À la COP24 de Katowice en Pologne, c’est le sprint final qui devrait aboutir à l’adoption d’un texte qui constituera une feuille de route pour l’application de l’accord de Paris… sauf imprévu qui repousserait l’échéance jusqu’au sommet prochain. Et cette éventualité avait incité, la veille, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, revenu à Katowice à l’improviste, à tirer la sonnette d’alarme. « Rater cette opportunité compromettrait notre dernière chance de stopper le changement climatique, hors de contrôle. Ce ne serait pas seulement immoral, ce serait suicidaire », avait-il lancé.
Les discussions devraient se prolonger aujourd’hui et peut-être demain, pour régler les différends qui persistent, même si, selon une source qui suit les négociations, « des progrès ont été faits, sachant qu’il reste de nombreux points à élucider ». Le président de la COP, Michal Kurtyka, a annoncé préparer un texte bâti sur les points communs qui résultent des discussions préliminaires, un texte qui devait être discuté une nouvelle fois entre groupes de pays, pour plus de pourparlers. Fait marquant : le texte provisoire a été retardé plusieurs fois hier en raison de mécontentements divers, ce qui laissait présager des pourparlers houleux qui se poursuivent.
Selon la source précitée, il reste des « lignes rouges », que ce soit par rapport aux pays développés ou en développement, comme les questions d’équité (en d’autres termes une responsabilisation adéquate et différenciée entre les pays en développement et les pays développés, considérés comme responsables historiquement de la majorité des émissions de gaz à effet de serre), ou encore de « pertes et dommages », un système de compensation pour les victimes du changement climatique, une revendication des pays les plus vulnérables qui n’a pas été avalisée jusque-là.
(Lire aussi : Le « passeport climatique » peut-il être une solution d’avenir ?)
Les questions financières
De manière générale, les pourparlers achoppent surtout sur les questions financières, qui sont toujours prioritaires. Le texte spécifique à la finance, étant donné les nombreux points de divergence, avait été donné la veille à deux ministres représentant deux grands groupes, ceux d’Égypte et d’Allemagne, pour être peaufiné. Le résultat a été présenté hier comme un package global remis à la présidence. Le texte final sur les finances devait lui aussi être soumis aux discussions, étant donné qu’il serait le résultat de compromis, selon une observatrice. Là aussi, le texte devrait être remis sur le tapis des discussions, et examiné minutieusement par la société civile pour déterminer la nature et la source des compromis effectués.
Comme toujours, les pays en développement tentent de privilégier les fonds pour ce qu’on appelle l’adaptation, soit les mesures prises pour aider des sociétés vulnérables à mieux appréhender les répercussions du réchauffement, alors que les pays développés préfèrent accorder des fonds pour la mitigation, soit les actions en vue de réduire les émissions (officiellement pour mieux responsabiliser toutes les parties). Toutefois, il semble que ce soient les finances à long terme, soit après 2025, qui continuent de poser problème, puisque plusieurs pays ne souhaitent pas régler ces questions à si longue échéance, alors que de nombreux pays en développement préfèrent davantage de prédictibilité.
Un autre sujet de discorde restait hier l’objectif de la limitation de la hausse de la température de la terre à 1,5 degré par rapport à l’ère préindustrielle, qui a plus ou moins été rejeté par quatre grands pays pétroliers dès le début de la semaine : les États-Unis, la Russie, l’Arabie saoudite et le Koweït.
Bref, malgré les « progrès » notés, les points de divergence demeurent, d’où le risque de se retrouver au final avec un texte davantage truffé de vœux pieux que de mesures concrètes. Comme le dit un négociateur, « la question sera de décider si nous acceptons une feuille de route qui ne répondrait pas aux aspirations, ou si nous devrons préférer remettre l’affaire à plus tard ».
Il est clair que la présidence polonaise tente autant que possible de faire en sorte que le texte soit adopté à Katowice. Il serait, notent des observateurs, préjudiciable de laisser la question en suspens alors que l’accord de Paris entre en vigueur en 2020.
Lire aussi
Des ONG lancent une plate-forme arabe d’action climatique
Contre le réchauffement climatique, des initiatives individuelles mises à l’honneur
À la COP24, l’OMS appelle à agir pour le climat pour sauver des vies
Climat : "nous n'allons pas du tout dans la bonne direction", avertit Guterres
Le monde appelé à faire plus pour limiter les catastrophes climatiques
Réchauffement climatique : des signaux toujours plus criants