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Culture - Les Musicales de Baabdath

« Jouer sur un orgue pour la première fois, c’est comme rencontrer une nouvelle personne... »

Leroy et Leleu, un duo orgue et trompette de haut vol... Photo DR

Né à Tourcoing en France, Ghislain Leroy, 36 ans, est aussi féru de piano que d’écriture. Il est surtout un ardent défenseur de la musique d’orgue, avec un répertoire qui s’étend du XVIIe siècle jusqu’à nos jours. Invité dans le cadre des Musicales de Baabdath, c’est à l’Assembly Hall de l’AUB qu’il fera tonner les orgues, demain jeudi 1er novembre à 20h, en duo avec son compatriote le trompettiste Romain Leleu (lire notre édition du mardi 30 octobre). Interview express avec un organiste passionné.

Est-ce votre premier séjour au Liban? Quelles sont vos impressions ?

C’est effectivement mon premier voyage au Liban. D’emblée, ma première impression est celle d’une immense richesse historique et culturelle, formée au cours de millénaires d’influences et d’échanges. Ce qui me paraît unique, c’est que, loin de se fondre dans une sorte de compromis, ces divers courants ont abouti à une véritable identité libanaise, ouverte et tolérante, qui s’exprime aussi bien culturellement que politiquement. À l’heure où beaucoup de peuples (notamment européens) sont tentés par le repli sur soi et les politiques de rejet, je trouve que l’exemple libanais offre un modèle de société tout à fait remarquable.


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Pourquoi avoir choisi l’orgue et pas un autre instrument de musique ?

Je vais peut-être vous décevoir, mais je n’ai aucun mérite, puisque l’orgue est l’instrument de mes parents. J’ai eu la chance de connaître très jeune des émotions artistiques décisives, au contact de musiciens tels que Jean Boyer, Philippe Lefebvre, Olivier Latry, ou encore mon propre père, qui est un merveilleux organiste. La France possède également quelques-uns des plus beaux orgues du monde. Enfant, j’ai été frappé par leur beauté visuelle et sonore. Quand vous vous tenez à la tribune de Notre-Dame de Paris ou de Saint-Sernin à Toulouse, que l’orgue se met à jouer, vous ressentez physiquement la musique, vous êtes dans le son, le sol vibre sous vos pieds : c’est une expérience inoubliable ! La question d’en faire mon métier ne s’est jamais réellement posée. La chose s’imposait avec évidence.

Quelles doivent être les qualités d’un bon organiste ?

Sa capacité d’adaptation aux instruments. Un violoniste ou un flûtiste travaille toute sa vie ou presque avec le même instrument ; pour nous, c’est toujours une découverte, dans la mesure où aucun orgue ne ressemble à un autre. Avant de pouvoir s’exprimer sur un instrument, il faut donc prendre le temps de le découvrir, d’aller à la recherche de ses qualités – elles sont parfois évidentes, d’autres fois moins – et conditionner son propre jeu pour que celui-ci sonne au service de l’œuvre que l’on a choisi d’interpréter. La seconde qualité indispensable, qui est complémentaire, c’est la culture de l’instrument, qui permet de se rapprocher de l’idéal des compositeurs, des sonorités dont ils disposaient. L’enregistrement, depuis les années 60, a beaucoup fait pour cela en nous permettant de mieux connaître en particulier les instruments historiques européens. Au fond, jouer sur un orgue pour la première fois, c’est comme rencontrer une nouvelle personne : il y a un temps d’apprivoisement mutuel, de mise en phase qui demande une certaine disponibilité. Je me réjouis d’ailleurs de découvrir l’orgue de l’Université américaine à l’occasion de ce concert à Beyrouth. C’est un instrument de concert très complet du célèbre atelier danois Marcussen, probablement d’une qualité excellente.

Quels sont vos interprètes d’orgue favoris ?

Plusieurs personnalités m’ont profondément marqué dans ma jeunesse, et elles restent pour moi comme des boussoles. Outre les personnes citées plus haut, je pourrais ajouter Louis Robilliard, Michel Chapuis, Harald Vogel et, plus proche de nous, Wolfgang Zerer, ou encore Michel Boursier. J’admire la maîtrise, le talent et aussi une certaine forme d’indépendance chez ces musiciens ; ils ont su tracer leur voie sans céder aux modes. Un artiste, pour moi, doit être une personne sensible, humble et courageuse.


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Y a-t-il encore une partition pour orgue que vous rêvez d’interpréter ?

Je pense avoir joué déjà beaucoup de choses ! Je suis d’ailleurs régulièrement amené à créer de nouvelles œuvres et je dois dire que ce travail me passionne. Parmi mes compositeurs actuels favoris figurent Thomas Lacôte, Valéry Aubertin ou encore le compositeur belge Bernard Foccroulle. Voilà peut-être la réponse : la musique que je rêve d’interpréter à l’orgue, c’est tout ce que le talent de ces compositeurs contemporains nous réserve pour les années qui viennent.

Quel menu avez-vous concocté pour les auditeurs libanais ?

Nous avons voulu, avec Romain Leleu, proposer un programme à la fois varié et ouvert sur différentes esthétiques, avec des œuvres originales et plusieurs transcriptions ou arrangements pour notre duo. Je reprends volontiers votre image du menu, car en général, nous élaborons nos programmes selon l’envie du moment ! Nous ne cherchons jamais à nous limiter à une certaine thématique ni à opter absolument pour un ordre chronologique. L’idée serait plus celle d’un parcours musical constitué d’œuvres connues pour certaines, peu jouées pour d’autres, voire inédites, tout en proposant un ensemble coloré et cohérent au final. Ainsi vous pourrez entendre un prélude et fugue de Jean-Sébastien Bach, un extrait d’opéra de Purcell, mais aussi de la musique des XIXe et XXe siècles, sans oublier des œuvres plus légères qui mettront à l’honneur la trompette dans sa dimension virtuose et populaire.

Avez-vous un message à transmettre au public qui viendra vous écouter ce soir ?

Remercier les organisateurs de ce concert d’associer l’orgue à la programmation, c’est une initiative bien rare encore au Proche-Orient, je trouve. Quant au public, j’aimerais lui dire, tout simplement, « soyez les bienvenus ».


Jeudi 1er novembre, à 20h, à l’Assembly Hall de l’AUB.



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