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Un mois monstre

La saison des arts est close. Voici que s’ouvre, d’un côté celle de Halloween et Black Friday, et de l’autre celle du livre dont nous pourrons faire provision pour l’hiver (en espérant que cette intention amènera l’hiver) au Salon qui commence le 3 novembre. Rien à dire sur la fête de la citrouille et des gargouilles, à part que cette culture globale n’est la culture de personne, importée des États-Unis comme tout ce qui est d’un goût ridicule, et déclinée en objets dérivés fabriqués en Chine comme tout ce qui est fait pour saturer les décharges en poussant à la consommation inutile. Nos chers défunts ne manqueront pas d’être attendris à l’idée que leurs petites-filles s’habillent en sorcières et leurs petits-fils en zombies, au mieux en squelettes, pour honorer leur mémoire. Quoi de plus touchant. Ils concéderont que la mort n’est pas facile à intégrer dans l’univers des vivants et qu’il faut bien la conjurer d’une manière ou d’une autre, la meilleure étant de jouer à se faire peur. Ces petites têtes grimées font d’ailleurs plaisir à voir et nous songeons en écrasant une larmichette qu’elles méritent bien leur jour de terreur, pauvres chéries, nous qui dans notre enfance, grâce à la guerre, avions Halloween tous les jours. Quant à Black Friday, ce jour de soldes monstres en ce mois de novembre où tout semble monstre, il est supposé – mais qu’importe – tomber le lendemain de Thanksgiving, célébré le 4e jeudi du mois depuis que les premiers colons anglais arrivant en Amérique ont reçu des autochtones de quoi survivre à un environnement hostile. Par cette fête on remercie la providence, qui qu’elle soit, mais pas les Indiens qu’on remerciera plus tard, autrement. Tout cela est bien compliqué quand on y pense, mais il suffit, pour simplifier, de traduire en dollars.

La fête du livre, grâce au Salon du livre francophone qui arrive vaillamment cette année à sa 25e édition, est autrement exaltante. L’un des premiers au monde en importance et en affluence, ce qui est en soi un exploit pour un petit pays comme le nôtre, cet événement libanais de la lecture – et donc de l’écriture – est une petite révolution réactionnaire. Car à notre époque qui se précipite vers le tout-virtuel, le livre sera bientôt un monstre, décidément un de plus, au sens d’objet de curiosité. Les gens disent tous, d’une même voix véhémente, que rien ne remplace pour eux le papier, le bruit, le parfum, le toucher, la sensualité et la sensorialité du papier. Ils vouent les tablettes aux gémonies, jurent que celles-ci ne sont qu’accessoires, mais on voit bien qu’éditeurs, imprimeurs et journaux souffrent énormément de la transition digitale dont ils sont les premières victimes. Pour ceux qui ont connu successivement les disquettes ou floppies, les CD et les clés USB pour enfin se perdre dans le « Cloud », nébuleuse immatérielle où flotte toute l’information et la production intellectuelle et artistique, combien pourtant est rassurante la chaleur, l’odeur, la présence amicale d’un livre, mieux, de toute une bibliothèque qui absorbe la rumeur du monde et ouate notre for intérieur. Offrons à nos enfants des livres, protégeons-les contre l’adversité.

La saison des arts est close. Voici que s’ouvre, d’un côté celle de Halloween et Black Friday, et de l’autre celle du livre dont nous pourrons faire provision pour l’hiver (en espérant que cette intention amènera l’hiver) au Salon qui commence le 3 novembre. Rien à dire sur la fête de la citrouille et des gargouilles, à part que cette culture globale n’est la culture de...

commentaires (3)

TRES INTERESSANT ARTICLE !

LA LIBRE EXPRESSION

10 h 56, le 02 novembre 2018

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Commentaires (3)

  • TRES INTERESSANT ARTICLE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 56, le 02 novembre 2018

  • Merci Fifi pour des articles qui non seulement nous ramènent au temps où Liban et civilité rimaient si bien ensenble mais aussi nous ramènent dans les rangs de gens civilisés... Merci

    Wlek Sanferlou

    00 h 11, le 02 novembre 2018

  • Oui, conjuguons ensemble le verbe lire... sur papier !

    lila

    13 h 42, le 01 novembre 2018

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