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À La Une - Ukraine

La fausse mort de Babtchenko, mauvaise nouvelle pour les médias à l'heure des fake news

"Pour faire échec à un attentat présumé contre Arkadi Babtchenko, fallait-il passer par pareille supercherie?", s'interroge toutefois Philippe Leruth, président de la Fédération internationale des journalistes.

A l'heure des "fake news", la "fausse mort" du journaliste russe Arkadi Babtchenko orchestrée par l'Ukraine fait redouter aux médias des difficultés toujours plus importantes pour lutter contre la propagande et la désinformation. Photo AFP PHOTO/ UNIAN/ INNA SOKOLOVSKA

A l'heure des "fake news", la "fausse mort" du journaliste russe Arkadi Babtchenko orchestrée par l'Ukraine fait redouter aux médias des difficultés toujours plus importantes pour lutter contre la propagande et la désinformation.

Vingt-quatre heures après l'annonce de sa mort par les autorités ukrainiennes, relayée par la presse du monde entier, le journaliste russe critique du Kremlin est réapparu en pleine conférence de presse, expliquant que cette mise en scène visait à prévenir une tentative d'assassinat le visant.

"Pour faire échec à un attentat présumé contre Arkadi Babtchenko, fallait-il passer par pareille supercherie?", s'interroge toutefois Philippe Leruth, président de la Fédération internationale des journalistes (FIJ) qui compte 600.000 membres dans 146 pays.
"En répandant faussement la nouvelle de son assassinat, les autorités ukrainiennes ont gravement porté atteinte à la crédibilité de l'information, et leur communication court le risque d'être prise pour une opération de propagande", déplore-t-il.

De nombreux journalistes ont twitté leur agacement, à l'instar de Lindsey Hilsum, journaliste de la chaîne britannique Channel 4: "Donc maintenant à chaque fois qu'un journaliste est assassiné, les responsables vont lâcher leurs propagandistes et leurs robots pour dire que c'est une fake news. Merci les services de sécurité ukrainiens, c'est très utile pour tous ceux qui se préoccupent de la sécurité des journalistes."
Une question qui est également soulevée par le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), une ONG basée à New York, qui juge que "cette mesure extrême peut potentiellement miner la confiance du public envers les journalistes et nettement réduire l'indignation quand ils sont tués".
"De nombreuses voix, notamment dans le milieu journalistique, estiment que ce stratagème était une mauvaise idée à l'heure où la lutte contre les fausses informations est quotidienne et où les vraies informations sont requalifiées en +fake news+ à chaque fois qu'un homme politique, de Washington au Kremlin, y trouve son intérêt", insiste aussi le New York Times.


(Lire aussi : "Mon but était de rester en vie" : le journaliste Babtchenko se justifie face aux critiques)


"Pain bénit pour les complotistes"
Le quotidien français Le Monde redoute, dans un éditorial, que cette mise en scène ne "donne du grain à moudre aux fanatiques des théories du complot et autres pourfendeurs des médias et des journalistes, nombreux à triompher sur les réseaux sociaux mercredi".
"Rien ne comble plus d'aise les adeptes des +fake news+ que de voir les médias classiques pris au piège de ces fausses informations, que nous mettons tant d'énergie à combattre", déplore le journal.
"Cela donne le sentiment que les journalistes peuvent être en connivence avec les services secrets. C'est du pain bénit pour les paranoïaques et complotistes de tout poil. A un moment où la confiance dans l'information est tellement altérée, un État qui joue ainsi avec la vérité rend la situation encore plus compliquée", abonde le secrétaire général de Reporters sans frontières, Christophe Deloire.
Pour les universitaires, cette affaire pose aussi la question de la crédibilité des sources.

"C'est un vrai problème pour les médias car cela veut dire qu'ils ne peuvent plus croire personne et que le public ne va plus croire personne. Si demain le gouvernement français annonce un attentat, est-ce qu'on va les croire? Est-ce qu'on doit vérifier toutes les annonces faites par des sources officielles?", s'interroge Patrick Eveno, historien des médias à l'Université Paris-I.
Pour son confrère historien Fabrice d'Almeida, "cette affaire pose le problème de la vérification des faits, notamment dans des territoires lointains, avec des protagonistes peu connus, à un moment où la presse a peu de moyens".

Relativisant les conséquences pour les médias de cette fausse mort, il rappelle toutefois qu'il y a eu dans l'histoire "beaucoup d'exemples où des journalistes ont été floués par des gouvernements", citant notamment l'affaire du réfugié roumain Virgil Tanase en 1982, menacé par le régime de Bucarest, dont les renseignements français avaient organisé l'enlèvement pour faire croire à sa mort.


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