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Liban - Législatives 2018

Gebran Bassil pratiquement boudé dans le caza de Zghorta

Frangié tourne en dérision la tournée du chef du CPL.

Gebran Bassil, samedi, à Zghorta. Photo ANI

Le ministre Gebran Bassil semble déterminé à faire acte de présence, même dans les régions où il n’a a priori que très peu d’envergure électorale. C’est vers Zghorta qu’il s’est tourné en fin de semaine, avant de se rendre dans le jurd du Kesrouan. Dans ces deux cazas, la tiédeur des habitants à son égard s’est fait nettement ressentir, se traduisant par la fadeur, parfois l’échec avéré, de plus d’un de ses meetings.

À Zghorta, considéré comme le fief du député Sleiman Frangié, la visite était comme une pilule qu’on cherchait à faire avaler aux habitants. Des banderoles hissées pour accueillir Gebran Bassil, notamment sur la route menant à la ville de Zghorta, ont été descendues par des locaux. L’un d’eux, voyant une banderole soutenue par un arbre de sa plantation, aurait menacé un agent de sécurité d’en scier le tronc s’il s’obstinait à la maintenir, rapporte un habitant. Deux agents de police ont dû en outre être affectés à la garde d’une banderole située à l’entrée de Zghorta, maintes fois descendue par les habitants, selon des versions concordantes. C’est sous « le parrainage » du mohafez du Nord, Ramzi Nohra, que la visite s’est déroulée. Entendre par parrainage le chantage exercé par le mohafez sur les municipalités de Zghorta en « menaçant de bloquer leurs formalités au niveau du mohafazat si elles entravaient la visite de Gebran Bassil ». Cet exemple est cité par des milieux des Marada à L’Orient-Le Jour, pour décrire « l’abus de pouvoir exercé par le pouvoir à des fins électorales, quitte à enfreindre les lois et la logique d’État ».

Des sources proches du Courant patriotique libre (CPL) elles-mêmes rapportent que le ministre Pierre Raffoul, originaire de Miziara et candidat à Zghorta, s’est fait un point d’honneur de ne décliner aucune demande exprimée par ses visiteurs, facilitant entre autres des nominations à outrance, notamment au sein de l’institution militaire. D’ailleurs, Tony Sleimane Frangié a évoqué hier, lors d’une visite dans le village de Karmsaddé, « ceux qui sacrifient l’argent de l’État et la sécurité pour bâtir des leaderships illusoires, voués à s’effondrer dès leur sortie du pouvoir ».


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C’est au domicile de M. Raffoul que Gebran Bassil a entamé sa visite, en la plaçant sous le signe du « partenariat, tel que rétabli par le régime ». Après le déjeuner, les deux hommes se sont rendus à l’église Mar Sarkis-et-Bakhos pour une rencontre avec les habitants. Après une apologie faite par Pierre Raffoul de Gebran Bassil, en qui il a dit voir « la garantie de l’avenir de nos enfants », ce dernier a plaidé pour « l’unité des Libanais même en période électorale » et mis en garde contre une rivalité susceptible, selon lui, de se traduire par « des actes de violence, délibérés ou non, qu’il est de notre devoir d’interdire ». Ce à quoi le leader des Marada, le député Sleiman Frangié, a indirectement répondu, lors d’une rencontre hier avec l’équipe du numérique de la Fondation des Marada à Bnechii, en écartant l’option de la violence. « Nous n’avons jamais tenté d’éliminer le CPL, c’est le CPL qui a tenté de le faire avec nous. Leur problème avec nous c’est que nous existons. Et à leurs yeux, tant que nous existons, nous constituons un danger », un obstacle face à « celui qui veut se faire le passage obligé de tous les chrétiens », a déclaré M. Frangié.

Selon des sources proches des Marada, ce parti a choisi de rester neutre par rapport à la visite de M. Bassil, au vu du maintien de banderoles, en dépit des réactions spontanées des habitants. « Si les Marada voulaient empêcher cette visite, il va sans dire qu’elle n’aurait pas eu lieu », selon ces sources. Lors des législatives de 2009, le nombre de votants relevant du Courant patriotique libre était de près de 800 sur quelque 20 000 électeurs.

Le chef du CPL a également inclus dans sa tournée les villages du caza à large majorité sunnite, hissant son parti au rang de « garant que le conflit politique ne se transformera pas en conflit extrapolitique ». Le village de Fouar en particulier, connu pour être le village de bédouins naturalisés, semble avoir été récemment séduit par les bons offices de Pierre Raffoul, devenu proche du chef du conseil municipal du village, le cheikh Hamad Khodr. C’est devant les habitants que M. Bassil a plaidé pour « la souveraineté et la liberté, dans le cadre du partenariat interne ». À Miriata, village sunnite répondant de différents partis politiques, l’accueil s’est fait moins chaleureux. Certains acteurs du terrain ont fait état d’un « échec ». Certes, le ministre a été reçu par le coordinateur local du courant du Futur, mais ce dernier ne serait pas représentatif de toutes les composantes du village, lesquelles répondraient de l’ancien Premier ministre Nagib Mikati, l’ancien ministre Fayçal Karamé, ou encore de Sleiman Frangié. Du reste, un troisième village sunnite, Iaal, aurait carrément refusé de l’accueillir.


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Pour la source précitée proche des Marada, « on ne peut parler de visite de provocation, puisqu’il faut que la personne qui provoque ait un poids sur le terrain ». C’est cet état d’esprit d’ailleurs qu’a reflété une vidéo, diffusée samedi soir sur les réseaux sociaux, d’une rencontre conviviale entre M. Frangié et un groupe de sympathisants, où il est prié de commenter la visite de Gebran Bassil à Zghorta. Et le député de répondre, l’air de rien : « Il est ici ? », ce qui a provoqué le fou rire de l’assistance. C’était une manière aussi d’occulter la portée principale de la visite de Gebran Bassil, en lien avec la prochaine présidentielle.

Si l’on s’en tient toutefois aux législatives, l’essentiel de la visite de M. Bassil reste son passage au domicile du chef du mouvement de l’Indépendance, Michel Moawad (actuellement en voyage pour assister aux oscars), et l’accueil que lui a réservé l’ancienne ministre et députée Nayla Moawad, en présence de l’ancien député Jawad Boulos. Une manière de confirmer officieusement l’alliance en vue entre Michel Moawad et le CPL. Une alliance perçue par des notables du Nord comme étant une alliance « par défaut », les termes d’une alliance avec les FL s’étant avérés peu profitables. Nayla Moawad et Jawad Boulos ont pris part en outre au dîner de clôture de la tournée, dans la ville de Zghorta. C’est là que Gebran Bassil s’est exprimé en termes de « force », pour annoncer le « retour » du CPL à Zghorta et rejeter « l’unilatéralité ».

Hier, c’est dans le jurd de Jbeil que M. Bassil a choisi de se rendre, sur un terrain peu amical. Des observateurs rapportent que sa visite a été organisée de sorte que les habitants ne puissent pas l’interpeller directement, comme à Akoura (150 votants aounistes sur 4 100 inscrits) ou à Kartaba (250 votants sur 7 000 inscrits, selon des détracteurs du CPL). Certains partisans CPL eux-mêmes auraient des réserves à son égard, après avoir espéré succéder au député sortant, Simon Abiramia (originaire du jurd-Nord, à l’opposé de Akoura), qui se porte à nouveau candidat.

L’une des étapes a été en outre Lassa, terrain de tensions maronito-chiites. Rien n’a été dit sur la candidature de Hussein Zeaïter, catapulté de Baalbeck à Jbeil par le Hezbollah. Le ministre a en outre été reçu à l’église du Rosaire, sachant que l’ancienne église du village « est confisquée par le Hezbollah depuis 2000, quand bien même il avait promis à Michel Aoun, dans le cadre de l’entente de Mar Mikhaël, de la restituer à l’Église maronite », confie un notable de la région.



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commentaires (7)

Aller à Lassa dans le Jurd de Jbeil où ses habitants occupent une église maronite depuis 2000 et construisent illégalement sur les terres du Wakf du patriarcat maronite, cela constitue un mépris flagrant envers notre communauté. D'autant plus que cela vient de la part d'un recalé deux fois dans les législatives de 2005 et 2009 nommé ministre puis chef de parti par qui vous savez.

Un Libanais

12 h 45, le 05 mars 2018

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Commentaires (7)

  • Aller à Lassa dans le Jurd de Jbeil où ses habitants occupent une église maronite depuis 2000 et construisent illégalement sur les terres du Wakf du patriarcat maronite, cela constitue un mépris flagrant envers notre communauté. D'autant plus que cela vient de la part d'un recalé deux fois dans les législatives de 2005 et 2009 nommé ministre puis chef de parti par qui vous savez.

    Un Libanais

    12 h 45, le 05 mars 2018

  • Peu importe de l'importance de l'électorat de Bassil, (c'est exactement pareil pour ses adversaires) dans cette partie de la circonscription... Dans une démocratie les candidats ont le droit d'organiser des rencontres et des meetings dans n'importe quel endroit qu'ils estiment nécessaire. Lui retirer des banderoles par ses opposants semble presque amusant. Pure enfantillage qui bafoue l'État de droit. C'est exactement pareil dans le cas inverse. Tous les libanais devraient se respecter et respecter les règles de a démocratie. Frangie, Bassil...et tous les autres leaders ou simples dirigeants politiques devraient expliquer et donner l'exemple a leur base Le respect de la démocratie...

    Sarkis Serge Tateossian

    11 h 41, le 05 mars 2018

  • seuls le decompte des voix de cette circonspription ns dira SI GB est vraiment fort ou s'il a echoue malgre tout - et malgre son alliance avec Michel mouawad .......

    Gaby SIOUFI

    10 h 49, le 05 mars 2018

  • Les libanais commencent ils à comprendre qui est l'inénarrable Bassil !!!! la seule solution : le renvoyer au rôle de gendre .... et qu'il réalise ses frasques en famille

    FAKHOURI

    09 h 26, le 05 mars 2018

  • BOUDÉ UN PEU PARTOUT DANS LE PAYS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 34, le 05 mars 2018

  • "Une manière de confirmer officieusement l’alliance en vue entre Michel Moawad et le CPL"...le grand ecart ne peut etre plus grand...non seulement 2 partis politiques diametralement opposé, mais nayla mouawwad a accuse pendant tres longtemps michel aoun d'avoir commandite l'assassinat de son mari...

    George Khoury

    06 h 49, le 05 mars 2018

  • Mr Bassil, avec ses visites arrogantes dans des régions inhospitalières se prend un peu pour la grenouille de La Fontaine qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf et qui, à force de s’y essayer en creva! En effet, il croit tellement à sa popularité à cause de ses positions de chef de parti et de Ministre des affaires étrangères (Juste à cause de sa qualité de gendrissime royal), que ça lui est monté à la tête et il s’imagine pouvoir baisser le caquet à tous ses opposants et sur leurs propres terrains! Qu’il commence par se faire élire dans son fief de Batroun avant de commencer toutes ces fanfaronnades, sinon il va certainement « crever » politiquement.

    Saliba Nouhad

    04 h 37, le 05 mars 2018

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