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Moyen Orient et Monde - COP24

Contre le réchauffement climatique, des initiatives individuelles mises à l’honneur

Sasha Kramer et Trupti Jain ont changé la vie de plusieurs milliers de personnes grâce à leurs inventions.

Le compost obtenu par SOIL, un enrichisseur de la terre.

Alors que les négociations climatiques se poursuivent entre les délégations des pays à Katowice, en Pologne, dans le cadre de la 24e Conférence de l’ONU sur le climat (COP24), certains individus et organisations étaient hier à l’honneur, pour leur action en faveur de l’environnement, en vue d’aider à combattre les conséquences du réchauffement dans leur communauté. C’était aussi la journée consacrée au genre, un thème auquel la conférence cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC), qui organise ces sommets, accorde une importance toute particulière, étant donné que le réchauffement global impacte davantage les plus vulnérables, ce qui inclut la population féminine dans plusieurs régions du globe. Mais c’était aussi et surtout de leadership féminin qu’il était question hier. Voici deux des initiatives présentées comme pionnières et influentes au cours de la COP, l’une basée en Inde pour aider les agriculteurs à combattre la désertification, et l’autre qui vient en aide aux populations défavorisées à Haïti en vue de leur offrir un service sanitaire dont elles ont amplement besoin, produisant par le fait même du compost.


(Lire aussi : À la COP24, l’OMS appelle à agir pour le climat pour sauver des vies)


I- Un système sanitaire… pour du compost

Quand l’Américaine Sasha Kramer a effectué un premier voyage à Haïti en 2004, dans le cadre d’une mission humanitaire, elle ne savait pas qu’elle allait y être confrontée à l’un des principaux besoins d’une population dont une grande partie vit dans des quartiers informels : l’absence quasi totale de sanitaires. Forte de ce constat, elle a créé l’ONG SOIL, qui fournit depuis de nombreuses années des services dans ces zones défavorisées, combinant contribution à la qualité de vie des foyers et protection de l’environnement. Paradoxalement, c’est lors d’une mission d’urgence à Haïti en 2010, à la suite du terrible tremblement de terre qui a secoué ce pays cette année-là, que le système sera peaufiné.

À la COP24, Molly Case, directrice adjointe au développement de cette organisation, vient de présenter ce programme dans le cadre de l’initiative « Momentum for Change » lancée par la CCNUCC depuis quelques années pour mettre en valeur de telles initiatives. Le programme, appelé « Ekolakay » (« lakay », en haïtien, signifie maison), fournit actuellement des sanitaires mobiles et bon marché à plus de 1 100 demeures en milieu défavorisé, soit près de 6 000 individus. Il s’agit d’un système de toilettes sèches qui ne requiert pas d’accès à l’eau courante et évite toute infiltration de pollution dans le sol. Pour ce service, les foyers paient une très modique somme par mois.

Et ce n’est pas fini : les déchets (mélangés à des matières végétales) sont collectés régulièrement par SOIL, qui les transporte ensuite à deux centres de traitement, les seuls de ce type actuellement dans le pays. Du compost y est fabriqué par fermentation dans de grands bacs, durant six à neuf mois : le produit fini est de grande qualité et est écoulé sur le marché.

En quoi un tel projet aide à combattre le changement climatique et ses conséquences ? De plusieurs façons, souligne Molly Case. D’une part, ce système évite les émissions de gaz à effet de serre, beaucoup plus importantes dans les systèmes plus traditionnels. D’autre part, le compost en lui-même améliore la qualité du sol, donc sa capacité à absorber et stocker l’eau, ce qui aide en même temps à lutter contre la désertification et contre les inondations destructrices. Enfin, ce système permet d’économiser de l’eau. Cette simple initiative a permis à des populations défavorisées de relever un des grands défis de leur vie quotidienne, tout en améliorant leur environnement. SOIL, soutenue par des fondations américaines, compte poursuivre son développement en vue d’atteindre près de 25 % de la population de Cap-Haïtien.



(Lire aussi : Climat : "nous n'allons pas du tout dans la bonne direction", avertit Guterres)


II- Une invention pour capter l’eau du désert indien

Parmi les lauréats du prix décerné cette année par la Constituante femmes et genre (« Women and Gender Constituency », une des organisations ayant le statut d’observateur de la société civile de la CCNUCC) durant la COP, une femme remarquable, dont l’invention, pensée avec son mari, aura grandement aidé les agriculteurs d’une zone indienne limitrophe du Pakistan. Dans cet État du Gujarat, où des pluies torrentielles tombent seulement quelques jours par an, la désertification, combinée aux inondations occasionnelles et catastrophiques (deux facteurs aggravés par le changement climatique), avait conduit à l’abandon des terres agricoles de la localité. Pour ne rien arranger, le peu d’eau disponible est affecté par un haut taux de salinité.

C’est là qu’est intervenu l’esprit ingénieux de Trupti Jain, directrice et fondatrice de Naireeta Services Private Limited. Son invention est simple : un conduit construit dans une chambre fermée dotée d’un système de filtrage, et qui s’enfonce profondément dans la terre. Ainsi, l’eau qui tombe en grande quantité lors des rares averses est acheminée vers la chambre, filtrée de l’excès de sel auquel elle peut être exposée, puis infiltrée profondément dans la terre par le biais du large tuyau. C’est ainsi qu’elle finit par être mieux stockée dans les nappes souterraines, donc disponible pour la saison sèche. Cela permet aussi d’éviter les inondations dues au ruissellement, puisque l’eau est absorbée par le sol. Grâce à ce système performant et simple à la fois, les précipitations de la mousson sont mises à profit.

« Les agriculteurs sont revenus à leurs terres qu’ils cultivent désormais, déclare Trupti avec fierté. Leurs revenus ont augmenté de 300 % en très peu de temps ! Et les premières à en profiter sont les femmes : auparavant, elles étaient obligées de travailler en tant qu’ouvrières dans les rares exploitations, faisant, par la même occasion, travailler leurs enfants. Aujourd’hui, grâce à ce renouveau agricole dans la région, elles ont la possibilité de lancer leurs propres cultures sur des terres à nouveau disponibles, et d’accéder au statut d’agricultrices, ce qui est très gratifiant pour elles. »

Le système mis au point par Trupti connaît aujourd’hui un succès au-delà des frontières : son entreprise l’a non seulement installé dans neuf autres États indiens, mais aussi au Ghana, au Vietnam et au Bangladesh. Chacun de ses systèmes assure la sécurité alimentaire à des groupes de 30 à 100 couples, et aide à générer des revenus supplémentaires de près de 5 700 dollars par an, une aubaine pour ces populations. C’est ce qui a valu à l’inventrice une distinction internationale qui l’aide à aller encore plus de l’avant.


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