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Moyen Orient et Monde - Afghanistan

Sécurité et pourparlers de paix en question au lendemain de l’attaque talibane

La police nationale afghane portant le cercueil du général Razik, le chef de la police de Kandahar, mort dans l’attaque des talibans. Ismail Sameem/Reuters

La spectaculaire attaque jeudi d’un complexe ultrasécurisé en Afghanistan est un succès militaire pour les talibans qui menace de déstabiliser le sud du pays et de torpiller une récente ébauche de pourparlers de paix, estimaient hier des analystes.

Alors qu’un aréopage de hauts gradés et de responsables venait de conclure une réunion dédiée à la sécurité des élections législatives prévues aujourd’hui dans le pays, un garde du corps du gouverneur de la province de Kandahar en treillis militaire a ouvert le feu. C’était « un infiltré », ont indiqué les talibans dans leur revendication juste après l’assaut.

En quelques secondes, le chef de la police de Kandahar (Sud), le général Abdul Raziq, était abattu, de même que le chef des services secrets de la province et un journaliste de la télévision d’État. Le général américain Scott Miller, commandant en chef des troupes de l’OTAN en Afghanistan, s’en est sorti indemne, bien que les talibans aient affirmé l’avoir visé, de même que le général Raziq.

« Je n’étais pas la cible. C’était un espace confiné très étroit mais j’estime que je n’étais pas visé », a-t-il déclaré hier devant les caméras alors qu’il saluait les services de sécurité dans la capitale. Trois personnes en lien avec les faits ont été arrêtées, a annoncé le ministère de l’Intérieur. Le général Raziq « avait tenus les talibans en échec à Kandahar, berceau de leur mouvement et leur capitale spirituelle », estime l’analyste Rahimullah Yusufzai, spécialiste du groupe insurgé. Sa mort « est l’une des principales réussites des talibans au cours de cette guerre », estime-t-il. « C’est lui qui garantissait la sécurité. Il faut s’attendre à une débâcle à Kandahar », renchérit un diplomate étranger.

Pour les autorités, la disparition du général tombe d’autant plus mal que l’Afghanistan s’apprête à voter aujourd’hui pour renouveler son Parlement dans un climat sécuritaire très tendu. « Les forces de sécurité, qui se préparaient à protéger les bureaux de vote, se retrouvent sans chef à leur tête. Une attaque imminente des talibans contre Kandahar ne peut être exclue », abonde le Réseau d’analystes en Afghanistan (AAN). Le ministre américain de la Défense Jim Mattis a au contraire affirmé que l’assassinat du général Raziq ne changerait rien à la situation sécuritaire dans la province. « L’Afghanistan perd tragiquement un patriote. Mais je ne crois pas que cela aura un effet à long terme sur la région », a-t-il dit hier en marge d’un sommet sur la sécurité à Singapour.

Intéressés par la paix ?

Pour le chercheur du groupe de réflexion américain Wilson Center, Michael Kugelman, la réussite de cette attaque « va encourager l’insurrection talibane qui est à l’offensive depuis un bon moment ». Les talibans, qui contrôlent de vastes pans du pays, sont parvenus ces derniers mois à s’emparer de nouveaux territoires et s’en sont même pris à des capitales provinciales.

L’intensification de leurs attaques est perçue comme une volonté de se présenter en position de force à la table des négociations lors de futurs pourparlers de paix.

Une délégation talibane a rencontré au moins par deux fois ces derniers mois des hauts représentants américains, faisant naître l’espoir d’un règlement pacifique à l’insurrection débutée après l’intervention américaine de 2001. Mais selon des analystes, cette attaque pourrait grandement compromettre ces efforts. « Cela soulève la question de savoir si les talibans sont réellement intéressés par ces pourparlers de paix », indique M. Yusufzai. « Il est difficile d’imaginer comment le gouvernement américain pourra défendre la tenue de pourparlers de paix avec une organisation qui prétend avoir tenté de tuer leur commandant suprême », souligne l’AAN.

Pour l’heure, les élections dans la province ont été reportées pour au moins une semaine, a indiqué vendredi la présidence afghane.

D’autres attaques talibanes ont repris vendredi dans le reste du pays pour entraver le processus électoral. Des attentats contre les centres de vote sont craints samedi alors que des dizaines de civils ont déjà perdu la vie lors de réunions électorales.

Allison JACKSON/AFP

La spectaculaire attaque jeudi d’un complexe ultrasécurisé en Afghanistan est un succès militaire pour les talibans qui menace de déstabiliser le sud du pays et de torpiller une récente ébauche de pourparlers de paix, estimaient hier des analystes.Alors qu’un aréopage de hauts gradés et de responsables venait de conclure une réunion dédiée à la sécurité des élections...

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