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Le village préféré des Libanais - 2018 - Le village préféré des Libanais

#7 Jouaya, le paradis des émigrés d’Afrique

Les oliviers sont très présents à Jouaya et dans ses alentours. photo Anne Ilcinkas

Oubliez l’espresso avec un nuage de lait. Aucun hôtel, ni restaurant ni café-trottoir. Pourquoi faire ? À Jouaya, l’habitant aime accueillir chez lui : « Ahlan wa sahlan fikon, bi bioutna. »
Nichée à 14 km à l’est de Tyr, la pittoresque bourgade aux cinq collines s’étend sur 10,3 km. Ce n’est pas le village le plus attractif ou le plus innovant ; et dans la catégorie trésor-architectural-patrimoine, il ne rafle pas la mise. Mais Jouaya fait partie de ces villages où la solidarité est exemplaire ; un village dont les riches expatriés ont tricoté l’histoire.

Il y a très longtemps, des membres des familles Daher, Jaafar, Hammoud, Jammal, Fadlallah, Akar, Fawaz, Dayekh, Saïdi et d’autres, ont quitté le pays pour faire fortune en Argentine et en Afrique, principalement au Nigeria et en Côte d’Ivoire. De retour au village où ils sont nés, et qui est resté gravé dans leur mémoire, ils ont rivalisé d’imagination pour partager leur success story : une suite ininterrompue de résidences cossues construites à grands frais, qui se donnent des allures de panthéon, de Trianon, ou de donjon. Jouaya, incarnation du paradis des émigrés, dénote un vif engouement pour l’opulence et l’aisance. La maison en forme de bateau et l’autre sur le toit de laquelle était rivé un avion Cessna ont toutefois disparu. « Effondrées », à en croire notre jeune guide Moustafa Akar. Il n’en reste que des terrains vagues et des photos jaunies.
Dans la rue appelée Nigeria, en hommage à l’eldorado africain, c’est à qui fait plus grand, plus voyant. C’est la loi du milieu. Mais ce n’est pas une approche généralisée. Certains, qui n’aspirent qu’à un juste retour aux sources, se sont repliés sur des bâtisses traditionnelles ou des villas sans enflures ni dorures, dont les jardins garnis d’arbres fruitiers, de rosiers et de lavandes, offrent une palette d’éden. L’olivier reste cependant l’emblème du paysage. 




Le jackpot
Grâce aux 18 000 expatriés, Jouaya et ses 2 000 habitants ont reçu leur part du pactole. Les émigrés n’ont mis aucun bémol à leur générosité, en contribuant au développement de l’agglomération et en œuvrant pour les familles défavorisées. Plus de mille unités d’habitations ont été financées par les familles Hammoud, Maki, Soufan, Fawaz et Saïdi, pour loger les plus démunis du village, raconte le président de la municipalité hajj Hassan Jechi. Pendant la guerre du Liban, Jawad Reda a fait bâtir une soixantaine de maisons individuelles pour la population qui a fui Nabaa et Beyrouth. En 1999, Ali Jammal a investi dans la construction de l’Institut universitaire de technologie JUC et son campus. Dès les années 50, Kamel el-Saïdi avait mis en place garderie, établissement scolaire et école technique qui a desservi Jouaya et un nombre de villages. Une one day clinic, chargée d’accueillir et de prendre en charge les malades, avant leur transfert, si besoin, dans un hôpital à Tyr, et un centre de soins spécialisé pour toxicomanes ont été également mis en œuvre. Sans oublier le sport : au club inauguré en 1962, le Volley-ball reste très populaire chez les jeunes.

Sur une des collines, un quartier excentré dit Jabal el-Zaatar (le mont du thym), de vastes terrains ont été offerts par Nemr Hammoud à l’institution al-Mabarrat al-islamiya, qui a installé des établissements scolaires et pensionnats pour orphelins, un asile de vieillards et une bibliothèque. L’ensemble offre une belle architecture d’inspiration ottomane. Toujours dans ce quartier, collé au Maqam al-Sayyah, se construit « la plus grande mosquée du Liban », assure le moukhtar Mohammad Hussein Jammal.
À la question de savoir quelles sont les célébrités du village, hajj Hassan Jechi cite Joe Hammoud, ancien député et sixième époux de l’actrice et diva de la musique arabe Sabah, le nouveau député élu Hussein Jechi, ainsi que l’économiste et ancien vice-gouverneur de la Banque du Liban Nasser Saïdi.

Points forts vs points faibles
Pour garder en mémoire un peu d’histoire, le vieux souk du village, ses ruelles pavées et sa mosquée datant du XIXe siècle ont été restaurés. Autrefois se tenait « l’incontournable » marché traditionnel des bouchers qui venaient, tous les samedis, proposer « la bonne » viande pour cuisiner la fraké. Une recette à base de viande crue pilée, non pas dans un grand mortier ou jorn, comme pour la kebbé nayyé, mais entre deux grandes pierres. Les lentilles rouges au bourghol sont l’autre plat favori.
Ce qui est impressionnant dans ce village, c’est l’absence de banderoles des partis politiques et d’affiches de martyrs ; on n’entend pas un seul coup de klaxon ou de signe d’énervement ; pas un bruit de machine ; pas d’acrobaties sur moto ni de radios tonitruantes qui sillonnent les rues et importunent les habitants : calme et harmonie règnent dans le village. Tout est zen. Tout est clean.
Ce qui est frappant toutefois, c’est qu’aucun vestige historique n’a été conservé. Le paysage qui abritait Wadi al-Maghawir (les grottes) et Deir Tanna, cimetière des premiers chrétiens, « al-Nasara », a été détruit par les bulldozers des bâtisseurs de villas et les occupations dévastatrices des Israéliens en 1978 et 1982. Le passé est à jamais effacé. Mais rien ne ralentit la course de la vie, surtout pas à Jouaya.


Comment y accéder

Vous y accédez par la ville de Tyr, en prenant la route de Bourj al-Chemali, vous continuez à Bazourieh et Wadi Jilo, puis vous voilà à Jouaya.

À ne pas rater

-La vieille mosquée.
-Le bâtiment de l’Association islamique de bienfaisance (al-Mabarrat), ainsi que le quartier où il se situe pour admirer les demeures à l’architecture ottomane.
-Les villas à l’architecture atypique.
-Et toutes les beautés de la nature, tellement généreuse, des alentours et de l’ensemble du caza de Tyr.

Fiche technique

– Nombre d’habitants :  20 000 habitants, dont 18 000 ont émigré. 
– Président du conseil municipal : hajj Hassan Jechi.
– Nombre d’hôtels et de restaurants : pas d’établissements hôteliers à Jouaya.  Toutefois, Tyr, qui est située à 14 kilomètres du village, abrite plusieurs hôtels, dont al-Fanar (07-741111) qui jouxte le vieux phare de Tyr, Dar Alma (07-740082), al-Yasmine (03-372888), Murex (07-347111), Platinum (07-344666) et, bien entendu, le Rest House (07-742000).
– Altitude : varie entre 250 et 350 mètres.
– Météo : chaude, à l’instar de tout le littoral. 
– Sites à voir : le vieux souk, la vieille mosquée, le quartier dit Jabal el-Zaatar et les villas installées sur les cinq collines.


Oubliez l’espresso avec un nuage de lait. Aucun hôtel, ni restaurant ni café-trottoir. Pourquoi faire ? À Jouaya, l’habitant aime accueillir chez lui : « Ahlan wa sahlan fikon, bi bioutna. »Nichée à 14 km à l’est de Tyr, la pittoresque bourgade aux cinq collines s’étend sur 10,3 km. Ce n’est pas le village le plus attractif ou le plus innovant ; et dans la catégorie...

commentaires (2)

"Les beautés de la nature, tellement généreuse, des alentours et de l’ensemble du caza de Tyr". C'est vrai, cette région du sud du Liban est très belle comme on voit aussi dans le vidéo quand on regarde les collines avec les arbres d'oliviers.

Stes David

09 h 32, le 27 juillet 2018

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Commentaires (2)

  • "Les beautés de la nature, tellement généreuse, des alentours et de l’ensemble du caza de Tyr". C'est vrai, cette région du sud du Liban est très belle comme on voit aussi dans le vidéo quand on regarde les collines avec les arbres d'oliviers.

    Stes David

    09 h 32, le 27 juillet 2018

  • Et quel interêt présente ce village où il ne reste aucun vestige historique, que des constructions modernes sans charme???

    Marionet

    23 h 59, le 18 juillet 2018

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