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Culture - Cimaises

Sang neuf, portraits et discours antipollution au 33e Salon d’automne

La grande exposition, désormais biennale, du musée Sursock présente une sélection resserrée mais extrêmement cohérente d’œuvres d’une nouvelle vague d’artistes libanais.

Une sélection d’œuvres présentées au 33e Salon d’automne du musée Sursock.

Avec une dominante d’œuvres porteuses d’un discours clairement détaché des contingences politiques régionales et nettement plus concerné par l’individu, ainsi que par la désintégration, la pollution et la toxicité de l’environnement, le 33e Salon d’automne du musée Sursock offre aux visiteurs un intéressant état des lieux des préoccupations et inspirations communes à la nouvelle génération d’artistes.

Après une précédente édition, en 2016, assez mitigée, le Salon de 2018 semble amorcer un net virage en faveur d’une scène artistique renouvelée. Et pour cause, les 31 pièces qui y sont exposées portent quasiment toutes les signatures de jeunes et/ou nouveaux talents… Dont certains totalement inconnus au bataillon.

« Les artistes confirmés n’ont tout simplement pas soumis leurs travaux cette année, à une ou deux exceptions près », révèle Zeina Arida, la directrice du musée Sursock. Une défection d’autant plus étonnante que cette 33e édition a enregistré le nombre le plus élevé de candidatures. Avec 358 postulants pour 31 artistes retenus. Des chiffres qui témoignent d’une surprenante vitalité artistique dans un Liban où tous les voyants sont au rouge. Mais aussi d’une approche très « consciencieusement sélective, sans être radicale, du nouveau jury », assure Zeina Arida. (À titre comparatif, il y a deux ans, 324 œuvres avaient été présentées dont 52 avaient été exposées).

Bref, un Salon 2018 parfaitement fidèle à sa vocation première : celle de faire découvrir au public les dernières tendances et orientations de l’art au Liban en offrant notamment une plateforme aux œuvres révélatrices de nouveaux talents.


Du réalisme figuratif à la réalité virtuelle

Dans cette cuvée, la peinture fait un retour marqué au figuratif et la céramique se substitue à la sculpture ; les œuvres conceptuelles se construisent de plus en plus autour de la symbolique du langage ; les images photographiques et vidéos affirment et confirment leur présence ; l’illustration aussi avec, pour la première fois, une incursion de la bande dessinée. Quant aux installations, elles gagnent du terrain en intégrant même le champ de la réalité virtuelle…

Des portraits et autoportraits qui rythment l’habile scénographie sur panneaux mobiles signée Jacques Aboukhaled (l’architecte qui avait participé aux travaux d’agrandissement du musée), aux céramiques et installations qui ponctuent l’accrochage, le vaste espace d’exposition au sous-sol du musée Sursock déroule donc, jusqu’au 14 janvier 2019, une large variété d’œuvres réalisées au Liban au cours de ces deux dernières années.

Malgré cette diversité de techniques et de médiums, il se dégage de ce Salon d’automne une impression de cohérence et d’équilibre. Et cela grâce aux trois grands thèmes que les membres du jury ont repérés dans les travaux qui leur ont été soumis. Et qui forment trois axes assez complémentaires.

Le plus évident étant le retour en force du portrait. « Il est significatif d’un repli vers soi et vers l’individuel, dans une période où l’horizon politique semble totalement obstrué », indiquent-t-ils dans leur note d’intention, relevant aussi, par ailleurs, l’absence d’œuvres traitant des désastres, débâcles et séquelles des événements régionaux…


De la dégradation et de l’éphémère…

Ensuite, la prépondérance des thématiques environnementales, et plus précisément celles de la pollution et de la toxicité. Une dégradation et une moisissure généralisées que les artistes ne se contentent pas de dénoncer dans leurs œuvres, mais qu’ils intègrent carrément à leur processus de création. Et cela à travers des protocoles divers et variés qui vont de l’impression photographique des bactéries tirées du fleuve de Beyrouth à la combustion de déchets pour façonner des bennes en céramique…

Et puis, parallèlement aux artistes concernés par les signes du langage comme éléments de codification d’un monde de plus en plus visuel et virtuel, l’accent est mis dans cette exposition sur leur conscience de la fragilité et de l’impermanence des choses. Autant dans les transferts photographiques sur supports périssables que dans les installations qui, de manière ludique ou plus troublante, questionnent l’éphémère situation du vivant…

En somme, un ensemble d’œuvres et de pratiques artistiques qui ont en commun d’être largement symptomatiques de la situation actuelle. Au Liban, peut-être plus qu’ailleurs, l’artiste reste essentiellement un témoin de son temps.


Musée Nicolas Ibrahim Sursock

Rue de l’Archevêché grec-orthodoxe, Achrafieh, Beyrouth.

Jusqu’au 14 janvier 2019.

Horaires d’ouverture : de 10h à 18h. Nocturne : les jeudis, de 12h à 21h. Fermé les mardis.



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