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Économie - Repère

« L’économie libanaise peut être redressée si les réformes sont rapidement lancées »

La Conseil économique et social réitère son appel à réformer l’économie, estimant que le Liban n’est pas au bord de l’effondrement.

La majorité des infrastructures du pays est saturée, en particulier le réseau routier. Photo : P.H.B.

Alors que les tractations entre les différents partis politiques pourraient enfin déboucher sur la formation d’un nouvel exécutif près d’un semestre après les législatives de mai, le président du Conseil économique et social (CES), Charles Arbid, a estimé samedi que le pays n’était pas au bord de l’effondrement. « L’économie peut être redressée si les réformes identifiées sont rapidement lancées », a estimé M. Arbid, lors d’une conférence sur ce thème organisée à Tripoli par le Tripoli Leaders Lions Club en collaboration avec la Fondation Safadi. Un constat répété fin septembre lors d’une mobilisation de la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL) et de plusieurs organisations patronales pour dénoncer le blocage de la formation du gouvernement.

Les appels du président du CES – organe consultatif rattaché au Conseil des ministres et qui représente la voix du secteur privé dans le processus d’élaboration des politiques économiques et sociales – s’inscrivent en outre dans la lignée des recommandations de la plupart des organisations et agences qui surveillent l’évolution de la conjoncture libanaise, avec plus ou moins d’optimisme. Réuni avec la Banque mondiale à Bali il y a un peu plus d’une semaine, le Fonds monétaire international a par exemple abaissé de 1,5 % à 1 % sa prévision de croissance pour le Liban en 2018. Le FMI a en outre estimé que le déficit public devrait atteindre 9,7 % du PIB à la fin de l’année, contre 6 % en 2017, pour un ratio dette/PIB passant de 146,8 % à 150 % et un déficit de la balance courante glissant de 22,8 % à 25,6 %. Une situation aussi bien liée aux conséquences de l’enlisement du conflit syrien, qui a éclaté en 2011, qu’à la paralysie chronique des institutions liées aux tensions politiques dans le pays.


CEDRE et McKinsey

Dans son intervention, M. Arbid a réitéré les quatre axes prioritaires auxquels le nouvel exécutif doit s’atteler.

Première priorité : la mise en œuvre des projets de réhabilitation des infrastructures présentés à la conférence dite CEDRE et qui doivent être financés via plus de 11 milliards de dollars en prêts et dons promis par les soutiens du pays. Le déblocage de cette aide est conditionné à la mise en œuvre d’efforts concrets pour redresser les finances publiques du pays. Cela passe notamment par une refonte du secteur de l’électricité – avec, en finalité, la disparition des subventions sur le fioul consommé par Électricité du Liban (EDL) pour produire du courant. Lors d’une conférence de presse le 11 octobre, l’ancien ministre Charbel Nahas, qui dirige le mouvement « Citoyens et citoyennes dans un État », avait souligné qu’une mise en œuvre chaotique du processus de la CEDRE alourdirait considérablement l’endettement du pays, alors que la dette publique a dépassé les 83 milliards de dollars au premier semestre. La majorité des infrastructures du pays est saturée, en particulier le réseau routier.

En second lieu, le pays doit commencer à appliquer le plan de diversification de l’économie proposé par le gouvernement sortant et qui reprend les travaux du cabinet de conseil international McKinsey. Ce plan, qui s’inscrit lui aussi dans le cadre du processus de la CEDRE, vise notamment à augmenter le niveau des investissements publics et privés, garantir la stabilité économique du pays et renforcer ses exportations. L’une des mesures qui a le plus fait couler d’encre consiste à légaliser la culture du cannabis et autoriser son utilisation à des fins médicinales. Ce plan doit encore être approuvé par le nouvel exécutif.


Grille des salaires

M. Arbid a ensuite mis en avant la nécessité d’engager la parole des partis politiques dans le processus d’assainissement de l’État et de ses finances, faisant référence à une charte de 22 points qui doit être présentée en Conseil des ministres. Le document, qui doit en principe être approuvé par tous les partis, comprend un engagement à réduire le déficit public. Un engagement d’autant plus impératif que plusieurs membres de la commission parlementaire des Finances et du Budget ont dénoncé cette semaine des dérives clientélistes dans le processus de recrutement des fonctionnaires, alors que les rémunérations dans le secteur public constituent l’un des plus importants postes de dépenses du budget de l’État. La réduction de la taille du secteur public a également été défendue par le directeur du département de recherche du groupe Byblos Bank, Nassib Ghobril, présent lors de la conférence. M. Ghobril a notamment qualifié de « désastreux » le relèvement de la grille des salaires de la fonction publique adopté pendant l’été 2017 et dont les estimations initiales, à 1 200 milliards de livres, auraient été largement dépassées.

Le dernier volet consiste à renforcer la protection sociale au Liban. Si aucune étude officielle et actualisée ne permet de mesurer la pauvreté au Liban, le Centre consultatif d’études et de documentation – un centre de recherches privé basé au Liban – avait estimé que plus d’un tiers des familles libanaises vivaient dans la pauvreté en 2015. Il reste que le renforcement de la protection sociale au Liban devra forcément passer par une réforme de la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS) et par la régularisation de la dette de l’État (1,9 milliard à fin 2017) vis-à-vis de cet organisme. La mise en place d’une politique du logement social en bonne et due forme est également une des pistes privilégiées par le président du CES, qui y voit une alternative nécessaire au système de subventions des prêts au logement qui ont été entretenus par la Banque du Liban ces dernières années et dont la suspension même temporaire a contribué à plonger le secteur immobilier dans la crise cette année.


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commentaires (4)

Avec "si" on pourrait mettre Lutèce en bouteille comme dit le bon vieux dicton Guatemaltèque ...

Remy Martin

16 h 14, le 22 octobre 2018

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Commentaires (4)

  • Avec "si" on pourrait mettre Lutèce en bouteille comme dit le bon vieux dicton Guatemaltèque ...

    Remy Martin

    16 h 14, le 22 octobre 2018

  • Selon l'article, la conférence n'a pas remis en question la structure même du système au Liban qui rémunère la rente et rend tout investissement productif impossible probablement parce que les organisateurs sont les premiers à profiter de ce système. En ce qui concerne la taille du secteur publique, elle représente 12% du PIB au Liban et un tiers sert la dette que ces bons messieurs détiennent. Comment pouvons-nous parler d'une réduction du secteur publique...Nous avons besoin au Liban d'un "Mieux-État" pas d'un "Moins-État"... En fait, un État tout court, ce que ces messieurs sont incapables de concevoir et de construire.

    Mounir Doumani

    13 h 32, le 22 octobre 2018

  • FAUT-IL AUSSI QUE L,ABRUTISSEMENT DISPARAISSE CE QUI LOIN D,ETRE LE CAS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 51, le 22 octobre 2018

  • Il y a un hic. Ce pays est plein de libanais.

    M.E

    07 h 04, le 22 octobre 2018

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