Rechercher
Rechercher

Liban - Partielle de Tripoli

Les détracteurs de Hariri accordent leurs violons avant la bataille

Achraf Rifi annoncera sa décision le 14 mars prochain.

Achraf Rifi. Photo d’archives

C’est à une bataille électorale « chaude » que l’on est en droit d’attendre à Tripoli dans deux mois. D’autant que cette bataille, destinée à pourvoir au siège sunnite vacant de la ville (après l’annulation par le Conseil constitutionnel de la députation de Dima Jamali, relevant du courant du Futur), représente une opportunité pour le parti du Premier ministre d’assurer sa prépondérance dans les rangs de la communauté sunnite. Il n’en reste pas moins que ses détracteurs ont choisi d’accorder leurs violons avant la bataille.

Il s’agit surtout des six députés sunnites hostiles au courant du Futur et regroupés sous le label de la Rencontre consultative. D’autant que la décision du Conseil constitutionnel est intervenue à la faveur d’un recours en invalidation présenté par Taha Nagi, candidat malheureux sur la liste parrainée par les Ahbache (islamistes prosyriens), et Fayçal Karamé, député de Tripoli et membre de la Rencontre consultative sunnite. Mais il serait peu rigoureux de tenter de cerner la partielle de Tripoli à cette seule dimension. Et pour cause : le scrutin partiel est en principe fixé pour avril 2019, soit quelques mois après la mise sur pied du cabinet Hariri. Une équipe ministérielle dans laquelle les adversaires de M. Hariri ont réussi à consacrer le principe de leur représentation politique, en dépit des rapports de force au sein de la communauté sunnite. C’est ainsi qu’il conviendrait de placer la détermination qu’affichent les députés concernés à mener la bataille de la partielle jusqu’au bout.

Réunis hier au domicile de Abdel Rahim Mrad, député de la Békaa-Ouest, les parlementaires hostiles au Futur s’en sont à nouveau pris au Conseil constitutionnel et à sa décision de convoquer le collège électoral à une élection partielle. « La décision du Conseil d’invalider la députation de Dima Jamali et la convocation à une partielle sont une arnaque », a tonné la Rencontre dans un communiqué publié à l’issue de la réunion. Et d’expliquer : « Le fait de considérer que l’écart de voix (entre Dima Jamali et Taha Nagi) est insuffisant pour déclarer la victoire du candidat de la liste dite de “La dignité nationale” va à l’encontre de tous les critères logiques et légaux. » « Cette décision est un dangereux précédent portant atteinte à l’histoire et au prestige du Conseil constitutionnel », souligne aussi le texte.

Tout comme la Rencontre consultative, l’ancien ministre de la Justice Achraf Rifi, farouche opposant aux choix politiques de M. Hariri depuis l’entrée en vigueur du compromis présidentiel de 2016, s’apprête à se lancer dans la compétition. Selon un proche de M. Rifi contacté par L’Orient-Le Jour, la décision finale sera annoncée le 14 mars prochain. Il va sans dire que l’ancien ministre a soigneusement choisi cette date symbolique pour adresser plusieurs messages à son adversaire dans la rue sunnite. « M. Rifi mène la bataille pour redonner à Tripoli sa couleur politique issue du mouvement souverainiste du 14 Mars. Et cette compétition est naturellement placée sous le signe de la préservation de la Constitution et de l’accord de Taëf, ainsi que du refus de la normalisation avec le régime Assad », déclare ce proche d’Achraf Rifi, assurant que ce dernier n’entend pas se rapprocher des alliés locaux de Damas et continuera à appuyer M. Hariri là où cela s’avère nécessaire.


(Lire aussi : Partielle de Tripoli : tout le monde s’observe en attendant de trancher)


Safadi, Mikati et Kabbara

En face, le courant du Futur a déjà donné le coup d’envoi des préparatifs de la bataille. L’invalidation du mandat de Mme Jamali aurait eu l’effet d’un coup de tonnerre pour le Premier ministre Saad Hariri, selon les confidences d’une source politique bien informée à L’OLJ. Interrogé par le site web Lebanonfiles à ce sujet, Ahmad Hariri, secrétaire général du courant du Futur, a déclaré hier : « Notre équipe électorale a déjà commencé son travail deux jours après l’annonce de la décision du Conseil constitutionnel, et nous attendons sa publication dans le Journal officiel, ainsi que la publication du décret portant sur la date du scrutin. »

Concernant les alliances de sa formation qui n’a pas tardé à appuyer Dima Jamali à nouveau, M. Hariri a laissé entendre qu’un éventuel rapprochement avec l’ancien chef de gouvernement Nagib Mikati est possible, même si ce dernier temporise toujours concernant son positionnement sur l’échiquier électoral tripolitain. « Nos rapports avec M. Mikati sont bons. D’ailleurs, ils l’étaient avant la formation du cabinet », a assuré le secrétaire général du Futur. Il s’empresse toutefois d’ajouter : « Nous parions d’abord sur notre équipe électorale. Les alliances nous aident. Le siège en question appartient au courant du Futur, et nous œuvrons pour confirmer cela. » « C’est pour cette raison que la bataille de la partielle nous est importante », a encore dit M. Hariri.

Si Nagib Mikati n’a toujours pas dit son dernier mot, le parti de Saad Hariri est sûr de l’appui particulièrement significatif de Mohammad Safadi, ancien ministre et député, qui s’était retiré de la compétition électorale de mai dernier en faveur… des haririens. Une prise de position que certains seraient tentés de qualifier de « naturelle » au vu de la présence de Violette Khaïrallah Safadi, ministre d’État relevant de la quote-part du Premier ministre au sein du nouveau cabinet. Mais dans les milieux proches de Mohammad Safadi, c’est une autre explication que l’on présente à L’OLJ. M. Safadi appuie le courant du Futur sur toute la ligne, indépendamment de l’identité de ses candidats. Et pour cause : le courant du Futur représente l’écrasante majorité des sunnites du pays. Il faut donc le soutenir, ajoutent les milieux de l’ancien ministre des Finances.

Mais c’est surtout Mohammad Kabbara, député de Tripoli, qui a créé la surprise en faisant part, via des sources proches de lui, de son désir de démissionner de son poste et paver la voie à son fils, Karim, pour faire son entrée à l’hémicycle. Un choix qui n’est certainement pas sans susciter des craintes quant à la capacité du Futur à mener deux candidats à la Chambre lors de la partielle de Tripoli.

Sauf que des sources proches de l’ancien ministre du Travail confient à L’OLJ que M. Kabbara n’a pas encore pris sa décision. D’autant qu’il est encore tôt pour trancher la question dans un sens ou dans l’autre. Mohammad Kabbara est un allié de Saad Hariri et converge avec lui sur les grandes lignes politiques, ajoutent les mêmes sources, laissant entendre que MM. Hariri et Kabbara se sont récemment réunis pour discuter de la bataille attendue à Tripoli.


Lire aussi

« Dima Jamali a été le bouc émissaire qui a endossé symboliquement toutes les irrégularités du scrutin »

Invalidation de l'élection de Dima Jamali : le bloc du Futur crie au scandale, mais joue le jeu


Pour mémoire

Recours contre les résultats des législatives : le Conseil constitutionnel dément les rumeurs

Recours en invalidation : Le Conseil constitutionnel poursuit son enquête avant de se prononcer

En tout, dix-sept recours en invalidation présentés devant le Conseil constitutionnel

C’est à une bataille électorale « chaude » que l’on est en droit d’attendre à Tripoli dans deux mois. D’autant que cette bataille, destinée à pourvoir au siège sunnite vacant de la ville (après l’annulation par le Conseil constitutionnel de la députation de Dima Jamali, relevant du courant du Futur), représente une opportunité pour le parti du Premier ministre...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut