de la Banque centrale. Le troisième problème potentiel, c’est que l’afflux de liquidités qui se traduira par une hausse de la croissance pourra peut-être amener les dirigeants à retarder le lancement de certaines réformes qui sont essentielles pour le pays », expose-t-il encore.
Ces problématiques ne se poseront toutefois pas tout de suite, la proposition de loi ayant peu de chances d’être adoptée courant 2019, juge Riad Obégi. « Au-delà du vote de la loi, la mise en place du CHO prendra du temps et fera intervenir plusieurs instances, dont la BDL », note-t-il. D’ici là, Riad Obégi compte continuer de faire connaître le CHO au Liban comme ailleurs dans le monde – notamment au Paraguay où le CHO a également sa proposition de loi déposée au Sénat paraguayen depuis le 13 août 2018.
Le banquier doit en outre aborder le sujet demain en première partie d’une conférence de l’ancien président de la Banque mondiale, François Bourguignon, à la Résidence des Pins, un événement qui s’inscrit dans le cycle du débat d’idées organisé par l’Institut français avec le soutien de la banque BEMO.
commentaires (1)
Bonne idée à condition que les épouse/époux soit d'accord et non pas seulement le chef de famille qui est en général Monsieur le propriétaire.
Shou fi
10 h 24, le 21 mai 2019