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Liban - Littoral libanais

Sur le bateau scientifique Cana, un bond en avant pour les études marines

Pollution, conséquence du changement climatique, cartographie des sous-sols marins : un nouveau programme financé par l’UE permettra au CNRS de développer ses recherches.

M. Hamzé (à droite) faisant visiter le bateau Cana à Mme Lassen et à M. Marotti, en présence de M. Fakhry. Photo CNRS

La silhouette grise du Cana se profile à la base militaire du port de Beyrouth depuis près de dix ans : l’acquisition du bateau scientifique a résulté de la coopération du gouvernement italien et du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS), et a servi pour de nombreuses études depuis. Désormais, le Cana, et avec lui le Centre d’études marines du CNRS, bénéficieront d’un nouveau programme financé en très grande partie par l’Union européenne, pour les recherches et l’achat d’équipements nouveaux et nécessaires.

Le programme ELME – Évaluation de l’environnement marin libanais – est une étude multidisciplinaire visant, selon Milad Fakhry, directeur du Centre d’études marines, à superviser la zone côtière en créant un réseau d’observation, à évaluer la biodiversité marine et les différents habitats, et à étudier les conséquences de différents facteurs tels que la pollution ou les effets du changement climatique sur les écosystèmes. La finalité reste de contribuer à une gestion efficace et durable de la côte, créer un environnement permettant de limiter la pollution marine tout en favorisant la création d’emplois durables et sensibiliser le public aux bonnes pratiques. L’originalité de l’étude est qu’elle se concentre sur deux zones, celle du Grand-Beyrouth (en gros d’Antélias à Ramlet el-Baïda), qui est l’une des portions de côte les plus polluées du pays et les plus affectées par l’activité humaine, et celle de Tyr, un littoral bien mieux entretenu, qui compte une grande réserve marine.

Le projet a été lancé hier lors d’une conférence de presse conjointe sur le bateau, tenue par Mouïn Hamzé, secrétaire général du CNRS, Christina Lassen, chef de la Délégation de l’UE au Liban, et Massimo Marotti, ambassadeur d’Italie.


(Lire aussi : Des tanks au large de Saïda, un réel atout pour les fonds marins ?)


Alerter contre le danger de tsunami

Interrogé sur la différence que fera ce programme dans l’activité du Cana, M. Fakhry souligne que « les études seront davantage axées sur le développement et les relations avec les communautés locales, donc avec plus d’application pratique qu’auparavant ». Le programme, étalé sur deux ans, aura un budget de quelque 900 000 euros, dont près de 724 000 euros assurés par l’UE.

Selon M. Fakhry, il permettra d’acquérir un équipement précieux pour étudier le milieu marin, notamment un équipement pour l’absorption atomique en vue de l’analyse des métaux lourds, un chromatographe (appareil qui permet de séparer les différentes substances présentes dans un mélange gazeux par exemple) et une bouée qui servira à mesurer les conséquences du changement climatique en mer. Les études sur le changement climatique, entre autres, porteront sur le niveau de CO2 absorbé par la mer, la température de l’eau et l’élévation du niveau de l’eau (due à la fonte des glaciers dans le monde).

Cet équipement sera utile aussi pour alerter précocement contre le danger de tsunamis en Méditerranée, selon le CNRS. Le Liban dispose en effet de deux stations d’observation à Beyrouth et à Batroun, et est en contact avec plusieurs centres dans le pourtour méditerranéen. Les événements enregistrés sont, dans une première phase, enregistrés par les centres régionaux et communiqués, dans une seconde phase, aux scientifiques qui doivent décider lesquels sont vraiment dangereux. Ce n’est qu’en troisième lieu que les informations doivent être communiquées aux forces de l’ordre pour prendre les mesures qui s’imposent, ce qui pose la question du degré de préparation du pays à faire face à de telles catastrophes qui, il faut le rappeler, ont toujours eu lieu en Méditerranée.


(Pour mémoire : Quelque 200 nouvelles espèces recensées dans les profondeurs marines du Liban)


Un grand taux de polluants à Bourj Hammoud

La nouvelle étude multidisciplinaire devrait bien sûr aborder le sujet de la pollution, celle causée par les eaux usées et par le déversement (contrôlé ou non) de déchets dans la mer. Les analyses se focaliseront sur les polluants dans les sédiments, là où ils auraient tendance à se stocker. Dans son exposé, M. Fakhry a évoqué certains résultats d’analyses déjà effectuées et publiées, montrant notamment des concentrations très importantes de plomb et d’autres polluants dans les sédiments près de la décharge « contrôlée » de Bourj Hammoud.

Un autre volet « pratique » devrait améliorer les techniques et les équipements de pêche, afin de permettre de mieux gérer les ressources en poissons des eaux libanaises et combattre des phénomènes tels que la prolifération des espèces invasives en Méditerranée. L’observation de la biodiversité marine inclura par ailleurs toutes les espèces, allant des planctons (micro-organismes au bas de la chaîne alimentaire) aux cétacés (mammifères marins).

Dans son discours, M. Hamzé a noté que « les recherches en sciences marines constituent de plus en plus une clé pour renforcer les capacités socio-économiques d’un pays ». Il a assuré qu’« ELME permettra d’effectuer des recherches complémentaires dans des zones données, afin de mieux comprendre les procédés qui régissent l’écosystème côtier et marin, dans un contexte grandissant de pressions anthropogéniques (causées par l’homme) ».

Mme Lassen a insisté sur l’importance qu’accorde l’UE à la protection des côtes et de la biodiversité marine, révélant que l’organisation internationale finance non moins de cinq projets sur le sujet au Liban. Elle a souligné que la lutte contre la pollution bactériologique et plastique, notamment, est au cœur des efforts en la matière. « Nous avons tous – citoyens, environnementalistes, autorités, pêcheurs, industriels, touristes – un intérêt à faire en sorte que la Méditerranée, les côtes libanaises incluses, soit propre, saine et productive », a-t-elle déclaré.

Pour sa part, M. Marotti a exposé la coordination avec le Liban qui a été fructueuse en matière d’amélioration des capacités et d’acquisition d’équipements pour la protection de l’environnement. Il a mis en relief le rôle de l’Italie, devenue leader au sein de l’UE en matière de coopération pour la protection de l’environnement.



La silhouette grise du Cana se profile à la base militaire du port de Beyrouth depuis près de dix ans : l’acquisition du bateau scientifique a résulté de la coopération du gouvernement italien et du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS), et a servi pour de nombreuses études depuis. Désormais, le Cana, et avec lui le Centre d’études marines du CNRS, bénéficieront...

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