Rechercher
Rechercher

Liban - Élections

Partielle de Tripoli : tout le monde s’observe en attendant de trancher

À part la candidature, par le bloc du Futur, de Dima Jamali, il subsiste un grand nombre d’inconnues qui devraient être clarifiées au courant de cette semaine.

Tripoli se prépare à revivre une bataille électorale d’ici à deux mois. Photo Bigstock

Après l’annonce, jeudi dernier, de l’invalidation de l’élection de Dima Jamali, élue à Tripoli en mai 2018 sous les couleurs du courant du Futur, le Premier ministre Saad Hariri, chef de ce parti, a très vite apporté son appui à sa candidature pour la partielle qui découle de cette décision du Conseil constitutionnel. Mais il s’agit, jusque-là, de la seule certitude dans cette élection inopinée qui pourrait bien brouiller les cartes.

Rappelons que la députation de Mme Jamali avait été invalidée suite à un recours présenté par son concurrent Taha Nagi (représentant des Ahbache, islamistes prosyriens), candidat sur la liste du député Fayçal Karamé. Toutefois, le Conseil constitutionnel a estimé que l’écart des voix extrêmement ténu entre les deux ne justifie pas de déclarer M. Nagi vainqueur, et a décidé, par conséquent, d’appeler à une partielle qui aurait lieu seulement dans le caza de Tripoli (et non dans une circonscription plus grande incluant Minié et Denniyé, comme c’était le cas aux législatives de 2018) et suivant le scrutin majoritaire, vu l’impossibilité d’appliquer le scrutin proportionnel à une élection portant sur un seul siège. Cette configuration semble favoriser le courant du Futur, mais ce parti se dirige-t-il pour autant vers une bataille facile ?

Moustapha Allouche, membre du bureau politique du Futur, pense que le simple fait de considérer l’issue de cette bataille comme acquise reviendrait à risquer de la perdre, estimant qu’il faut s’attendre, au contraire, à une rude concurrence. « De nombreuses parties pourraient s’impliquer dans cette partielle, qui verrait peut-être un retour des services de renseignements syriens, afin de contrer le courant du Futur qui reste l’un des remparts qui résistent encore, dit-il à L’Orient-Le Jour. Quelles que soient les circonstances, il faut s’y préparer minutieusement. »

Quoi qu’il en soit, même si les contours de cette bataille ne seront vraiment connus que dans les jours qui viennent, celle-ci semble bel et bien lancée. Preuve en est, les campagnes qui visent déjà la candidate Dima Jamali et que son bureau de communication a démenties hier, appelant ses détracteurs « à respecter les règles de la démocratie ». Le communiqué parle de « vote de conventions qui portent atteinte aux religions », de « campagnes de dénigrement autour de son travail passé avec les Nations unies », etc. et les traitent de « mensonges visant à ruiner sa réputation ». Mme Jamali assure « respecter l’environnement et les coutumes de sa ville » et « ne graviter que dans le giron du Futur ».


(Lire aussi : « Dima Jamali a été le bouc émissaire qui a endossé symboliquement toutes les irrégularités du scrutin »)


La position de Mikati
Pour comprendre les contours de la bataille à Tripoli, qui devrait avoir lieu dans un délai de deux mois, il convient d’élucider plusieurs inconnues. L’une d’elles est la position qui sera adoptée par l’ancien Premier ministre Nagib Mikati, dont la liste a obtenu le plus grand nombre de voix aux législatives passées, plus de 30 000. Appuiera-t-il clairement Dima Jamali ou un autre candidat, ou préférera-t-il rester neutre comme le suggèrent les informations qui ont filtré après sa récente réunion avec Saad Hariri ? Et s’il décide de rester neutre, qu’est-ce que cela signifie pour ses électeurs ?

Les sources de l’ancien Premier ministre nous réfèrent immédiatement au communiqué publié samedi par celui-ci, en vue de répondre aux différentes rumeurs qui ont accompagné son implication présumée dans cette future élection. « Le communiqué met en avant les trois facteurs qui dicteront la décision que prendra M. Mikati, soulignent ces sources à L’OLJ. D’une part, sa relation avec le Premier ministre Saad Hariri, notamment la nouvelle page tournée après les élections législatives et la participation au gouvernement. D’autre part, l’intérêt de Tripoli. Et enfin, les pourparlers qu’il effectuera avec les différentes parties politiques de la ville. » Ces sources nient énergiquement tout ce qui a été dit sur un « échange » entre un appui au candidat du Futur contre le poste de présidence de l’Autorité de la zone économique spéciale de Tripoli (poste occupé par l’actuelle ministre de l’Intérieur Raya el-Hassan jusqu’à sa récente démission).

Des observateurs soulignent toutefois qu’il est fort peu probable que M. Mikati procède à nommer son propre candidat à la partielle. De son côté, Moustapha Allouche estime qu’il se tiendra le plus probablement à l’écart, sans appuyer clairement un candidat donné. Il affirme que « le rôle de M. Mikati est certainement important mais pas déterminant à lui tout seul, car rien ne garantit qu’il puisse opérer un transfert des nombreuses voix qu’il a obtenues aux législatives vers le candidat de son choix ».


(Lire aussi : Invalidation de l'élection de Dima Jamali : le bloc du Futur crie au scandale, mais joue le jeu)


L’inconnue Kabbara
L’autre grande inconnue de cette partielle est une surprise de dernière minute, une rumeur qui circule et se fait de plus en plus insistante : le député Mohammad Kabbara, bloc du Futur, envisagerait de présenter sa démission afin de laisser la voie à la candidature de son fils Karim, dont l’élection serait davantage favorisée par le scrutin majoritaire que proportionnel. Dans ce cas, la partielle concernerait non pas un seul, mais deux sièges, ce qui compliquerait davantage le paysage électoral et pourrait ouvrir l’appétit de nouveaux candidats.

M. Kabbara était injoignable hier. Interrogé sur la question, M. Allouche fait remarquer que le bruit court depuis trois jours déjà, sans que personne ne confirme ou n’infirme cette possibilité. Il se demande si ce n’est là qu’un moyen de tâter le terrain. « Souvenons-nous que M. Kabbara avait eu la volonté de remplacer sa candidature par celle de son fils au cours des dernières législatives, mais il avait dû en abandonner l’idée suite à l’insistance du Futur pour qu’il se présente personnellement, poursuit-il. Il n’est donc pas exclu qu’il soit tenté de profiter de cette occasion, mais rien n’est tranché au niveau du bloc. »


(Pour mémoire : Recours contre les résultats des législatives : le Conseil constitutionnel dément les rumeurs)


Et tous les autres…
Qu’il y ait un ou deux sièges à pourvoir, la dernière inconnue de taille n’est autre que le nombre et l’identité des candidats qui feront face à Dima Jamali. En premier lieu, qu’en est-il de celui qui est la cause première de cette partielle, Taha Naji, le candidat ayant présenté le recours ? Même si ses alliés ont protesté contre la partielle, estimant que l’ancien candidat aurait dû être considéré comme victorieux, M. Nagi se présentera-t-il aux élections une nouvelle fois ?

Des sources proches de Fayçal Karamé indiquent à L’OLJ que la candidature de M. Nagi à cette partielle n’a pas encore été tranchée par les Ahbache, mais que « ce parti ne présenterait pas d’autre candidat que lui, par principe ». Selon ces sources, l’attentisme est de rigueur avant « de voir quelles seront les alliances autour de la candidate du Futur, et des positions des uns et des autres, notamment l’ancien Premier ministre Nagib Mikati ». Elles reconnaissent que la décision serait plus facile à prendre s’il y a deux sièges à pourvoir plutôt qu’un seul.

Pour ce qui est des autres personnalités de Tripoli, il a été très vite question de la candidature de l’ancien ministre Achraf Rifi, de l’ancien député Misbah el-Ahdab… sachant que l’ancien ministre Mohammad Safadi a annoncé clairement appuyer Dima Jamali. Le général Rifi était injoignable hier pour un commentaire. Quant à M. Ahdab, il annonce sans détours à L’OLJ que « cette partielle sera probablement une mascarade comparable à celle des législatives passées », se fondant sur des révélations concernant des pressions politiques, des milliers d’emplois surnuméraires, des manipulations politiques en toute impunité… « Je vais appeler au boycottage des élections, puisque je considère que cette partielle doit être une occasion de faire passer un message », dit-il.

Enfin, le bruit court que Moustapha Allouche lui-même serait tenté de se porter candidat, surtout en cas de démission de Mohammad Kabbara. Le principal intéressé, qui trouve « logique » que Saad Hariri ait appuyé la candidature de Dima Jamali pour une question de principe, assure « qu’il ne se portera candidat que si son parti en décide ainsi, et non dans un autre cadre ».

Enfin, toutes les sources interrogées s’accordent à dire que le paysage électoral ne devrait pas tarder à se préciser, au courant de cette semaine probablement, étant donné le court délai de deux mois pour la tenue de la partielle.


Pour mémoire
Recours en invalidation : Le Conseil constitutionnel poursuit son enquête avant de se prononcer

En tout, dix-sept recours en invalidation présentés devant le Conseil constitutionnel

Après l’annonce, jeudi dernier, de l’invalidation de l’élection de Dima Jamali, élue à Tripoli en mai 2018 sous les couleurs du courant du Futur, le Premier ministre Saad Hariri, chef de ce parti, a très vite apporté son appui à sa candidature pour la partielle qui découle de cette décision du Conseil constitutionnel. Mais il s’agit, jusque-là, de la seule certitude dans cette...

commentaires (1)

L,INVALIDATION DE L,ELECTION DE DIMA JAMALI SEMBLE ETRE DU DOMAINE DE L,ARBITRAIRE...

LA LIBRE EXPRESSION

05 h 16, le 25 février 2019

Tous les commentaires

Commentaires (1)

  • L,INVALIDATION DE L,ELECTION DE DIMA JAMALI SEMBLE ETRE DU DOMAINE DE L,ARBITRAIRE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    05 h 16, le 25 février 2019

Retour en haut